Nuages sur le monopole des notaires français
L’étau se resserre autour des notaires français dont on a vu qu’ils sont menacés de devoir renoncer à leur monopole au nom de la libre prestation de services. Les différents états dont les législations sont attaquées devant la Cour de Justice de l’Union européenne, justifient les restrictions d’accès à la profession de notaire par le fait que ceux-ci participent à l’exercice de l’autorité publique. C’est le cas de la France qui refuse l’accès à la profession à des ressortissants d’autres états membres pour ce motif. Un argument qui n’a pas convaincu la Commission européenne qui a introduit un recours en manquement contre la France et six autres pays membres.
L’argument ne semble pas non plus convaincre l’Avocat Général qui dans ses conclusions du 14/09/2010 estime qu’il serait nécessaire « non seulement de déterminer si une activité participe à l’exercice de l’autorité publique, mais également de rechercher ci-après si la mesure étatique contestée peut être justifiée, à la lumière du principe de proportionnalité, par les objectifs poursuivis… » (l’exercice d’activités participant même à titre occasionnel, à l’exercice de l’autorité publique). La première question à se poser est donc de savoir si les notaires dans leur activité participent effectivement à l’exercice de l’autorité publique (en authentifiant les actes juridiques). La seconde est de savoir si une discrimination fondée sur la nationalité peut être justifiée compte tenu du particularisme de cette activité. L’Avocat Général ne nie pas que les notaires participent, du moins dans certains de leurs actes, à l’exercice de l’autorité publique, mais il estime qu’aucune des garanties exigées de la profession de notaire ni aucune des spécificité de cette profession « ne justifie que le statut de ses membres intègre une mesure aussi rigoureuse et sévère que la discrimination directe en raison de la nationalité en cause dans les présentes affaires » (point 140). La notion de loyauté invoquée par les états « en tant qu’expression d’engagement envers la communauté politique et de solidarité avec celle-ci ne saurait, pour autant, être considérée comme signe distinctif et exclusif, propre aux États membres en tant que tels, de sorte qu’elle exigerait nécessairement un lien de nationalité » (point 142) remarque l’Avocat Général .
La conclusion suit : «…une mesure qui introduit une condition de nationalité telle celle contestée par la Commission dans les présentes affaires apparaît disproportionnée dans la mesure où elle n’est pas nécessaire à la réalisation des fins poursuivies par chaque État lorsqu’il entend soustraire l’activité notariale à la liberté d’établissement » (point 146). Par conséquent, il y a bien manquement d’Etat et la réglementation française doit être revue.
Domaguil
La Cour de Justice a suivi les conclusions de son avocat général dans son arrêt du 24 mai 2011, voir la note du même jour :
Plus besoin d'être français pour être notaire en France