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  • La libéralisation complète des activités postales en Europe peut encore attendre

    A la suite d’une consultation publique lancée en novembre 2005, la Commission européenne a présenté une proposition  d’ouverture totale à la concurrence des activités postales en 2009. Comme je l’expliquais dans un article du 24/10/2006, cette proposition  se heurte à une forte opposition, assez pour retarder son adoption qui requiert un vote favorable du Conseil et du Parlement européen selon la procédure de codécision. Or, l'examen du texte par le Conseil, hier, montre que les états sont divisés sur la question.

     

     

    Le compte rendu publié indique que les discussions entre les états ont permis des  « progrès significatifs » sur des points clés tels que le maintien d’un service universel de qualité,  les règles de désignation des fournisseurs de service universel, l’accès aux infrastructures postales, les principes de tarification…

     

     

    Mais sur la date de mise en oeuvre de la libéralisation, aucun rapprochement n’a été constaté entre les pays qui, à l’instar de la France, refusent de fixer une date et ceux qui veulent hâter la libéralisation complète des services postaux, menés par l’Allemagne qui souhaitait qu’un accord politique intervienne sous sa présidence, donc avant le 1er juillet. La pierre d’achoppement est le financement du service universel. La France, mais aussi des pays comme la Belgique, l'Espagne, le Luxembourg, la Grèce, l'Italie, la Pologne, la Hongrie et d'autres nouveaux membres demandent qu’avant de fixer une date pour la libéralisation, ce financement soit garanti par des mécanismes clairs et qui ne puissent pas être remis en cause par la Commission au nom du respect de la concurrence. La directive proposée est de leur avis trop vague sur ce point.

     

     

    La Commission est donc priée de remettre l’ouvrage sur le métier et de préciser sa proposition. Le texte sera ensuite examiné par le Parlement européen où un nombre croissant de députés s’oppose à présent également à la date butoir. Un répit salutaire pour trouver des solutions permettant de concilier exigences du service public et impératifs du droit communautaire de la concurrence.

     

     

    Et pour finir, puisqu’il est question de service public, retour sur une initiative que j’avais évoquée à l’automne dernier, celle de la Confédération Européenne des Syndicats qui a lancé en novembre une pétition pour défendre les services publics dans l’Union européenne. A ce jour, la pétition a recueilli plus de 340 000 signatures. Pas mal, non ? Vous voulez signer cette pétition ? C’est très facile. Il suffit de suivre ce lien.

     

    Domaguil

     

  • Mini traité mini ambition

    Sauver les meubles, cela pourrait être à présent le mot d’ordre dans l’Union européenne. Dans cette optique, le « mini traité », rebaptisé de façon moins péjorative « traité simplifié », proposé par le nouveau président français pourrait être une solution acceptable.

     

     

    Du moins tel est le message qu’ont délivré Nicolas Sarkozy et José Manuel Durão Barroso lors de la conférence de presse qui a clôturé leur rencontre du 23 mai. Le Président de la Commission européenne est même allé jusqu’à parler d’un « consensus qui se forme » autour de cette idée. Les dix-huit pays qui ont ratifié le traité constitutionnel apprécieront…

     

     

    Car le traité proposé par Nicolas Sarkozy est bien éloigné du traité constitutionnel européen. Ce qui, venant du Président d’un pays qui a rejeté ce traité, est logique et conforme à la volonté des électeurs. Mais ce qui ne correspondra pourtant pas aux attentes du camp du non. Les partisans d’une réforme de l’Union européenne (qu’ils l’appellent de leurs vœux pour avoir plus d’Europe -sociale, politique…-  ou pour au contraire réduire ses compétences) n’y trouveront pas leur compte.

     

     

    Certes, on ne connaît pas les contours exacts de ce mini traité proposé (et, a fortiori ne connaît-on pas les termes des négociations qui devraient conduire à l’adoption d’un nouveau texte par les états de l’Union). Mais on en connaît les grandes lignes.

     

     

    Une réforme purement institutionnelle

     

    Nicolas Sarkozy avait présenté sa proposition  en février 2006 à Berlin et de façon assez détaillée, en septembre dernier dans une intervention devant les Amis de l'Europe et la Fondation Robert Schuman.

     

     

    Après avoir constaté que l’Union européenne devrait se doter d’une Constitution qui aille « au-delà des dispositions techniques contenues dans les traités actuels  et scelle la dimension fondamentalement politique de la construction européenne », Nicolas Sarkozy constatait qu’il faudrait du temps et un « grand débat démocratique »  avant d’y parvenir. D’où l’idée, en attendant ce grand soir européen  de parer au plus pressé en « rétablissant la capacité de décision de l'Union » en lui donnant des « règles de fonctionnement efficaces ».

     

     

    Le mini traité permettrait de réaliser les réformes institutionnelles les plus urgentes, celles qui, de l’avis de Nicolas Sarkozy, peuvent faire facilement l’objet d’un consensus entre les états. A cette fin, il propose de reprendre les dispositions du traité constitutionnel relatives à :

    • extension de la majorité qualifiée et de la codécision, notamment en matière judiciaire et pénale
    • modalités de la majorité qualifiée, notamment la règle de la double majorité
    • partage du pouvoir législatif entre Parlement et Conseil et élection du Président de la Commission par le Parlement
    • respect du principe de subsidiarité (l’Union n’a vocation à agir que lorsque son action est plus efficace, plus appropriée, que celle des Etats membres)
    • présidence stable du Conseil européen
    • mise en place d’un Ministre des Affaires étrangères de l’Union européenne qui cumulerait les fonctions actuelles de Haut Représentant de l’Union pour la politique étrangère et de sécurité commune, de Commissaire en charge des relations extérieures et de président du Conseil affaires étrangères
    • droit d’initiative citoyenne , c’est-à-dire la possibilité donnée à un million de citoyens de demander à la Commission de faire des propositions dans tel ou tel domaine
    • coopérations renforcées
    • personnalité juridique de l’Union

    Depuis cette intervention, on n’en sait guère plus sur le mini traité, si ce n’est qu’il pourrait être encore plus mini que dans son ébauche, si l’on en croit Jean Quatremer,  correspondant à Bruxelles du journal Libération, et observateur avisé de la vie politique de l’Union qui écrit à ce sujet: « On est donc très près de ce que souhaitent les Britanniques, qui ne veulent reprendre de la constitution que quelques articles purement fonctionnels ».

     

     

    Ce qui paraît certain c’est que dans ce projet ont disparu, notamment :

    • la charte des droits fondamentaux, partie II du traité constitutionnel (qui restera une déclaration sans valeur contraignante : il faudra donc s’en remettre à l’inventivité jurisprudentielle de la Cour de Justice des Communautés européennes pour espérer voir certains droits reconnus et s’imposer au législateur européen)
    • la clause sociale de l’article III-117 qui imposait de tenir compte d'impératifs sociaux ("exigences") et des conséquences qu'ils peuvent entraîner dans le domaine social dans la définition et l’application des politiques communautaires
    • l’association du Parlement européen à la révision du traité prévue par l’article IV-443

    Quant aux politiques qui faisaient l’objet de la partie III du traité constitutionnel, elles resteront appliquées à l’identique puisque le mini traité ne porte que sur les questions institutionnelles.

     

     

    L’objectif est à présent pour ses promoteurs de faire en sorte que les 27 membres de l’Union décident au Conseil européen des 21 et 22/06 que ce mini traité constitue bien une base de négociation. Mais tout cela ne fait guère l’affaire de ceux qui ne veulent pas d’un accord a minima.

     

    Fronde contre le mini traité

     

    Cette perspective, déjà refusée lors de la réunion à Madrid des « Amis de la Constitution » l’a été à nouveau devant le Parlement européen qui poursuit ses rencontres avec des dirigeants européens pour soutenir la relance du processus constitutionnel à laquelle il n’a jamais renoncé. Le 21/05 le Président de l’Assemblée, Hans-Gert Pöttering,  a rappelé à l’issue de la rencontre qu’il venait d’avoir avec Nicolas Sarkozy que :  " Le Parlement européen est résolu à mettre en œuvre la  première partie du traité constitutionnel, c'est la partie qui concerne les réformes. Nous souhaitons également que tout ce qui concerne les valeurs et qui fait partie de la deuxième partie se traduise en droit européen, et c'est de cela qu'il  nous faudra parler au cours des prochaines semaines ". Devant les eurodéputés le premier ministre italien, Romano Prodi a été encore plus clair, préférant une Europe à deux vitesses à un traité au rabais. Une avant garde de pays parmi ceux qui ont voté oui pourrait aller de l’avant en constituant un cercle d’intégration plus poussée.

     

     

    Le mini traité se heurte également à l’opposition de la Confédération Européenne des Syndicats. Réunie en Congrès  à Séville du 21 au 24 mai, celle-ci a fait connaître dans un communiqué « le plan d’action des syndicats européens pour soutenir la Charte européenne des droits fondamentaux », plan qui a reçu le soutien  des délégués syndicaux de 36 pays européens. Le Conseil européen des 21 et 22 /06/2007 devrait donc se réunir sous la surveillance étroite des syndicats qui appellent à manifester à cette occasion pour que la Charte des droits fondamentaux soit incluse en tant que partie juridiquement contraignante dans le traité. Le Secrétaire général de la CES John Monks a prévenu : «Nous demandons à ce que la Charte soit incluse – pas de si, pas de mais, mais la pleine inclusion pour une Charte juridiquement contraignante. Et nous proposons d’aller à l’offensive pour assurer cela». Il s’agit, a dit la CES, d’un « premier pas vers une campagne d’action en cours, avec d’autres actions qui seront bientôt annoncées ».

     

    La réforme purement  institutionnelle prévue dans le mini traité ne convainc donc peut-être pas aussi largement que pourraient le faire croire les propos émollients de M.Barroso sur le consensus en cours.

     

    Domaguil

  • Parlons Europe avec la France suite et fin

    (Suite des billets des 26 et 27/03)

     

    F (elle prend un ton solennel)- Je suis la patrie des pères fondateurs de l’Union : Jean Monnet, Robert Schumann. J’ai donné de grands européens qui ont beaucoup apporté à la construction communautaire : Jacques Delors, François Mitterrand, Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal…

    I- Euh, pour les deux derniers, vous êtes sûre ?

    F- Non, à vrai dire, j’ai un doute. Donc, je disais…qui encore. Ah oui : Charles de Gaulle, Valery Giscard d’Estaing, les mousquetaires…

    I- D’Artagnan et les autres ?

    F- Non. Intermarché. Ils sont partout en Espagne, vous avez vu. C’est formidable.

    I (un peu accablé)- Si vous voulez. Et quel autre apport de la France à l’Union européenne ?

    F- Ben, on paye

    I-Oui, mais ça c’est normal. Tous les états contribuent au budget de l’Union. Les plus riches un peu plus que les autres : c’est la solidarité européenne.

    I-Mais on paye beaucoup pour des pays qui ne s’intéressent à l’Europe que pour les subventions, des assistés : la Pologne,  l’Espagne, le Portugal, la Lit….hum…bref…on est contributeurs nets en somme.

    I-Après avoir largement bénéficié des aides européennes pendant des décennies ! Il est assez normal que vous fassiez à votre tour les efforts que l’on a fait pour vous à travers la PAC.

    En 2005, la différence entre votre contribution  au budget et les dépenses dont vous bénéficiez donne un solde négatif de 2883 millions d’euros. Ce qui, rapporté au revenu national brut représente 0,17% et qui comparé avec les 288,5 milliards d’euros de dépenses de votre budget permet de relativiser l’idée de contribution nette au budget de l’Union !

    F-Jeune homme je n’aime pas beaucoup ce ton de donneur de leçons. Je vous rappelle que vous parlez …

    I-à un membre fondateur de l’Union européenne, je sais, oui. 

    F-Hein ?

    I-Rien rien. Et vos projets pour l’Union ?

    F-J’en ai plein les cartons ! La France est un laboratoire d’idées ! D’abord, je veux la solidarité européenne et que le Royaume-Uni arrête de nous bassiner avec sa contribution et son juste retour

    I-Pourtant le Royaume-Uni a accepté de revoir sa contribution à la hausse en renonçant à une part de son rabais. Vous n’avez pas fait le même effort sur la PAC et vous avez refusé d’augmenter le budget de l’Union . Du coup, ce sont les pays les plus pauvres qui ont du faire un geste …

    F-Ecoutez, vous, chacun sa spécialité. La mienne c’est de donner des leçons aux autres, pas de les appliquer. Je continue sur mes propositions. Je veux l’Europe politique, une politique extérieure commune, la lutte contre le dumping social et fiscal ce qui implique d’harmoniser nos législations .

    I-Donc, l’abandon de la règle du vote à l’unanimité sur ces questions ?

    F-Ca ne va pas, non ? Je ne vais tout de même pas renoncer à mon droit de veto pour que les autres en profitent pour m’imposer une harmonisation par le bas et détruire ce modèle social que le monde nous envie.

    I (abattu)- Encore des idées ?

    F- Oui. je veux la coopération intergouvernementale qui respecte pleinement la souveraineté des nations.

    I-Comme l’ONU ? Mais ce n’est pas le système communautaire, cela. La coopération intergouvernementale c’est le risque de  paralysie décisionnelle puisqu’on décide à l’unanimité.

    F-Vous êtes pénible. Laissez moi finir de vous expliquer. Je veux la coopération intergouvernementale dans un cadre intégré et supranational.

     I-(de plus en plus abattu)- Mais c’est du charabia. Cela n’a aucun sens. On ne peut pas avoir à la fois l’intergouvernemental et la supranationalité : c’est antinomique. Ou alors dans des domaines différents. Mais cela existe déjà : c’est la construction en piliers de l’Union européenne.

    F-Non, dans le même domaine.

    I (consterné)- C’est impossible !

    F- Jeune homme, impossible n’est pas français.

     

    Domaguil

     

     

     

    -Chiffres du budget Europe

     

    -Dette de l'Etat 

     

    -Budget français

     
  • Parlons Europe avec la France, suite

    (Suite du billet du 26/03)

     

     

    I- Donc, vous n’approuvez pas l’élargissement .

    F- Il faut comprendre. Il n’y a pas assez de gâteau pour tout le monde. Toutes ces bouches à nourrir, ça coûte cher.

    I-15 euros par habitant et par an de 2004 à 2006. 75 euros par habitant et par an  entre 2007 et 2013.

    F- Ouh que c’est cher !

    I –Ce n’est pas si cher payer  pour  s’assurer de la stabilité des pays aux frontières de l’Union et  s’ouvrir de nouveaux marchés. Cela dit, si vous voulez, on peut comparer à une dépense qui, elle, ne rapporte strictement rien et se fait à fonds perdus : les intérêts de votre dette publique : 666 euros par an et par habitant en 2005.

    F (fâchée)- Je ne vois pas le rapport.

    I-A mon avis, les contribuables le voient, eux.

    F- Bon et si on revenait à l’Europe.

    I- Si on vous demande ce que l’Union européenne fait pour vous, qu’est ce que vous répondez ?

    F- Entre nous (elle baisse la voix), je ne voudrais pas favoriser un sentiment eurosceptique, mais l’Union ne m’a rien apporté.

    I- Et la Politique Agricole Commune ? Et les aides des fonds structurels qui ont financé le développement de vos régions, les entreprises, les ponts, les routes financées par le FEDER ?

    F- Ah non, là vous confondez ! C’est en Espagne, ça. Je l’ai vu . Il y a des panneaux partout sur les routes qui indiquent que c’est le machin là…

    I- Le FEDER ?

    F- Oui, le bidule qui a financé.

    I- C’est parce que l’Espagne a mis les panneaux pour informer le public de l’aide de l’Europe. Vous, vous avez pris les subventions et vous avez fait croire que c’est vous qui aviez tout payé.

    F- J’ai fait ça moi ? Remarquez, ce n’est pas impossible. J’ai trouvé une astuce assez pratique : quand tout va bien, je dis que c’est grâce à moi. Quand il y a un problème, je dis que c’est la faute de l’Europe. Et ça marche.

    I- Pas très fair play ni très pro européen comme procédé.

    F- Jeune homme, je ne vous permets pas ce persiflage. Je vous rappelle que vous parlez à un membre fondateur de l’Union .

    I- Dans ce cas, vous devriez pouvoir me répondre : qu’a fait de plus l’Union européenne pour vous ?

    F (vexée) – Puisque vous êtes si malin, dites-le vous-même !

    I-Voyons , eh bien, par exemple, pour parler des seules implications sur la vie quotidienne des gens :  possibilité de voyager partout dans l’Union, d’étudier et  de s’installer à égalité de droits avec les nationaux, maintien et totalisation des droits à la sécurité sociale même si on a cotisé dans différents pays, indemnisation du surbooking,  développement des compagnies aériennes  low coast, normes de qualité de l’eau (par exemple  taux de nitrates, de plomb),  et de l’air (par ex. limitation des émissions de CO2), protection de la santé et de la sécurité au travail (comme la protection contre l’amiante, les agents chimiques, le bruit), réglementation des substances chimiques, aides à la formation, échanges d’étudiants , reconnaissance  de diplômes et des qualifications professionnelles, aides au reclassement des chômeurs, aides aux PME, lutte contre les discriminations, égalité entre les hommes et les femmes par exemple dans l’accès à l’emploi , soutien aux énergies renouvelables (20% en 2020), préservation de la biodiversité (natura 2000), protection des consommateurs (crédit à la consommation, clauses abusives dans les contrats, multi propriété ou trime share, vente à distance,…) , soutien au cinéma européen , éco label, comité d’entreprise européen, protection des droits des travailleurs en cas de transfert d’entreprises, lutte contre les monopoles, etc, etc…

    F (impressionnée) – Ah quand même….Je n’aurais pas cru, vous voyez. Mais moi de mon côté j’ai beaucoup fait pour l’Union européenne.

    I- Quoi par exemple ?

     

     (à suivre) 

     

    Domaguil