Le cadre financier pluriannuel (CFP) de l'Union européenne pour la période 2014-2020 vient d'être retoqué à la baisse par les états lors du Conseil européen des 7 et 8 février derniers. Ce cadre budgetaire pluriannuel que l'on appelle aussi "perspectives financières" fixe les limites dans lesquelles devront s'inscrire les budgets annuels de l'Union européenne et impose des plafonds pour chaque catégorie de dépenses afin que celles-ci n'excèdent pas les recettes, car la règle inscrite dans les traités est que le budget doit être financé intégralement par des ressources propres .
Le CFP limite aussi les dépenses totales à un pourcentage du revenu national brut de l'Union européenne (RNB), sachant qu'un seuil maximum qui ne peut être dépassé (et qui n'a d'ailleurs jamais été atteint) est fixé à 1,23 % du RNB de l'Union.
Le cadre est adopté par une décision à l'unanimité du Conseil des ministres, après avoir reçu l'approbation du Parlement européen (article 312 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne).
Il doit refléter les priorités d'action de l'UE, telles qu'elles sont établies dans la stratégie Europe 2020 adoptée par les états lors que Conseil européen de mars 2010. Cinq objectifs ambitieux ont été alors assignés à l'Union: porter le taux d'emploi à 75 % pour les femmes et les hommes d'ici 2020, atteindre un niveau cumulé des investissements publics et privés dans la recherche et le développement de 3 % du PIB; réduire les émissions de gaz à effet de serre de 20% par rapport à 1990; renforcer les niveaux d'éducation et la promotion de l'inclusion sociale (pas de quantification des objectifs).
Comme le répète le Parlement européen, ces objectifs ne pourront pas être atteints seulement par la coordination et la législation: il faudra aussi augmenter les dépenses opérationnelles de l'Union européenne.
Mais le Conseil défend une position différente qui tient en peu de mots: restrictions budgétaires, austérité pour tous et donc pour le budget européen également. Et peu importent les engagements pris dans la stratégie Europe 2020.
Entre les états qui, à l'instar du Royaume-Uni (assuré du soutien bienveillant de l'Allemagne, des pays du Nord et des Pays-Bas) demandaient des coupes importantes dans les dépenses et ceux qui voulaient un budget européen plus ample pour favoriser la croissance comme l'Italie et la France, il a fallu trouver un compromis. Le budget n'est donc pas raboté comme le voulait David Cameron, mais il n'est pas non plus augmenté comme l'auraient voulu la Commission et le Parlement européen. En fait, c'est une voie médiane, celle de l'Allemagne, qui demande que les dépenses soient contenues qui a été suivie.
Par rapport au CFP 2007-2013, la baisse est de l'ordre de 3% et les medias se sont focalisés sur ce fait inhabituel en oubliant de regarder de plus près. Le montant des crédits d'engagement (dépenses maximales autorisées) est de 960 milliards d'euros (959 988 millions) soit 1% du RNB (1,048 %pour la période précédente), et celui des crédits de paiement (dépenses réelles) est de 908,4 milliards d'euros soit 0,95% du RNB (1% pour le CFP 2007-2013).
Il reste à savoir comment le Parlement européen va accueillir cet accord qui implique des réductions de dépenses encore plus importantes que celles qu'il avait déja contestées en novembre dernier.
Pour obtenir son approbation, il est probable que les états devront mettre la main au portefeuille et concéder quelques milliards de plus, si l'on se réfère aux négociations passées. Mais cela ne suffira pas sans doute. Car, selon les présidents des quatre principaux groupes du Parlement européen, le budget adopté par les états est un budget qui conduit à un déficit structurel et qui installe l'austérité. Or, ont-ils déclaré, le Parlement ne pourra pas accepter un budget d'austérité pour sept ans. Il demandera donc que les états s'engagent à le réexaminer dans deux ou trois ans. On peut aussi penser que le Parlement mettra sur la balance la réforme du financement du budget européen et des ressources propres de l'UE, car il a évoqué à plusieurs reprises son intention de faire d'un engagement des états sur cette réforme un élément de la négociation budgétaire.
Il faut donc attendre le vote du Parlement pour savoir ce que sera le CFP 2014-2020.
Pour plus d'informations sur les crédits qui augmentent (il y en a ! ) et ceux qui baissent, voir l'article sur eurogersinfo: le budget de l'Union européenne sous les fourches caudines des états.
Domaguil