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Europe - Page 3

  • Voici le temps des pères démolisseurs de l'Europe?

     

    Si on a les dirigeants que l'on mérite qu'a donc bien pu faire l'Union européenne pour mériter le tandem Sarkozy- Merkel?

    Autoproclamé moteur de l'Europe, ce duo improbable est largement responsable, à force d'avoir multiplié les déclarations contradictoires et les décisions à contre temps, de l'aggravation de la pression des marchés financiers sur les pays de la zone euro et, de ce fait, de l'aggravation de la crise.

    La frileuse madame Merkel refuse de voir plus loin que la peur de l'inflation et l'obsession de la dette et des déficits qui fondent la politique de son pays traumatisé par son histoire (mais ce qui n'a pas empêché l'Allemagne de s'affranchir des règles du Pacte du stabilité par le passé lorsque cela s'est avéré lui convenir). Cela peut se comprendre: l'Allemagne étant un état démocratique, madame Merkel doit rendre des comptes à son parlement et de plus est placée sous la surveillance attentive de sa cour constitutionnelle. Cela n'aide pas à prendre des décisions rapides. Et on peut comprendre aussi qu'elle hésite à engager l'Allemagne (à supposer qu'elle en ait le pouvoir) dans une intégration qui la conduirait à répondre des dettes de pays cigales, elle qui a été si longtemps fourmi. Mais le problème est que la situation de l'Union européenne exige d'autres raisonnements que comptables et si l'on peut comprendre les raisons de madame Merkel, sa désastreuse prudence qui l'a conduite à systématiquement trainer des pieds avant de prendre les décisions qu'elle refusait "énergiquement" auparavant, a permis et encouragé la spéculation sur la dette souveraine des pays pour lesquels il aurait fallu mettre les charriots européens en cercle dès les prémisses de la crise, ce qui aurait probablement coupé les ailes de spéculateurs.

    Quant à Nicolas Sarkozy, en désamour avec ces français ingrats qui ne reconnaissent pas ses qualités, l'Union européenne semble lui fournir un terrain propice où exercer ses talents supposés de sauveur de l'Europe et du monde (excusez du peu mais c'est ce que disent, sans rire, certains de ses adulateurs), grâce à une activité débordante et au fait que contrairement à madame Merkel il n'a pas de comptes à rendre à un parlement sous domination de l'exécutif. Qu'il semble ne rien entendre à la construction communautaire, que pour lui l'UE soit un cadre de coopération intergouvernementale sous la houlette – cela va sans dire - du prestigieux couple franco allemand, qu'il méprise ou ignore le Parlement européen et la Commission, peu importe: il est le sauveur de l'Europe et du monde, qu'on se le tienne pour dit.

    Donc, notre couple vedette annonce une initiative (après moultes déclarations sensées terrasser la spéculation avec le succès que l'on sait) pour tenter de sortir de la situation de plus en plus compromise dans laquelle se trouve la zone euro. Cela s'appelle un "Pacte" qui sera "proposé" aux partenaires européens lors du Conseil des 8 et 9 décembre, comme cela vient d'être confirmé par la Ministre Porte parole du Gouvernement, Valérie Pécresse, lors des questions au Gouvernement de ce jour.

    Sur ce que sera le contenu de ce pacte on doit pour le moment s'en tenir à des spéculations, alimentées par les agences de presse et les medias qui comme on le sait, sont eux-même alimentés par des "indiscrétions" et des informations distillées au compte gouttes par des interlocuteurs supposés informés, qui peuvent tout aussi bien n'être que des ballons d'essais ou des écrans de fumée.

    Mais soit, je tente une synthèse des rumeurs qui courent.

    Qu'apprend-on du nouveau plan génial concocté par les nouveaux père – et mère - fondateurs de l'Europe? Il s'agirait tout bonnement d'appliquer l'idée, évoquée depuis longtemps, de créer une mini zone euro qui regrouperait les pays les plus "vertueux", ceux qui méritent encore le prestigieux triple A octroyé par ces (demi?) dieux que sont les agences de notation. Ces pays s'engageraient à respecter un pacte de stabilité renforcé prévoyant des sanctions en cas de dérapage budgétaire (pourquoi, alors que les nouvelles mesures de gouvernance économique prévoient déja de telles mesures?). La surveillance des budgets nationaux pourrait être dévolue à la Commission et les dérapages pourraient être sanctionnés par la Cour de Justice de l'Union européenne comme l'a proposé un temps Angela Merkel. Des obligations communes aux seuls pays "triple A", seraient créées. A côté de ce club des "happy few", un groupe de pays - Italie, Espagne, Belgique, Irlande et Portugal – pourrait bénéficier de la solidarité des premiers, à condition d'appliquer des mesures de réduction de leur dette. Enfin, troisième groupe de pays, les pays les plus récemment arrivés dans la zone euro se verraient "priés" de renoncer à leur droit de veto lors des décisions afin de prendre en compte leur poids économique moindre. On se souvient que certains des "petits" pays ont renaclé à soutenir les pays qui avaient besoin d'une aide communautaire (exemple: blocage de l'adoption du Fonds européen de stabilité financière par la Slovaquie). L'idée est donc de contourner la difficulté de décider à 17. A ceux qui remarquent que cela revient à créer une zone euro à deux vitesses, Valérie Pécresse répond fermement qu'il n'en est rien

    Soit. Il va falloir attendre un peu pour en avoir le coeur net.

    Mais si les informations des medias s'avèrent justes, la fragmentation de la zone euro peut avoir des conséquences délétères, en marginalisant certains pays et en envoyant le signal que la solidarité communautaire ne joue pas pour tous de la même façon. Une petite Europe communautaire émergerait, à l'intérieur ou à coté de la "grande" Union européenne, un club des six qui rappellerait les débuts de la construction européenne, lorsque la Communauté Economique Européenne comptait seulement six membres et qu'elle connaissait une sorte d'âge d'or. Mais les temps ont changé et les partenaires de cette "super zone euro" ne seraient plus les mêmes, deux membres fondateurs l'Italie et la Belgique se trouvant relégués en "seconde zone". Pourquoi faire? Si l'idée est de circonscrire l'incendie, en redonnant confiance aux marchés par la création d' un "noyau dur" de pays de confiance, si ensuite ceux-ci utilisent leur crédit pour aider leurs partenaires en difficulté à résorber leurs dettes, cela peut paraitre un scenario acceptable. Mais faut-il pour cela diviser la zone euro? Par exemple, la création d'euro-obligations que vient de proposer la Commission européenne n'est-elle pas une solution alternative?

    Ou faut-il comprendre que le projet européen aujourd'hui, tel que veulent l'imposer Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, se limite à l'austérité et à la rigueur budgétaire sous la férule d'organes ou d'institutions à la légitimité démocratique au mieux faible, au pire inexistante? Faut-il comprendre que la seule perspective donnée aux peuples européens est le sacrifice sans savoir pourquoi ils doivent se sacrifier, pour quel idéal commun, quelle vision de l'Union, quels bénéfices futurs? L'UE doit apporter un plus, plus de solidarité, plus de prospérité, plus de compréhension mutuelle, plus d'opportunités de réalisation individuelle et collective, et non un moins. S'il s'avérait que leur projet est aussi étriqué, nul doute que madame Merkel et monsieur Sarkozy mériteraient le nom de pères démolisseurs de l'Europe.

    Domaguil

  • Politique étrangère de l'Europe: une espèce menacée?

    C'est sous ce titre qu'une "Naine diplomate" de mes amies écrit un article dans lequel elle s'énerve de la façon dont les dirigeants européens ont régi aux mouvement révolutionnaires en Tunisie et en Egypte. comme je partage son énervement et sa critique, je vous le recommande. Elle y exprime une vision moins "franco centrée" qui permet de dépasser le débat interne actuel sur les ubuesques mésaventures de nos ministres voyageurs.

  • Fumée blanche et noirs pronostics

     

    Un article du Figaro l’affirme : « Si les Vingt-sept ont trouvé rapidement un consensus jeudi sur la désignation du premier président du Conseil européen et du Haut représentant de l'Union européenne aux affaires étrangères, leur double choix n'a pas convaincu la presse européenne ». Ah si la presse n’est pas convaincue…l’heure est grave. Du côté de politiques pro européens le choix du conclave passe mal aussi : "L'Europe a atteint le fond (...) après avoir nommé un président faible de la Commission européenne (José Manuel Barroso), les chefs d'Etat ont désormais nommé un président du Conseil falot et une Haute représentante insignifiante", a estimé l’eurodéputé vert Daniel Cohn-Bendit. Ah flute alors, si Cohn Bendit le dit… Ce ne sont que deux exemples, il y en d’autres de la même tonalité qui foisonnent actuellement dans les medias. Un véritable jeu de massacre. Dans cet unanimisme, tel qu’il apparaît dans les revues de presse d ‘aujourd’hui, y compris celles de la presse de nos voisins, je suis tentée de voir une illustration (de plus) de l’esprit moutonnier qui prévaut souvent dans les grands medias . « Terne », « falot », deux adjectifs répétés ad nauseam au long de la reprise de quelques dépêches AFP ou autres. Circulez, il n’y a rien de plus à voir…l’Europe politique est morte, bla bla bla.

    Moi qui ne suis pas dans le secret des dieux ni dans celui de la lecture du marc de café, je n’ai qu’un message, hélas bien raisonnable, à délivrer : « attendons de voir…. ». Comme le rappelle Thierry Chopin, directeur des études de la Fondation Robert Schuman , dans une interview au journal le point en ligne : « … il faut se souvenir que parfois dans l'histoire de la construction européenne, certaines personnalités ont été désignées et ne bénéficiaient pas, a priori, d'une forte "légitimité charismatique". C'est notamment le cas de Jacques Delors. Or, il s'est révélé être un excellent président de la Commission européenne et il s'est imposé en prenant des initiatives politiques fortes ».

    Pour patienter voici un petit rappel :

    Le Président du Conseil Européen

    Le traité de Lisbonne qui a repris sur ce point les dispositions du traité constitutionnel crée un « Président du Conseil Européen », ce que les médias (toujours eux)  ont appelé le « Président de l’Europe » pour mettre l’accent sur le fait que  l’Union européenne aura ainsi un « visage » plus facilement identifiable par les citoyens notamment. Réunion des chefs d'État des pays de l’Union, du président et du président de la Commission, le Conseil européen définit les orientations et les priorités politiques générales de l'Union.

    Le nouveau président est élu à la majorité qualifiée par le Conseil européen pour un mandat de deux ans et demi, renouvelables une fois. Jusqu’ici, la présidence du Conseil européenne était une présidence tournante (chaque pays assumait à tour de rôle la présidence de l’Union européenne et à ce titre celle du Conseil européen) et de durée limitée (six mois). Bien sur le Président du Conseil européen n’abandonnait pas pour autant son mandat national et avait donc une « double casquette ». Rien de tel pour le Président du Conseil européen : la fonction ne peut être cumulée avec un mandat national.

    Il assure la  représentation extérieure de l'Union européenne dans les sommets internationaux. Il  préside et anime les travaux du Conseil européen. Il « dialogue » avec les autres institutions. Autant de prérogatives qui peuvent rester honorifiques ou au contraire, permettre l’affirmation de l’institution, si son titulaire les exerce pleinement et parvient à s’imposer à la fois sur la scène internationale et sur l’échiquier institutionnel européen.

    Le Haut Représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune

    Il s’agit également d’une innovation du Traité de Lisbonne par rapport aux traités actuels. A la  dénomination – trop connotée -  de  Ministre des affaires étrangères de l'Union qui figurait dans le traité constitutionnel, le traité de Lisbonne a préféré celle de Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Elle résulte de la fusion des deux postes actuels de Haut Représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune  et de Commissaire aux relations extérieures, cette fusion devant assurer la cohérence entre l’action extérieure de la Commission et celle du Conseil.

    Le Haut représentant est nommé pour cinq ans par un vote à la majorité qualifiée du Conseil européen en accord avec le Président de la Commission (il peut être démis de son mandat de la même façon). Il conduit la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union, participe à son élaboration en présentant des propositions et l'exécute en tant que mandataire du Conseil (il agit de même pour la politique de sécurité et de défense commune). Il disposera d’un «service diplomatique» européen, une autre innovation du nouveau traité.

    Il préside le Conseil des affaires étrangères (formation qui réunit les  ministres des Affaires étrangères des états de l’Union européenne) et est l’un des vice-présidents de la Commission européenne.

    Les rapports avec le Président du Conseil européen et la hiérarchie entre les deux sont que le premier définira les grandes lignes de la politique extérieure (rôle du Conseil européen qu’il préside), et que le second l'exécutera. Mais la seule la pratique dira s’il y a empiètement sur les prérogatives de l’autre. Là encore, « rien n’est écrit »  et tout dépendra des personnalités exerçant ces fonctions. Attendre et voir venir donc…Mais si vous êtes impatients d’avoir des scenarii et êtes friands de pronostics, la presse est là pour vous en donner… quitte à ce qu’ils soient infirmés par la suite;-)

    Domaguil

  • Un eurosceptique devant le Parlement européen

    Qui ne connaît les sirènes, ces créatures séduisantes dont les attraits menaient vers l'abîme l'imprudent qui se laissait ravir par leurs chants ?

    Loin de moi certes l'idée de comparer notre actuel Président du Conseil européen, le Président tchéque Klaus à une sirène (!) mais je voudrais cependant remarquer que depuis son arrivée à la présidence tournante de l'Union il nous sert la même rengaine eurosceptique, sans doute dans l'espoir que de la répétition naîtra la conviction.

    A moins que son chant ne soit celui du cygne ?

    Car il a peu convaincu malgré ses efforts jeudi au Parlement européen où, devant des députés que l'on imagine médusés, il s'est lancé dans une charge effrénée contre l'intégration politique européenne. Le discours, reproduit sur le site de la Présidence tchèque, est pour le moins étonnant, combinant le rappel des vieux démons communistes et l'ode au marché et à la dérégulation, ce qui dans le contexte actuel révèle, à défaut d'un talent visionnaire, une réelle obstination dans l'erreur.

    Peut-être était-il contrarié du fait que les députés tchèques venaient de voter le Traité de Lisbonne, après des semaines d'incertitude durant lesquelles les eurosceptiques n'avaient pas ménagé leur peine pour obtenir le rejet du texte?

    Toujours est-il que, tout en affirmant l'ancrage européen de la République tchèque et en qualifiant l'Union européenne d'expérience révolutionnaire, il a vertement critiqué le système décisionnel de l'Union européenne qui est au service d'une sorte de pensée unique, selon lui, ce que le Traité de Lisbonne ne ferait qu'accentuer. « Une seule voie y est imposée et celui qui cherche une alternative est considéré comme adversaire de l'intégration européenne », a-t-il affirmé, poursuivant avec un sens très personnel de la mesure: « Il n'y a pas longtemps que nous avons vécu dans notre partie de l'Europe sous un régime politique où toute alternative n'était pas admissible  et, en conséquence, aucune opposition parlementaire n'existait. Nous avons fait  cette amère expérience que l'absence d'opposition signifie la perte de la liberté. C'est pourquoi des alternatives politiques doivent exister ». On appréciera le parallèle entre l'Union et les anciennes "démocraties populaires" !

    L'Union européenne a une fâcheuse tendance à traiter de questions qui devraient rester de la compétence nationale, estime le valeureux chevalier des libertés. Et de poser une question qui a certainement été du goût des députés : « êtes-vous sûrs - lors de tout votre vote - en décidant d'une  affaire, que cette affaire doit être résolue justement dans cette salle et non  dans un endroit plus près des citoyens, donc à l'intérieur des  États européens ? ». Bref, pour M.Klaus il ne faut surtout pas plus d'Union européenne mais plutôt moins car la finalité de l'Europe communautaire n'est pas de « contredire la liberté et la prospérité » dans des pays qui ont connu l'oppression communiste. On appréciera, à nouveau, le rapprochement entre l'Union et le système communiste. Mais en démocratie tout le monde peut avoir ses lubies et en faire part aux autres...

    Celles de M.Klaus sont finalement très simples : l'UE ne peut être qu'une zone de libre échange permettant à la rigueur la réalisation de projets ponctuels qui intéressent plusieurs pays. Et surtout, il faut éviter l'ingérence du politique dans le marché. Car, selon M.Klaus (et la thèse, on en conviendra, est originale), la crise actuelle n'est pas due aux excès du libre échange mais au fait qu'il y a trop de régulation notamment de la part de l'Union européenne. C'est pourquoi il ne faut surtout pas que le traité de Lisbonne entre en vigueur car tous ces « défauts » seront amplifiés. Voilà un exemple de plus (si besoin était) de l'incohérence de la position des différents adversaires du traité. Pour les uns celui ci est fondé sur une idéologie ultra libérale. Pour les autres, il consacre l'interventionnisme politique. Jamais apparemment ils ne s'interrogent sur la bizarrerie que constitue l'existence d'interprétations si diamétralement opposées d'un texte dont ils prétendent pourtant  qu'il ne permet aucune interprétation alternative de ses dispositions. Et ils voudraient qu'on les prenne au sérieux ?

    Le Président du Parlement européen a pour sa part choisi de répondre au discours de M.Klaus en rappelant quelques évidences sur la construction européenne et sur les règles démocratiques et en saluant (ironiquement ?) dans la prestation du Président tchèque « une expression de la diversité en Europe ». Cela ne méritait sans doute pas plus.

    Domaguil