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Dernière ligne droite pour REACH

La proposition de règlement REACH (système intégré d'enregistrement, d'évaluation et d'autorisation des substances chimiques), une des plus ambitieuses de l’Union européenne est sur le point d’être définitivement adoptée. Point besoin d’être extralucide en effet pour prédire que le règlement sera voté, sauf revirement de dernière minute toujours possible en théorie mais assez peu vraisemblable, car le texte prochainement examiné par le Parlement européen est un compromis négocié avec le Conseil et ayant fait l’objet d’un accord dans la soirée du 30/11.  Ce qui devrait donc permettre d’achever la procédure législative dès la seconde lecture au Parlement (vote prévu le 13/12).

 

Comme il est habituel, le texte final est le résultat d’une négociation serrée menée sous le regard vigilant des groupes de pression, en l’occurrence industrie chimique et organisations de défense des consommateurs et de l’environnement, qui se sont efforcées de faire prévaloir leur point de vue. D’où les modifications subies par la proposition initiale (certains articles sur ce blog retracent cette évolution : voir la catégorie  environnement). 

En résumé, REACH oblige les industriels à évaluer l’impact de l’utilisation de leurs produits pour la santé et l’environnement, ce qui opère un « renversement de la charge de la preuve », les fabricants ayant l’obligation de démontrer l’inocuité de leurs produits alors qu’actuellement c’est aux autorités publiques qu’il appartient de prouver qu’une substance est  dangereuse. Les substances doivent être enregistrées auprès de l’ Agence européenne des produits chimiques. Un produit non enregistré ne pourra pas être commercialisé. Pour les substances les plus dangereuses, une  procédure d'autorisation est imposée par le règlement.

 

Premier sujet de mécontentement pour les organisations de défense de l’environnement (voir par exemple les réactions de Greenpeace, et du WWF),  des consommateurs (BEUC) ou des partis comme les Verts français au Parlement européen : REACH ne s’appliquera qu’aux substances fabriquées ou importées dans l’Union européenne  en quantités supérieures à une tonne par an, soit, estime-t-on, à  30 000 substances, ce qui signifie que des milliers de substances chimiques seront soustraites à cette réglementation (70 000 selon les estimations).

 

Deuxième (gros) sujet de mécontentement : le principe d'une  substitution obligatoire des substances les plus dangereuses (perturbateurs endocriniens, substances cancérigènes, mutagènes…) a été abandonné dans les cas où des alternatives existent. Les industriels devront étudier ces alternatives possibles, mais ils ne seront pas obligés de procéder à la substitution s'ils peuvent prouver que les risques sont « maîtrisés de façon adéquate » et que les avantages économiques et sociaux excèdent les risques pour la santé et l’environnement.

 

Troisième sujet de mécontentement : le « devoir de vigilance » (ou de prudence) des industries . Ce principe signifie que la production, l'importation et la mise sur le marché des substances, dans des circonstances raisonnablement prévisibles, ne doit pas nuire à la santé ou l'environnement. Mais si le Parlement avait à l’origine posé une obligation claire sous forme d’un amendement à l’article 1, le Conseil a préféré une formulation moins précise qui s’analyse comme une déclaration d’intention figurant dans un considérant (non dans le corps du texte, donc).

Quatrième sujet de mécontentement : afin de réduire l’impact (financier notamment) du règlement sur les PME , les obligations d’information des fabricants ou des importateurs pour les substances produites en petites quantités (entre 1 et 10 tonnes) sont allégées,  au détriment des utilisateurs (consommateurs, travailleurs).

 

 

Pour les députés européens Verts, c’est clair : le Parlement européen a « capitulé » devant le lobbying « intense » de l’industrie chimique allemande.

 

 

Mais si les défenseurs de l’environnement et des consommateurs sont mécontents, les représentants de l’industrie ne semblent pas non plus satisfaits, alors qu’ils ont obtenu une belle victoire avec la limitation de l’obligation de substitution contre laquelle ils tiraient à boulets rouges.

 

 

 

Mais ce n’est pas assez, semble-t-il et les industries chimiques continuent à se plaindre du coût de REACH qui aura, selon elles, des conséquences graves sur la compétitivité de l’industrie européenne (avec un chantage sous-jacent à l’emploi). L’argument est bien connu et, en avril 2005, la Commission avait du lancer une étude d’impact à la demande des industries chimiques, étude dont les conclusions ont infirmé la thèse de ces dernières.

 

 

En définitive REACH semble mettre les adversaires d’accord au moins sur un point : ça ne va pas.

 

 

Un jugement à nuancer si l’on considère les progrès que constituent le système d’enregistrement et le renversement de la charge de la preuve. Mais le résultat est, c'est vrai, loin de correspondre aux attentes qu’avaient suscitées la proposition initiale de la Commission européenne.

 Domaguil

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