Quelle loi s'applique en cas de litige dans un autre pays de l'Union européenne? (27/02/2006)
Vous roulez sur une route d'Espagne au volant de votre voiture lorsque vous avez une collision avec un conducteur italien. Quelle loi va s'appliquer pour régler le problème de la responsabilité et de l'indemnisation des dommages causés ? La loi française, la loi italienne, la loi espagnole?
La question est d'un grand intérêt pratique car faute d'avoir des règles précises pour répondre à ce type de question, chacn de nous peut se trouver entraîné dans des procédures sans fin.
C'est pourquoi il existe ce que l'on appelle des règles de conflit de lois qui permettent à un juge saisi d'une affaire présentant des éléments de rattachement à un droit étranger de déterminer quelle est la loi applicable au litige.
En droit communautaire, il existe des propositions d'harmonisation.Ainsi, le 21/02/2006, la Commission européenne a présenté une nouvelle proposition de règlement sur la loi applicable aux obligations non contractuelles (ex: responsabilité civile). Elle prend en compte certains amendements apportés par le Parlement européen le 06/07/2005 en 1ère lecture dans sa résolution législative. Plus connue sous le nom de « Rome II » (du nom de la Convention signée à Rome qui fut à l’origine de la réglementation communautaire), cette proposition pose une règle générale, à savoir que le droit applicable est celui du pays où le dommage est survenu. Des exceptions à ce principe sont ensuite énumérées.
Au nombre des changements apportés à la proposition initiale, on trouve par exemple, la possibilité pour les parties de choisir le droit applicable avant la naissance de l’obligation non contractuelle, si ces parties sont des commerçants ou par un accord postérieur à la naissance du litige, si les parties n’ont pas cette qualité (nouvel article 4) (NB : cette liberté de choix ne doit pas porter atteinte aux « dispositions impératives » -d’ordre public- du droit national et auxquelles les conventions particulières ne peuvent donc pas déroger).
Certains amendements parlementaires n’ont pas été acceptés par la Commission. Dans le cas de l’amendement concernant le délit de diffamation dans les medias, la Commission, plutôt que de maintenir la rédaction initiale, a préféré supprimer purement et simplement ce délit du champ d’application du règlement . Il est vrai que la
proposition initiale qui prévoyait que la loi applicable à ce type de délit soit celle du lieu du dommage et non celle du pays de diffusion avait provoqué un tollé dans les medias qui soulignaient à juste titre que cela revenait à leur imposer des obligations supplémentaires exorbitantes puisqu’ils auraient du connaître et tenir compte des 25 droits nationaux en vigueur dans l’Union européenne.
En revanche, la Commission européenne s’est montrée moins souple sur l’amendement qui prévoyait une exception au principe du droit du lieu du dommage pour les dommages résultant de l’exercice du droit syndical par des salariés (amendement 31 et article 6 de la résolution votée par le Parlement: « La loi applicable à une obligation non contractuelle résultant d'une action syndicale en cours ou achevée est la loi du pays où cette action a été ou sera introduite »). Adopté par le Parlement afin, selon les explications données, de « ne pas hypothéquer le droit des travailleurs de recourir à des actions collectives garanties par la législation nationale, y compris le droit de faire grève », cet amendement n’a pas été accepté par la Commission qui a jugé trop rigide la règle proposée par le Parlement.
La balle est à présent dans le camp du Conseil. S’agissant du délit de diffamation, sa suppression du champ d’application du futur règlement peut être considérée comme acquise dans la mesure où il faut l’unanimité des états pour rejeter une modification acceptée par la Commission, unanimité qui ne sera pas possible à réunir.
Les medias apprécieront. Les travailleurs restent dans l’expectative.
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