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allemagne

  • Voici le temps des pères démolisseurs de l'Europe?

     

    Si on a les dirigeants que l'on mérite qu'a donc bien pu faire l'Union européenne pour mériter le tandem Sarkozy- Merkel?

    Autoproclamé moteur de l'Europe, ce duo improbable est largement responsable, à force d'avoir multiplié les déclarations contradictoires et les décisions à contre temps, de l'aggravation de la pression des marchés financiers sur les pays de la zone euro et, de ce fait, de l'aggravation de la crise.

    La frileuse madame Merkel refuse de voir plus loin que la peur de l'inflation et l'obsession de la dette et des déficits qui fondent la politique de son pays traumatisé par son histoire (mais ce qui n'a pas empêché l'Allemagne de s'affranchir des règles du Pacte du stabilité par le passé lorsque cela s'est avéré lui convenir). Cela peut se comprendre: l'Allemagne étant un état démocratique, madame Merkel doit rendre des comptes à son parlement et de plus est placée sous la surveillance attentive de sa cour constitutionnelle. Cela n'aide pas à prendre des décisions rapides. Et on peut comprendre aussi qu'elle hésite à engager l'Allemagne (à supposer qu'elle en ait le pouvoir) dans une intégration qui la conduirait à répondre des dettes de pays cigales, elle qui a été si longtemps fourmi. Mais le problème est que la situation de l'Union européenne exige d'autres raisonnements que comptables et si l'on peut comprendre les raisons de madame Merkel, sa désastreuse prudence qui l'a conduite à systématiquement trainer des pieds avant de prendre les décisions qu'elle refusait "énergiquement" auparavant, a permis et encouragé la spéculation sur la dette souveraine des pays pour lesquels il aurait fallu mettre les charriots européens en cercle dès les prémisses de la crise, ce qui aurait probablement coupé les ailes de spéculateurs.

    Quant à Nicolas Sarkozy, en désamour avec ces français ingrats qui ne reconnaissent pas ses qualités, l'Union européenne semble lui fournir un terrain propice où exercer ses talents supposés de sauveur de l'Europe et du monde (excusez du peu mais c'est ce que disent, sans rire, certains de ses adulateurs), grâce à une activité débordante et au fait que contrairement à madame Merkel il n'a pas de comptes à rendre à un parlement sous domination de l'exécutif. Qu'il semble ne rien entendre à la construction communautaire, que pour lui l'UE soit un cadre de coopération intergouvernementale sous la houlette – cela va sans dire - du prestigieux couple franco allemand, qu'il méprise ou ignore le Parlement européen et la Commission, peu importe: il est le sauveur de l'Europe et du monde, qu'on se le tienne pour dit.

    Donc, notre couple vedette annonce une initiative (après moultes déclarations sensées terrasser la spéculation avec le succès que l'on sait) pour tenter de sortir de la situation de plus en plus compromise dans laquelle se trouve la zone euro. Cela s'appelle un "Pacte" qui sera "proposé" aux partenaires européens lors du Conseil des 8 et 9 décembre, comme cela vient d'être confirmé par la Ministre Porte parole du Gouvernement, Valérie Pécresse, lors des questions au Gouvernement de ce jour.

    Sur ce que sera le contenu de ce pacte on doit pour le moment s'en tenir à des spéculations, alimentées par les agences de presse et les medias qui comme on le sait, sont eux-même alimentés par des "indiscrétions" et des informations distillées au compte gouttes par des interlocuteurs supposés informés, qui peuvent tout aussi bien n'être que des ballons d'essais ou des écrans de fumée.

    Mais soit, je tente une synthèse des rumeurs qui courent.

    Qu'apprend-on du nouveau plan génial concocté par les nouveaux père – et mère - fondateurs de l'Europe? Il s'agirait tout bonnement d'appliquer l'idée, évoquée depuis longtemps, de créer une mini zone euro qui regrouperait les pays les plus "vertueux", ceux qui méritent encore le prestigieux triple A octroyé par ces (demi?) dieux que sont les agences de notation. Ces pays s'engageraient à respecter un pacte de stabilité renforcé prévoyant des sanctions en cas de dérapage budgétaire (pourquoi, alors que les nouvelles mesures de gouvernance économique prévoient déja de telles mesures?). La surveillance des budgets nationaux pourrait être dévolue à la Commission et les dérapages pourraient être sanctionnés par la Cour de Justice de l'Union européenne comme l'a proposé un temps Angela Merkel. Des obligations communes aux seuls pays "triple A", seraient créées. A côté de ce club des "happy few", un groupe de pays - Italie, Espagne, Belgique, Irlande et Portugal – pourrait bénéficier de la solidarité des premiers, à condition d'appliquer des mesures de réduction de leur dette. Enfin, troisième groupe de pays, les pays les plus récemment arrivés dans la zone euro se verraient "priés" de renoncer à leur droit de veto lors des décisions afin de prendre en compte leur poids économique moindre. On se souvient que certains des "petits" pays ont renaclé à soutenir les pays qui avaient besoin d'une aide communautaire (exemple: blocage de l'adoption du Fonds européen de stabilité financière par la Slovaquie). L'idée est donc de contourner la difficulté de décider à 17. A ceux qui remarquent que cela revient à créer une zone euro à deux vitesses, Valérie Pécresse répond fermement qu'il n'en est rien

    Soit. Il va falloir attendre un peu pour en avoir le coeur net.

    Mais si les informations des medias s'avèrent justes, la fragmentation de la zone euro peut avoir des conséquences délétères, en marginalisant certains pays et en envoyant le signal que la solidarité communautaire ne joue pas pour tous de la même façon. Une petite Europe communautaire émergerait, à l'intérieur ou à coté de la "grande" Union européenne, un club des six qui rappellerait les débuts de la construction européenne, lorsque la Communauté Economique Européenne comptait seulement six membres et qu'elle connaissait une sorte d'âge d'or. Mais les temps ont changé et les partenaires de cette "super zone euro" ne seraient plus les mêmes, deux membres fondateurs l'Italie et la Belgique se trouvant relégués en "seconde zone". Pourquoi faire? Si l'idée est de circonscrire l'incendie, en redonnant confiance aux marchés par la création d' un "noyau dur" de pays de confiance, si ensuite ceux-ci utilisent leur crédit pour aider leurs partenaires en difficulté à résorber leurs dettes, cela peut paraitre un scenario acceptable. Mais faut-il pour cela diviser la zone euro? Par exemple, la création d'euro-obligations que vient de proposer la Commission européenne n'est-elle pas une solution alternative?

    Ou faut-il comprendre que le projet européen aujourd'hui, tel que veulent l'imposer Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, se limite à l'austérité et à la rigueur budgétaire sous la férule d'organes ou d'institutions à la légitimité démocratique au mieux faible, au pire inexistante? Faut-il comprendre que la seule perspective donnée aux peuples européens est le sacrifice sans savoir pourquoi ils doivent se sacrifier, pour quel idéal commun, quelle vision de l'Union, quels bénéfices futurs? L'UE doit apporter un plus, plus de solidarité, plus de prospérité, plus de compréhension mutuelle, plus d'opportunités de réalisation individuelle et collective, et non un moins. S'il s'avérait que leur projet est aussi étriqué, nul doute que madame Merkel et monsieur Sarkozy mériteraient le nom de pères démolisseurs de l'Europe.

    Domaguil

  • Rencontre franco allemande: beaucoup de bruit pour peu

     

    Qu'est-il sorti du "Sommet" de crise tenu hier par N.Sarkozy et A.Merkel?

    A première vue, cela a de l'allure:

    Création d'un "véritable" gouvernement économique pour la zone euro

    - Adoption avant l'été 2012 par les 17 membres de la zone euro d'une règle d'or sur les déficits budgétaires : inscription dans les constitutions nationales de la règle montrant que les lois de finances annuelles doivent se soumettre à un objectif de retour à l'équilibre budgétaire;

    - Proposition commune par la France et l'Allemagne dès septembre 2011, d'une législation communautaire créant une taxe sur les transactions financières.

    - Mise en place d'un "impôt sur les sociétés" commun à la France et l'Allemagne, dont l'assiette et les taux seraient harmonisés dans ces deux pays afin de "donner l'exemple de la convergence" aux autres pays.

    Mais si l'on essaie d'associer un contenu à ces propositions, le bilan est beauccoup plus décevant.

    Domaguil



  • Idées reçues

    Deux exemples récents montrent à quel point les préjugés peuvent être néfastes pour  l'intérêt commun et être instrumentalisés par les gouvernants. Ce phénomène bien connu au niveau national se retrouve à celui de l'Union européenne. Dans les deux cas, c’est un membre emblématique de l’UE, l’ Allemagne dont les autorités se laissent aller à « ragoter » en utilisant des clichés, par myopie et ignorance, et/ou pour complaire à leur opinion publique (ou à l’idée qu’elles s’en font).

    Prenons l’affaire de la bactérie Eceh: le 22 mai, l'Allemagne informe la Commission européenne à travers le "Système d'alerte précoce et de réaction" pour les maladies transmissibles (EWRS) de la propagation d’une  bactérie, la E.coli enterohémorragique (Eceh) suspectée d'avoir causé la mort de quatre personnes en Allemagne. Dans un premier temps, les autorités sanitaires de Hambourg (région touchée) identifient les concombres espagnols comme étant les vecteurs de la bactérie. Le "Système d'alerte rapide pour les denrées alimentaires et aliments pour animaux" (RASFF) est activé. Les ventes de concombres (pas seulement espagnols) s’effondrent et toute la filière fruits et légumes est touchée pendant que les hôpitaux de Hambourg se remplissent. Quelques jours plus tard, les concombres espagnols sont mis hors de cause, comme les salades un temps soupçonnées…

    Le principe de précaution est, on le voit, dévoyé dans une sorte de panique relevant du sauve qui peut. C’est bien parce que les autorités du Land de Hambourg ont des comptes à rendre à leur population dont elles sont garantes de la santé qu’elles ont lancé cette alerte. Jusque là rien à redire. Mais dans l’urgence, les autorités accusent sans preuves, les medias relaient sans distance ni esprit critique et l’affaire tourne à la catastrophe pour les producteurs espagnols dont les produits injustement mis en cause sont à présent boudés par les consommateurs. Le résultat on le connaît : l’origine de la bactérie n’est toujours pas connue avec certitude à l’heure actuelle mais on présume à présent qu’elle a son origine en Allemagne, vraisemblablement dans la région de Hambourg , le secteur des fruits et légumes espagnols est en déconfiture et l’UE va peut-être devoir payer des indemnités à l’Espagne car l’Allemagne estime que c’est au budget de l’UE de compenser les pertes subies par les producteurs espagnols et non à celui des  autorités de Hambourg (un raisonnement que l’on peut admettre puisque le marché est intégré et que chaque pays est comptable des faits de l’autre mais à condition que les pays donnent à l’UE les moyens financiers d’assumer les conséquences de leurs bêtises).

    On a relevé ici ou là avec raison je pense que si le communiqué des autorités de Hambourg a eu tant d’impact, c’est qu’il reposait sur un a priori plus ou moins tacite, celui que les pays du sud de l’Europe sont laxistes en matière d’hygiène et de sécurité alimentaire, moins avancés et moins scrupuleux que leurs partenaires du Nord. Et c’est bien parce qu’elles mêmes avaient ces préjugés que les autorités de Hambourg n’ont semble-t-il pas envisagé que leurs propres produits ou leurs propres procédures sanitaires puissent être en cause. Le concombre espagnol a donc focalisé ces préjugés et dans une réaction en chaîne qui était pourtant prévisible, c’est toute la filière fruits et légumes espagnole, mais aussi française, italienne, belge…qui subit les conséquences de la précipitation à communiquer des dirigeants de Hambourg. Hors de l’UE, l’équité est rétablie, puisque ce sont toutes les productions européennes qui font l’objet d’un embargo en Russie et que les Etats-Unis soumettent à un contrôle renforcé les productions allemandes et espagnoles. Eux ne font pas la distinction entre Europe du Nord et Europe du Sud…

    Le phénomène du dénigrement du voisin n’est pas spécifique à l’Union européenne. Les préjugés existent bel et bien à l’intérieur des frontières nationales. En France, les bretons, les corses, les auvergnats, les marseillais, les parisiens sont l’objet de représentations et d’appréciations pas forcément flatteuses. En Espagne demandez aux castillans ce qu’ils pensent des catalans…Aux Etats-Unis, les bostoniens se moquent des « ploucs » texans et en Allemagne, la Bavière a longtemps servi (sert) de repoussoir aux progressistes de Rhénanie…En somme, on est toujours le « black », « l’arabe », le «sous développé» de quelqu’un. Ce n’est déjà pas un comportement glorieux de la part des particuliers que nous sommes mais c’est en revanche inadmissible lorsque ce sont des dirigeants politiques qui jouent sur ces ressorts (avec, à l’extrême, les diatribes des partis xénophobes dont l’exclusion et le rejet de l’autre sont le fond de commerce).

    J’en viens au second « dérapage » commis cette fois par la Chancelière allemande elle-même  On le sait, le sauvetage de la Grèce par les deniers européens a fait grincer les dents de bien des contribuables allemands, mécontents de devoir payer pour le train de vie jugé dispendieux et irresponsable des « pays du club méditerranée » également désignés par l’acronyme peu flatteur de « pigs » (Portugal, Italy, Greece, Spain) .

    Sans doute pour les amadouer et donner des gages à ceux qui veulent plus de « vertu » budgétaire européenne, un jour récent où elle aurait pu être mieux inspirée, Angela Merkel déclare gravement : «Nous ne pouvons pas avoir une monnaie commune et certains avoir plein de vacances et d'autres très peu. A la longue, cela ne va pas». Les eurosceptiques boivent du petit lait tant les eurosceptiques de toutes nationalités sont près à dire et entendre n’importe quoi du moment que cela va à l’encontre de l’Union européenne qu’ils exècrent. Et comme souvent, ce qui est présenté comme une évidence est…un gros préjugé. Car, les études démontrent que les allemands travaillent moins que d’autres, notamment, o surprise (pour certains) dans certains pays du sud de l’Union. Il suffit de consulter les statistiques d’Eurostat. Une étude récente de Natixis consacrée à ce sujet le rappelle opportunément. Elle fait apparaître qu’en 2010, les allemands en activité ont travaillé 1.390 heures en moyenne, contre 1.654 pour les espagnols, ou 2.119 pour les grecs. La même étude révèle que les allemands partent à la retraite à 62,2 ans en moyenne, plus tôt qu’en Espagne (62,3 ans) ou au Portugal (62,6 ans). Les résultats économiques des pays du sud moins bons que ceux de l’Allemagne, on le sait bien, ne seraient donc pas liés au fait qu’ils ont la culture de la sieste et des vacances, mais à la moindre spécialisation dans l’industrie de pointe, à un moindre investissement dans l’innovation et à l’existence d’une main d’œuvre moins qualifiée.

    Il serait temps de ne pas se tromper de diagnostic et de proposer des solutions qui se tiennent au lieu d’assener des « évidences » qui sont autant de préjugés. Mais les dirigeants des pays européens en sont-ils capables?


    Domaguil