L'OMC "sauve les meubles"...provisoirement (24/12/2005)

A la veille de l’ouverture de la conférence de Hongkong, qui a eu lieu du 13/12/2005 au 18/12/2005,  les négociations en cours dans le cadre de l’Organisation Mondiale du Commerce semblaient au point mort.

On sait que les pays membres de l’OMC ont entamé il y a quatre ans un cycle de négociations destiné à poursuivre la libéralisation des échanges dans les  différents secteurs économiques (agriculture, services, produits manufacturés, propriété intellectuelle…).. Connu sous le nom de programme de travail de Doha, ce cycle devrait s’achever fin 2006 date à laquelle l’accord final est espéré.

Mais les négociations sont difficiles.

La confrontation Nord Sud (pays riches, pays pauvres) se manifeste par une contestation du principe même du libre échange . Ainsi, des pays en développement revendiquent le droit de protéger leur agriculture ou leur industrie, revendication relayée par certaines organisations altermondialistes qui, comme Via campesina demandent par la voix de José Bové que l’agriculture soit exclue des négociations. Le discours des ONG est d’ailleurs marqué par une certaine cacophonie.  Ainsi, la défense des pays en développement relaye les revendications d’états comme le Brésil et l’Argentine, puissances agricoles latifundiaires et dont on conçoit mal qu’ils soient inclus dans le groupe des pays du Sud, tant leurs intérêts et leur puissance diffèrent de ceux de nombreux pays africains par exemple où les petites exploitations prévalent. Une contradiction soulignée par le porte parole de Via campesina.

Au clivage nord/sud quelque peu ambigü, on vient de le voir, se superpose celui qui oppose les puissances industrielles et/ou agricoles, le volet agricole des négociations cristallisant les antagonismes les plus vifs.

C’est pourquoi, compte tenu de la rigidité des positions, aucun accord n’était escompté à l’issue de la réunion de Hongkong. Le compromis finalement intervenu le 18/12 est donc une bonne surprise pour les partisans de la libéralisation des échanges. Un échec aurait en effet donné un coup de frein important, voire décisif,  à la poursuite de celle-ci. De ce point de vue l’accord formalisé dans une Déclaration ministérielle « sauve les meubles ».

En revanche, l’accès aux marchés des services et des produits manufacturés auquel l’Union européenne était particulièrement attachée n’enregistre pas de progrès réels. Ce point a été dénoncé par des organisations patronales de l’industrie et des services. De même il n’y a pas d’accord sur la baisse des droits de douane des produits agricoles, dont les Etats-Unis font la condition de la réussite finale des négociations de Doha.

L’accord sur la suppression des subventions aux exportations agricoles a été, quant à lui, dénoncé en France, par des organisations agricoles qui remarquent que seules les subventions à l’exportation font l’objet de mesures contraignantes, contrairement aux autres formes de soutien aux exportations . La Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles juge l’accord déséquilibré, l’Union européenne ayant été, selon elle, seule à faire des concessions significatives. Une opinion contestée cependant, car financièrement, la concession européenne apparaît plutôt symbolique : en   2004, les subventions à l'exportation n'ont représenté que 2,8 milliards d’euros sur les
43 milliards affectés à l’agriculture dans le budget européen .

Du côté des ONG, l’accord est qualifié de décevant, de « trahison » (Oxfam), de « très mauvais » (Via campesina) . Cette dernière estime par exemple que les concessions faites par les pays développés sur les subventions agricoles ne profiteront pas aux petits agriculteurs. Les altermondialistes mettent aussi en garde contre la suite des négociations et les pressions qui vont être faites sur les pays du sud pour les obliger à ouvrir largement leurs marchés aux produits industriels et aux services.

Les négociations se poursuivront donc…dans l’incertitude quant à leur issue et dans un contexte de contestation intacte des finalités et des méthodes de l’OMC.

 

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