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M.Barroso "planche" devant les députés français

Dans le cadre des questions d’actualité, l'Assemblée Nationale recevait le 24 janvier un invité très attendu : M.Barroso, Président de la Commission européenne.

 

Bien que débatteur expérimenté et habile, M.Barroso n’a pas eu la partie facile. Certes l’opposition des députés communistes était prévisible et les nombreuses interruptions de M. Gremetz sacrifiaient l’argumentation au spectacle.

 

Mais M.Barroso a du aussi répondre aux inquiétudes d’un parti dont il aurait pu attendre plus d’ « indulgence », l’UDF, dont le porte parole a dénoncé le déclin de l’idée européenne. Parlant au nom du parti socialiste, M.Ayrault s’est montré plus sévère. Il a réaffirmé l’attachement à l’idée européenne, mais a été très caustique s’étonnant ironiquement que la volonté de la Commission de moins et mieux légiférer se soit exercée au détriment de textes nécessaires comme celui concernant les routiers (1), alors que dans le même temps la Commission maintenait la proposition de directive Bolkestein et celle de libéralisation des services portuaires. Or l’Union européenne est en panne de projet, de dynamique de perspectives, a poursuivi M.Ayrault, les non français et néerlandais s’expliquant par le sentiment d’une « lente dérive du projet politique européen ». Si les états sont largement responsables de cette situation, la Commission l’est également par son absence de vision et son obstination à maintenir une orientation qui n’a pas l’adhésion des peuples, a martelé M.Ayrault, qui a appelé l’exécutif communautaire à retrouver « le souffle » qu ‘avait su donner Jacques Delors, ajoutant que l’Europe a plus besoin aujourd'hui « de bâtisseurs que de comptables".

 

Dans une ambiance très chahutée, entre applaudissements et huées,  M.Barroso, qui visiblement n’entendait pas se laisser intimider, a répondu point par point aux questions et critiques.

 

Sur la proposition de directive Bolkestein, il s’est dit prêt à la réviser, afin de trouver une solution « équilibrée » garantissant le maintien des acquis sociaux et des droits des travailleurs, notamment le respect du droit du travail du pays d’accueil. Mais il a rappelé que le texte doit être examiné par le Parlement européen le 14 février et que la Commission ne veut pas présenter un texte révisé avant que le Parlement ne se soit prononcé. M.Barroso a rappelé que la proposition de directive reposait sur une base qui ne pouvait être remise en cause, celle de la libre circulation des services qui est une des quatre libertés (avec celle des personnes, des biens et des capitaux) garanties par les traités européens. Plus offensif, il a rétorqué au groupe communiste : « Ce n’est pas avec des discours contre les entreprises que vos allez créer plus d’emplois et de croissance » et affirmé que la France qui a « 700 entreprises en Pologne » a tout à gagner à la libéralisation des services.

 

Sur un autre grand thème en débat, à savoir l’avenir du traité constitutionnel, M.Barroso a estimé impossible que le Conseil européen de juin puisse parvenir à une décision, comme, par exemple, le lancement d’une nouvelle conférence intergouvernementale. Il n’y a pas de consensus européen pour cela, les états ayant des positions trop divergentes pour le moment sur le chemin à suivre a expliqué le Président de la Commission. Il s’est dit convaincu que la bonne méthode est de créer  une dynamique politique pour amorcer une dynamique institutionnelle et non l’inverse. Pour cela il faut passer des discours aux résultats concrets afin de gagner le soutien des citoyens . Le débat français a posé de vraies  questions, qui exigent de nous de vraies réponses, a reconnu M.Barroso. Sur ce point, il n’a guère été contredit…


1-M.Ayrault évoque certainement l'interdiction de circulation des poids lourds le week-end
Voir l’article : Les dossiers de la rentrée  européenne/ Priorités législatives          


 

Commentaires

  • Je trouve votre compte rendu et vos éclairages rafraîchissants car toujours écrits dans un vrai souci d'objectivité. Et cela c’est rare.

    La démarche de M. Barroso est saine (pas de langue de bois) et surtout donne le sentiment d'être volontaire.

    Pour aller plus loin, par rapport à l'argument de la création (ou au rachat) de 700 entreprises en Pologne par les Français, c'est évidemment une bonne nouvelle pour la France ... Par contre, pas mal de personnes se posent la question de savoir quel intérêt cela a lorsque, en même temps, les entreprises françaises délocalisent en Chine. On peut bien sûr s’agacer devant une telle absence de lien entre ces deux faits : il est clair que d’un point de vue macro économique, ce rapprochement n’a pas de sens. Beaucoup vont jusqu’à parler de populisme ou de démagogie. Et pourtant,..

    Toute une frange d'ouvriers et d'employés, mais aussi quelques cadres, ne voient pas, pour eux, l'intérêt de la création de 700 entreprises en Pologne. A part pour les Polonais, ce dont ils se réjouissent sincèrement. Mais, il ne faut pas oublier que les ouvriers et les employés forment en France un cortège de 6 millions de salariés.

    La France n’est pas devenue une immense classe moyenne, malgré le vœu pieu de VGE des années 70.

    Cela peut expliquer aussi le décalage ressenti par une part importante de la population. Décalage entre une classe dirigeante qui se félicite de la création de 700 entreprises françaises en Pologne et des gens qui ont le sentiment d’être laissé pour compte. Alors, oui, ces créations d’entreprises sont une bonne chose pour la France, mais attention que les retombées pour les Français soient partagées. (Ce ressenti est présent aussi parmi la population portugaise et allemande, au moins à l’Est de l’Etat).
    Voilà peut être le pourquoi d’une mélancolie ou d’un malaise dont parle la presse française.

    Au fait de dire pour M. Barroso que ce n’est pas étant contre les entreprises que la France va créer de l’emploi (ce qui est une lapalissade), il serait juste d’ajouter que ce n’est pas en privilégiant uniquement les multi nationales que l’on va créer de l’emploi non plus. Par exemple, les aides européennes pour les entreprises existent, notamment pour le développement à l’exportation. Mais s’il est simple d’avoir accès aux programmes d’aides proposées par l’UE (par le web et en français), y prétendre en voulant postuler est suffisant compliqué pour nécessiter les services d’un spécialiste. A part, de grandes sociétés, quelle PME à un service juridique en interne ? Je connais beaucoup d’entrepreneur qui avant de se lancer dans une étude préliminaire y réfléchissent à deux fois, simplement par rapport au coût cette étude. (Eviter l’avocat d’affaires travaillant à 250 euros de l’heure, merci).
    En parallèle, les créations d’emplois en France (pour les autres Etats membres, je ne sais pas) sont le fait des PME de 50 à 250 salariés ainsi que des TPE.

    Loin de moi l’idée de dire que l’UE n’a que des défauts ou des inconvénients. Mais, il existe des réalités toute bêtes à prendre en compte si l’UE veut retrouver l’adhésion massive des citoyens à l’UE : un salarié licencié, s’il devient un chômeur, est avant tout un citoyen mécontent. Le lien entre politique et économie est viscéralement à chercher là.

    Mais merci, M. Barroso de dire que des questions ont été posées, et qu’il est urgent d’y répondre.

    Et surtout, merci de votre venue.

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