Pas de région sans OGM selon le Tribunal de Première Instance des Communautés européennes
Le Tribunal de Première Instance (TPI) des Communautés européennes a rendu le 05/10/2005 un jugement qui fait figure de chiffon rouge agité devant les adversaires des Organismes Génétiquement Modifiés (OGM) (Tribunal de première instance , 4ème chambre, 05/10/2005, affaires jointes T-366-03 et T-235-04, Land Oberösterreich et République d'Autriche c. Commission des Communautés européennes, jugement en ligne sur le site de la Cour de Justice des Communautés Européennes ).
L’affaire est la suivante : alors que la législation communautaire prévoit une une procédure d'autorisation des OGM qui s'impose aux états, la Haute-Autriche, l'un des états fédérés de l'Autriche, avait informé en 2003 la Commission
européenne de sa décision d'interdire les OGM sur son territoire afin de protéger ses agriculteurs et ses consommateurs de risques potentiels pour la santé, en invoquant la possibilité de dérogation prévue par les textes communautaires. Devant le refus de la Commission d’accorder la dérogation demandée, la région et le gouvernement fédéral autrichien avaient saisi la juridiction européenne pour obtenir gain de cause.
Mais ils ont été déboutés par le Tribunal qui juge que l'interdiction de cultiver des organismes génétiquement modifiés en Haute-Autriche viole les règlements de l'Union européenne, en particulier les dispositions de la directive européenne 2001/18 sur la dissémination des OGM dans l’environnement (Directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 mars 2001, relative à la dissémination volontaire d’organismes génétiquement
modifiés dans l’environnement et abrogeant la directive 90/220).
Celle-ci prévoit la possibilité pour les états de prendre, dans des conditions définies, des mesures provisoires de limitation ou d’interdiction d’OGM en cas de risque pour la santé humaine ou l’environnement. Ils doivent en informer la Commission européenne ainsi que les autres états membres.
Dans son jugement, le Tribunal estime qu’aucune dérogation n’est possible en l’espèce. La décision de la Commission européenne était fondée sur un avis de l'Autorité de sécurité alimentaire de l'Union européenne selon lequel les
preuves apportées par les autorités autrichiennes à l’appui de leur demande ne contenaient «aucune information nouvelle ou spécifiquement locale" montrant un danger pour l’environnement ou la santé humaine. Or, conclut le Tribunal : « Force est de constater que les requérants n’ont pas apporté d’éléments probants permettant de douter du bien-fondé de ces appréciations ».
Ce jugement pourrait faire jurisprudence s’il est confirmé (l’Autriche a deux mois pour faire appel devant la Cour de Justice des Communautés européennes). Il serait alors invocable à l’encontre d’autres interdictions d’OGM intervenues dans des pays comme l’Allemagne, le Luxembourg, la France et la Grèce. Il menacerait le réseau de régions sans OGM qui s’est constitué dans toute l’Union et qui compte, selon les chiffres rapportés par le groupe des Verts du Parlement européen 164 régions, provinces et départements, dont les 20 régions signataires de la « Charte de Florence" (Voir Fronde anti-OGM et Charte de Florence ) .
A la suite de ce jugement, les eurodéputés verts ont demandé que le droit de se déclarer "région libre d’OGM" soit inscrit dans le droit communautaire et notamment dans la directive 2001/18 (voir l’article du 05/10/2005 :
« Pour les Verts au Parlement de Strasbourg, se déclarer "Région libre d'OGM" doit devenir un droit européen » sur le Site des verts )