Etre ou ne pas être une Constitution européenne…dans un certain discours noniste
Qui martelait en 2005 que le traité constitutionnel était bien une Constitution, gravée dans le marbre, et que tous ceux qui prétendaient le contraire mentaient ? Notamment, trois commentateurs nommés Jean-Pierre Gaillet, Robert Joumard, Rémi Thouly qui avaient rédigé un des « argumentaires » de campagne d’Attac intitulé « Dix mensonges et cinq boniments » et sous titré (tremblez bonnes gens) : « Les partisans du oui à la constitution européenne mentent délibérément ou travestissent la vérité. Ils trahissent l’Europe et les Européens ».
Ces redresseurs de torts intrépides dénonçaient la félonie des partisans du oui accusés de mentir sans vergogne lorsqu’ils affirmaient que le traité n’était pas une Constitution et qu’il n’était juridiquement qu’un traité international signé entre les Etats souverains (mensonge n°1 dans leur « argumentaire »).
Comme telle était la thèse que je m‘évertuais à défendre- bien vainement je dois dire, face à certains obstinés -, je me sentais fort déconfite d’être ainsi mise au ban de la bonne société démocrate et progressiste.
Me voilà rassurée, j’y serai en compagnie de l’auguste Bernard Cassen, Directeur du monde diplomatique, Président d’honneur d’Attac-France, pourfendeur de l’Europe ultra libérale et opposant farouche et talentueux au traité constitutionnel européen contre lequel il mena campagne. Dans une interview récente, il nous confirme que : « le précédent traité n’était pas une constitution. C’était un traité exactement comme les autres, avec le même statut. On l’avait baptisé « constitution » au dernier moment, mais ceux qui l’ont élaboré, la Convention, n’ont jamais considéré que c’était une constitution. ..Il n’y a aucune modification de statut » (extrait d’une interview du 25/10/207, « Bernard Cassen : il faut un referendum »).
Voilà donc Bernard Cassen qui rejoint le club des Pinocchio fustigés par Attac. Bienvenue à lui :-)
Mais pourquoi Bernard Cassen met-il tant d’insistance à prendre le contrepied de ce qui a été un des arguments majeurs de la campagne du non et dont il essaie à présent de minorer l’importance ? La réponse ne manque pas de saveur. C’est que M.Cassen s’est avisé de l’habileté avec laquelle Nicolas Sarkozy a retourné à son avantage l’argument de la nature du texte en nous expliquant que, puisque le nouveau traité n’est pas une constitution mais un traité comme les précédents, il n’a rien à voir avec le texte rejeté par les français, et il est inutile de le faire ratifier par referendum. C’est pourquoi M.Cassen dénonce «un argument rhétorique utilisé par Sarkozy pour justifier le non-recours au référendum», ce qui est tout de même « culotté » quand on se souvient que les nonistes de tous bords (alter comme souverainistes) n’ont pas manifesté tant de réticences à utiliser et instrumentaliser un tel « argument réthorique » lorsque cela leur a convenu . C’est la fable de l’arroseur arrosé : les nonistes voient se refermer sur eux le piège qu’ils avaient tendu à leurs contradicteurs . Leur argument mensonger s’est retourné contre eux et leur revient comme un boomerang…