L’état polonais se fait taper sur les doigts
Il y a quelques jours, je rappelais les tentatives des gouvernants polonais pour écorner les droits fondamentaux et évoquais notamment le cas de l’eurodéputé Bronislaw Geremek, menacé d’être déchu de son mandat en vertu de la loi polonaise de lustration (voir la note du 4 mai ).
L’opposition avait formé un recours contre cette loi devant le Tribunal constitutionnel polonais. Celui-ci a invalidé partiellement la loi le 11/05/2007 et l’a amputée de ses dispositions les plus emblématiques (et contestées), jugées contraires à la Constitution. L’arrêt est un véritable camouflet pour le Gouvernement et le Président polonais, qui avaient exercé de fortes pressions pour éviter de voir la loi censurée. La nécessité de la décommunisation n’est pas remise en cause, mais sa mise en œuvre et notamment le champ d’application trop large. L’obligation de déclaration imposée aux journalistes, aux universitaires, ou encore aux dirigeants d'entreprises cotées en bourse est déclarée non conforme à la Constitution par le tribunal. Celui-ci juge également non conforme un article qui prévoyait la publication des noms des anciens collaborateurs de la police politique et impose comme condition de validité, une définition plus restrictive du "collaborateur" qui s’applique aux seules personnes ayant réellement fourni des informations.
Mais quel sera le sort de Bronislaw Geremek ? Il reste aux juristes à examiner la décision dans le détail afin de savoir comment l’interpréter et quelles en sont les conséquences en l’espèce. Mais la presse a fait état de la déclaration du Président du Tribunal Jerzy Stepien selon lequel «Un élu au suffrage universel ne peut pas perdre son mandat pour avoir refusé de remplir la déclaration de collaboration ». On peut supposer, sans trop de risques d’erreur, qu’il sait de quoi il parle...
Les autorités polonaises, pour qui le mois de mai est décidément loin d’être joli, ont subi un autre revers, devant la Cour européenne des droits de l’homme, cette fois. Celle-ci avait été saisie par des organisations militant en faveur des droits des homosexuels à la suite de l’interdiction par le maire de Varsovie (Lech Kaczynski, devenu depuis Président de la république de Pologne) d’une marche pour l’égalité des droits. La Cour conclut à la violation des article 11 (liberté de réunion et d’association) de la Convention européenne des Droits de l’Homme, 13 (droit à un recours effectif) et 14 (interdiction de la discrimination) (arrêt du 03/05/2007, requête no 1543/06, Bączkowski et autres c. Pologne ).
L'obstination des autorités polonaises à faire fi des règles de droit résultant aussi bien du droit interne que de leurs engagements internationaux les expose à d’autres déboires et à nourrir les recueils de jurisprudence, par exemple, si elles poursuivent leur projet d’exclusion des enseignants « ouvertement homosexuels » de l'enseignement.