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réforme

  • De l'eau dans le gaz entre le Parlement européen et le Conseil

     

    Les mauvaises manières du Conseil indisposent décidément le Parlement européen qui clame haut et fort son mécontentement. Evidemment, il faudrait faire la part des choses entre ce qui relève de la posture et de la communication, et ce qui traduit un vrai malaise devant la volonté de suprématie des états. Quoiqu'il en soit, le Parlement est fâché et le fait savoir dans deux affaires qui sont un nouvel épisode de la guerre entre les institutions européennes.

    Sur le dossier de la réforme des règles de Schengen,le Parlement européen a mis sa menace à exécution comme il l'avait annoncé le 09/06/2012 à la suite de la décision du Conseil de rendre le rétablissement des controles aux frontières intérieures de l'espace Schengen plus facile. Furieux de la prétention des états à vouloir décider seuls des conditions et de l'opportunité de ce rétablissement sans que la Commission et le Parlement n'aient leur mot à dire, les eurodéputés ont engagé une épreuve de force avec le Conseil.

    Le Parlement envisage tout d'abord de former un recours devant la Cour de justice de l'Union européenne au motif que le Conseil n'a pas respecté la procédure législative. En qualifiant le texte approuvé de décision, le Conseil s'est en effet affranchi de la nécessité de colégiférer avec le Parlement comme il doit le faire pour les lois ordinaires européennes comme les règlements. La décision, elle, requiert le vote du seul Conseil, le Parlement étant simplement consulté. Mais ce procédé est considéré par le Parlement comme un "détournement de procédure" dans la mesure où la base légale choisie par le Conseil pour adopter la réforme des règles de Schengen traduit, selon lui, la volonté de l'évincer.

    En attendant, la Conférence des présidents (composée des chefs des groupes politiques et du Président du Parlement européen) a annoncé le 14/06/2012, sa décision de "suspendre la coopération du Parlement avec le Conseil" sur cinq dossiers "jusqu'à ce qu'une solution satisfaisante soit trouvée sur la gouvernance de Schengen". En clair, le Parlement va bloquer, en refusant de les examiner, divers textes relatifs à la modification du code frontières Schengen et convention d'application de l'accord de Schengen; la coopération judiciaire en matière pénale: lutte contre les attaques visant les systèmes d'information;la décision d'instruction européenne ; les aspects du budget 2013 liés à la sécurité intérieure; les données des dossiers passagers européens.

    Selon le Président du Parlement européen, Martin Schulz, cette décision grave et inédite se justifie car "l'approche du Conseil Justice et Affaires intérieures du 7 juin est une gifle pour la démocratie parlementaire et est inacceptable pour les représentants, directement élus, des citoyens européens".

     

    "Rebelote" quelques jours plus tard, cette fois sur le dossier du brevet communautaire (appelé maintenant brevet de l'Union européenne ou brevet unitaire). Ce brevet permettrait de protéger une invention dans tous les pays de l'Union européenne sur la base d'un dépôt unique et sans formalités administratives supplémentaires. Mais les discussions entre les états achoppaient jusqu'ici sur le siège de la juridiction qui sera compétente pour traiter des conflits. Pour avancer, la Commission avait modifé sa proposition en avril 2011 et préconisé la création du brevet dans le cadre d'une coopération renforcée, ce qui permettait de contourner l'opposition de certains états (Italie et Espagne). Finalement, l'accord a été trouvé par les états lors du Conseil européen des 28 et 29/06/2012: le compromis laborieusement négocié fixe le siège de la division centrale de la juridiction à Paris et prévoit que des pôles spécialisés de la division centrale seront aussi créés, et installés à Londres et à Munich.

    Grâce à cet accord, le Conseil et le Parlement européen vont pouvoir reprendre l'examen de la proposition de la Commission. La Commission espère que les premiers brevets unitaires puissent être enregistrés en 2014.

    Sauf que...le Parlement renacle. Et pourquoi le fait-il? Parce qu'il estime que les états ont dénaturé le texte sur lequel les représentants du Parlement et ceux du Conseil étaient tombés d'accord. En effet, ils ne se sont pas contentés de désigner - enfin - le siège de la juridiction mais ils ont remis en cause un certain nombre d'articles, modifiant ainsi profondément le texte, explique un communiqué du Parlement européen du 03/07/2012. Pour résumer, le Conseil voudrait tirer prétexte de la création de la juridiction unitaire des brevets pour réduire la compétence de la Cour européenne de justice en cas de litige en matière de brevet. Ce que le Parlement européen n'est pas prêt à accepter. Et c'est pourquoi, il a décidé de reporter le vote sur la proposition de brevet unitaire.

    Europe intergouvernementale, dominée par les états, ou Europe communautaire, tel est l'enjeu de cette "guerre" entre institutions.

    Domaguil

  • Tollé contre la proposition de la Commission européenne de réforme du secteur du vin

    En juin 2006, la Commission avait présenté une communication annonçant une réforme en profondeur du secteur du vin, dont la mesure phare était l’arrachage de 400 000 hectares sur une période de cinq ans soit environ  12% du vignoble européen. On imagine l’émotion provoquée par cette proposition dans le milieu vitivinicole.

    Emotion entendue par le Parlement européen qui était  monté aux créneaux pour défendre l’« héritage », la « fierté nationale » que constitue la tradition des vins européens de qualité, à l’occasion d’un débat du 15/02/2007.

     

    La radicalité des mesures annoncées par la Commission européenne avait  été vivement critiquée et les eurodéputé avaient proposé des mesures de protection et de promotion. La Commission européenne avait ainsi pu mesurer  que les orientations qu’elle avait présentées n’étaient pas prêtes d’obtenir l’aval du Parlement.

     

    La proposition qu’elle vient de rendre publique, le 04/07/2007, tient en partie compte des critiques.

    Ainsi, l’objectif le plus contesté, celui de l’arrachage de vignes est-il revu à la baisse, la Commission proposant de le diminuer de moitié: l’arrachage concernerait 200 000 hectares, arrachés sur une base volontaire,  au lieu des 400 000 envisagés à l’origine. Il serait limité les zones écologiquement fragiles et sur les coteaux. De plus, la Commission propose désormais d’adopter une approche progressive, en donnant dans un premier temps une priorité aux réformes structurelles, avant de libéraliser plus largement le secteur à partir de 2014. Des efforts plus importants seraient fait pour la promotion (120 millions d'euros supplémentaires pour promouvoir les vins européens dans les pays tiers). Conformément aux demandes des députés, la Commission propose également de maintenir l’interdiction de la vinification avec des moûts  importés et le mélange avec des vins des pays tiers.

     

    Elle reprend en revanche des mesures qui avaient été, elles aussi, très contestées :

    • la fin des régimes de distillation et d'enrichissement (suppression de la chaptalisation, c’est-à-dire de l’ajout de sucre au vin, suppression de l’aide au moût destiné à l’enrichissement qui avait été mise en place pour compenser le surcoût que représentait cette technique par rapport à la chaptalisation)
    • la fin des restrictions de plantation à partir de 2014
    • les règles d’étiquetage jugées de nature à semer la confusion dans les esprits des consommateurs (ex : en permettant d'indiquer le cépage et le millésime pour les vins sans indication géographique, ce qui est interdit actuellement).

    Comme souvent, la Commission européenne justifie sa proposition par le souci de rendre le secteur plus compétitif, de « simplifier » des règles supposées complexes (par exemple en matière d’étiquetage)…Ces raisons peuvent se justifier, de même que certaines des  mesures proposées. Les chiffres donnés par la Commission décrivent un secteur en crise profonde confronté à une baisse de consommation et à une concurrence des vins de pays tiers, même si les ventes de vins de qualité sont en augmentation. Ces dix dernières années, les importations ont augmenté de 10 % par an alors que les exportations ne progressent que lentement. Si ces tendances se poursuivent, la productiond’excédents atteindra 15 % de la production annuelle d’ici 2010/2011, sachant que  l’Union européenne dépense chaque année plus d’un demi-milliard d’euros uniquementpour se débarrasser du vin ne trouvant plus de débouchés.

    Le constat ne fait pas débat mais certaines solutions proposées font grincer des dents.

    Ainsi, en France, nombre de viticulteurs dénoncent l’orientation "ultra-libérale" de la Commission (c’est devenu quasiment automatique) qui conduira à la mise en place de de "vins industriels". Ils contestent la cohérence de mesures qui prévoient d’un côté la libéralisation des droits de plantation et l’autre suppriment les aides à la distillation qui permettait de lutter contre les excédents de vins. Ils demandent un arrachage temporaire qui permette de replanter au même endroit si le marché s’améliore et une politique européenne plus ambitieuse en direction des pays tiers.

    Ils ont reçu le soutien du Ministre français de l’agriculture qui, dans un communiqué du 04/07, salue les « orientations nouvelles » adoptées par la Commission mais dénonce également  « des solutions encore mal adaptées ». Plutôt que de privilégier l’arrachage et la libéralisation des droits de plantation, la réforme de l’Organisation Commune de marché du vin doit se tourner résolument « vers un objectif de reconquête et d'expansion dans un marché mondial en développement ». Suit une énumération des points de la proposition de la Commission à supprimer ou à amender fortement de l’avis de la France. Et ils sont nombreux….

    Domaguil