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médicaments

  • Camomille à gogo(s)

    De retour chez moi après un déplacement en Espagne, je trouve dans ma messagerie des messages alarmants et alarmés me demandant pourquoi l’Union européenne veut-elle interdire les pantes médicinales. Qu’est-ce que c’est encore que cette histoire, me demandé-je tout en soupçonnant fortement un des ces nombreux bobards dont internet et les medias nous régalent régulièrement, notamment quand ils parlent de l’Union européenne.

    Et, vérification faite, je confirme : c’est bien un bobard. L’UE n’a pas interdit les plantes médicinales et n’envisage pas de le faire. Simplement, partant du constat de bon sens que les médicaments traditionnels à base de plantes ne sont pas anodins et qu’ils peuvent avoir des effets indésirables, l’Union européenne a estimé qu’ils devaient relever de la législation pharmaceutique communautaire, qui a pour but de « protéger la santé publique en garantissant la sécurité, l’efficacité et la qualité des médicaments». A part quelques eurosceptiques frénétiques qui dénonceront l’invasion des normes communautaires, je ne vois pas qui pourrait s’offusquer que l’UE prenne soin de notre santé. D’autant que les kamikazes qui veulent absolument utiliser des produits non garantis ni contrôlés disposent d’un moyen pour se les procurer : internet vaste territoire aux zones de non droit persistantes.

    Donc, les médicaments à base de plantes étaient logés à la même enseigne réglementaire que les autres médicaments jusqu’à ce qu’une directive adoptée en 2004 vienne simplifier la procédure d’enregistrement qui leur est applicable pour pouvoir être commercialisés dans l’Union européenne. Ce qui partait d’une bonne intention, on en conviendra puisqu’il s’agissait d’alléger les formalités pour ces médicaments, afin de tenir compte de l’ancienneté de leur usage. La procédure simplifiée prévue par la directive permet l’enregistrement de ces produits sans avoir à procéder aux essais cliniques et autres vérifications de la sécurité du produit qu’exige la procédure complète d’autorisation de mise sur le marché. Le demandeur de l’enregistrement d’un médicament traditionnel à base de plantes doit fournir une documentation démontrant l’innocuité du produit concerné dans les conditions d’emploi spécifiées et apporter la preuve d’un historique de qualité avéré du produit, en l’occurrence au moins trente années d’utilisation en toute sécurité, dont quinze dans l’Union européenne.

    Bon prince, le législateur européen avait prévu une période transitoire de 7 ans afin de donner aux producteurs et aux importateurs de médicaments traditionnels à base de plantes le temps de préparer leur documentation et de démontrer que la sécurité et l’efficacité de leurs produits sont acceptables et peuvent être commercialisés dans l’Union européenne.

    Mais à l’approche de l’échéance, le 30/04/2011 on a vu fleurir sur internet moult articles contestant la directive qui signerait l’arrêt de mort de la phytothérapie, une pétition circulant pour dénoncer l’interdiction des plantes médicinales par l'Union européenne, ce qui, évidemment, est faux, puisque, comme on l’a vu : 1 - la directive traite des médicaments à base de plantes et non des plantes médicinales 2 - elle ne prévoit pas une interdiction mais une procédure d’enregistrement, car il ne s’agit pas de faire disparaître la phytothérapie mais d’encadrer sa mise sur le marché européen.

    A qui profite ce hoax ?

    A l’industrie agroalimentaire/ phytothérapie à l’évidence. Il n’est qu’un des éléments du combat que se livrent l’industrie pharmaceutique et l’industrie de la phytothérapie. Désinformation, lobbying auprès des institutions nationales et communautaires, tout est bon aux grands groupes rivaux pour pousser leurs pions. Il savent bien qu’il y aura toujours des crédules pour servir leurs intérêts en relayant leurs arguments, même mensongers. Et le problème est là : par ses outrances, ce hoax absurde occulte les problèmes que peut poser la directive, comme le soulignent par exemple l’eurodéputée Michèle Rivasi ou encore Nature & Progrès qui, dans un communiqué intitulé « Plantes médicinales bientôt interdites dans l’UE :C’EST FAUX, ARCHI FAUX », souligne : « Cette directive fait partie d?une politique partiale et réductrice qui favorise l’hégémonie des trois cultures actuellement dominantes au niveau mondial : occidentale (officielle), chinoise et indienne (ayurvédique). Tous les remèdes qui ne sont pas reconnu depuis minimum 30 ans (15 si provenant de l’Union européenne) devront passer par des procédures, certes allégées, mais longues d’agréments. Ce sont donc les défenseurs des médecines naturelles mineures et traditionnelles (créole, tibétain, nigérien, cévenol, etc) qui seront les plus touchés par la directive, à moins de prouver avec dilligence un passé d’utilisation conséquent. Le problème c’est que dans ces sociétés à la connaissance encore fortement ancrée dans la tradition orale, il sera plus difficile de récolter des preuves ?». Par ailleurs, les opposants à la directive font aussi remarquer que le coût de l'obtention des documents nécessaires à l'enregistrement est trop élevé pour de nombreux petits producteurs.

    Quelles sont les conséquences de la nouvelle réglementation?

    La directive n’implique pas que les plantes non autorisées ne seront plus mises sur le marché. Mais, dans la mesure où elles ne répondront pas aux critères définis pour pouvoir invoquer des qualités médicinales, elles ne devront plus afficher d'indications thérapeutiques. Elles pourront toujours être mises en vente, mais seulement en tant que compléments alimentaires. Leurs allégations santé, leur efficacité et leur innocuité devront alors remplir les conditions, plus souples, posées par le règlement 1924/2006 du 20 décembre 2006concernant les allégations nutritionnelles et de santé portant sur les denrées alimentaires.

    Domaguil