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quoi de neuf en Europe - Page 62

  • Microsoft bute sur le droit communautaire de la concurrence

    Très attendu, l’arrêt du Tribunal de Première Instance des Communautés européennes dans le litige qui oppose Microsoft à la Commission européenne, vient d’être publié ce matin. On se souvient que la Commission avait sanctionné Microsoft pour abus de position dominante. La société avait formé un recours en annulation de cette décision devant le Tribunal de Première Instance (TPI) des Communautés Européennes. Celui-ci vient de confirmer l'analyse de la Commission : Microsoft a bien violé le droit communautaire de la concurrence et l'amende infligée (497 millions d'euros) est justifiée.

     

     Bien qu'un pourvoi, limité aux questions de droit, puisse être formé contre la décision du TPI dans les deux mois à compter de sa notification, Microsoft a bel et bien perdu son bras de fer avec la Commission européenne. Pour celle-ci, l’arrêt du tribunal est incontestablement une victoire juridique et politique au terme d’un « feuilleton » de plusieurs années.

     

    Ceux d'entre vous que cette affaire intéresse peuvent trouver plus de précisions dans le dossier qui lui est consacré sur le site eurogersinfo  (articles, commentaire de l'arrêt et texte intégral de celui-ci)

    Domaguil

  • Le système européen de préférences généralisées : commerce mondial et développement (I)

    Dans un forum, un internaute mettait en cause l’ultralibéralisme de l’Europe communautaire. A un de ses contradicteurs il demandait pourquoi, si l’Europe n’était pas ultralibérale, comme le lui soutenait ce contradicteur, elle ne prenait pas des mesures « simples » comme de taxer ou de boycotter les échanges commerciaux avec les pays qui pratiquent l’esclavage et bafouent les droits de l’homme et l’environnement.

     

     

    Je n’étais pas forcément invitée au débat ( !), mais j’y ai tout de même glissé mon grain de sel en remarquant  que ces mesures « simples » seraient sans doute contraires aux règles de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et que le fait de violer ces règles provoquerait des mesures de rétorsion de la part des autres pays, d’où, baisse de nos exportations, chômage et délocalisations. Ce qui ne voulait pas dire que l’on ne pouvait rien faire pour tenter d’amender ce « monde de brutes ». Par exemple, le système des préférences généralisées plus permet d’encourager les productions des pays qui s’engagent à respecter  l’état de droit, notamment les règles des conventions de l’OIT.

     

     

    Donc, aujourd'hui, retour sur le SPG, un système qui gagne à être connu.

     

     

    Soutenir les pays en développement dans leur lutte contre la pauvreté en les aidant à obtenir des revenus par le  biais du commerce international : tel est l’objectif du système des préférences généralisées (SPG). Dans ce système, les pays développés appliquent des droits de douane plus bas aux produits en provenance des pays plus pauvres. Il s’agit donc, pour contribuer au développement de ceux-ci,  d’une exception à un  principe cardinal l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) , la clause de la nation la plus favorisée aux termes de laquelle un avantage accordé à un pays membre de l’organisation doit être accordé à tous les autres. Comme tous les pays développés les pays de l’Union européenne accordent des SPG aux pays en développement. La politique commerciale étant une politique commune ces SPG sont négociés et définis dans le cadre de l’Union européenne.

     

     

    Le SPG européen pour 2006-2008

     

     

    Le SPG européen est l’instrument le plus ouvert de sa catégorie dans les pays développés. En 2003, les importations européennes dans le cadre du SPG  se sont élevées à 52 milliards d’euros : sur la période 1999-2003, la part représentée par les pays en développement dans ces importations a grimpé de 33% à 40%, ce qui conduit la Commission à  qualifier le SPG européen de « système le plus ouvert dans les pays développés ».

     

     

    Le système actuel résulte d’un règlement du 27/06/2005 (Règlement n° 980/2005, du 27 juin 2005, portant application d'un schéma de préférences tarifaires  généralisées) qui s’applique sur la période 2006-2008.

     

     

    Il donne une liste des pays en bénéficiant et des produits auxquels sont appliqués les droits réduits après avoir distingué produits « sensibles » et produits non sensibles (la sensibilité est en déterminée par rapport aux produits communautaires similaires et à l'impact que leurs importations dans la Communauté peuvent avoir sur des produits communautaires).

     

     

    Trois régimes sont appliqués, le régime général, le régime spécial d'encouragement en faveur du développement  durable et de la bonne gouvernance, pour les pays vulnérables, le régime spécial en faveur des pays les moins avancés.

    • En régime général, les droits du tarif douanier commun  applicables aux produits sont suspendus pour les produits non sensibles (sauf pour les composants agricoles). Pour les produits sensibles, les droits sont réduits dans des propositions différentes selon les produits (le textile par exemple étant davantage taxé), les produits agricoles faisant l’objet des dispositions particulières (mécanisme de surveillance spécial pour éviter toute perturbation sur le marché communautaire, application de clauses de sauvegarde).
    • Dans le cadre du régime spécial d'encouragement en faveur du développement durable et de la bonne gouvernance, le principe est la suspension des droits pour les produits énumérés dans l’annexe du règlement (7200 produits sont concernés). Les pays bénéficiaires sont des pays vulnérables en raison d'un manque de diversification et d'une intégration insuffisante dans le système commercial international : la Bolivie, la Colombie, le Costa  Rica, l'Équateur, la Géorgie, le Guatemala, le Honduras, le Sri Lanka, la République de Moldavie, la Mongolie, le Nicaragua, le Panama, le Pérou, le Salvador et le Venezuela. En contre partie du système préférentiel dont ils font l’objet, ils doivent ratifier et appliquer un certain nombre de conventions internationales dont les principales conventions de l'ONU/OIT .
    • Enfin, le régime spécial en faveur des pays les moins avancés (ex : Afghanistan, Angola, Bangladesh, Bénin, République centrafricaine, Cap-vert, Djibouti, Ethiopie, Madagascar, Libéra, Rwanda, Soudan …). Les droits du tarif douanier commun sont totalement suspendus pour tous les produits, à l'exception des armes et des munitions.

     

     

    Un retrait temporaire du régime préférentiel est prévu en cas de violation par le pays bénéficiaire de ses obligations (par ex : violation grave et systématique des conventions internationales ; pratiques commerciales déloyales graves et systématiques…). De même est retiré du SPG  tout pays bénéficiaire classé comme pays à hauts revenus par  la Banque mondiale, ou lié à la Communauté européenne  par un accord commercial préférentiel.

     

     

    Une clause de sauvegarde consistant dans le rétablissement des droits du tarif douanier commun peut également être mise en œuvre notamment si l'importation d'un produit d'un pays originaire entraîne des difficultés graves ou crée une concurrence directe avec les produits similaires des producteurs  communautaires. Enfin, pour les produits des pays bénéficiaires du régime général et du régime spécial d'encouragement en faveur du développement durable et de la bonne gouvernance, les préférences peuvent être supprimées si le volume des importations communautaires du produit concerné en provenance du pays bénéficiaire atteint 15 % du volume total des importations communautaires de ce même produit en provenance des pays bénéficiaires de l'un de ces deux régimes. Ce mécanisme de « graduation » a pour but qu’un pays ne se taille la part du lion. Par exemple, un pays comme la Chine qui fournissait 30 % des importations européennes de textile sous SPG, ne serait plus éligible au système.

     

     

    Une des innovations marquantes du système a été l’introduction d’incitations supplémentaires pour favoriser le « travail décent » dans les pays les moins développés, ce qui est également une manière de lutter contre le dumping social.

     

    Domaguil    

     

  • Le Tribunal de Première Instance des Communautés européenne met le paraquat hors la loi européenne

    Le 27 février 2004, la Suède avait déposé un recours en annulation de la décision de la Commission européenne d’autoriser un herbicide, le paraquat, au sein de  l’Union européenne. L’Autriche, le Danemark et la Finlande s’étaient joints à ce recours.

     

     

    La  directive 91/414/CEE du Conseil, du 15 juillet 1991, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, donne la liste des substances autorisées dans l’Union européenne dans une annexe. La décision d’inscrire un produit dans l’annexe est prise par la Commission européenne selon la procédure du « comité de réglementation » c’est-à-dire après consultation des représentants des états réunis dans un comité. La Commission peut seulement prendre la décision si elle obtient l'avis positif de la majorité qualifiée des états, faute de quoi,  la mesure proposée est alors renvoyée devant le Conseil, qui décide à la majorité qualifiée. Ce n’est que si le Conseil ne parvient pas à prendre une décision ou à s’opposer au projet de la Commission par un vote de refus à la majorité qualifiée que la Commission peut prendre la décision projetée.

     

     

    Dans le cas du paraquat, les états opposés à son inscription dans la liste des substances autorisées n’avaient pu réunir la majorité requise pour faire échec à cette décision. La Commission avait donc adopté la directive 2003/112 , modifiant la directive 91/414 pour y inscrire la substance paraquat. Il restait aux états opposants la possibilité de contester la décision au fond, c’est-à-dire de mettre en cause la régularité de la directive 2003/112 au regard des exigences posées par le droit communautaire (traités et directive) en matière de protection de la santé et de respect de l’environnement.

    Les traités disposent que les exigences de la protection de l’environnement et de la santé humaine doivent être intégrées dans la définition et la mise en œuvre des politiques de la Communauté (voir notamment les articles 6, 152 et 174 du traité instituant la Communauté Européenne).  La directive 91/414 énonce, quant à elle, que les procédures d’autorisation des produits phytosanitaires doivent assurer « un niveau élevé de protection » qui doit « notamment éviter l’autorisation de produits phytopharmaceutiques dont les risques pour la santé, les eaux souterraines et l’environnement n’ont pas fait l’objet de recherches appropriées ». Le texte précise de plus que l’objectif d’améliorer la production végétale ne doit pas porter préjudice à la protection de la santé humaine et de l’environnement (9ème considérant).

    Le recours de la Suède était donc fondé pour l’essentiel sur ces dispositions de fond. Il faisait également  grief à la Commission de ne pas avoir tenu compte d’importantes données scientifiques, faisant fi des règles de procédures d’évaluation, et ceci, circonstance aggravante en quelque sorte, s’agissant d’une substance très controversée.

    Le paraquat est en effet fortement soupçonné d’avoir des effets très nocifs et dangereux sur la santé de ses utilisateurs. Il s’agit d’une substance active qui entre dans la composition de l’un des trois désherbant les plus utilisés au monde. Commercialisé sous la forme d’herbicide depuis une soixantaine d’années, il a un large spectre d’action et est utilisé sur plus de 50 variétés de cultures dans plus de 120 pays. Treize pays l’ont interdit cependant au nombre desquels, pour l’Union européenne  la Suède, le Danemark, l’Autriche et la Finlande, c’est-à-dire les requérants. Ces pays mettent en avant la toxicité aigüe du paraquat en se fondant sur les conclusions d’études scientifiques et de terrain. Un lien entre l’exposition à cette substance et  la maladie de Parkinson est également évoqué, sans que toutefois ce lien ait pu être démontré avec certitude.

    Dans son arrêt du 11/07/2007, le Tribunal donne satisfaction aux requérants en annulant  la directive 2003/112.

    Sur le moyen tiré d’une méconnaissance des règles procédurales, le Tribunal constate que celles-ci ont bien été violées, la Commission européenne n’ayant pas par exemple étayé son affirmation concluant en l’absence d’effet neurotoxiques du paraquat. Une telle violation des exigences procédurales entache dès lors la directive d’irrégularité sans qu’il soit nécessaire pour parvenir à cette conclusion d’examiner en outre si la Commission avait délibérément ignoré les études qui concluaient à la neurotoxicité du paraquat, alors qu’elle aurait du en faire une évaluation (considérant 110).

    Sur le moyen concernant  la protection de la santé humaine, le Tribunal constate, là encore,  que les exigences posées par le droit communautaire n’ont pas été respectées, au terme d'une interprétation des règles de la directive notamment à la lumière du principe de précaution (considérant 170).  Le tribunal rappelle tout d’abord que « L’article 5, paragraphe 1, de la directive 91/414 prévoit que, pour qu’une substance puisse être inscrite à l’annexe I de cette même directive, il doit être permis d’escompter, compte tenu de l’état des connaissances scientifiques et techniques, que l’utilisation des produits phytopharmaceutiques contenant la substance active en cause, consécutive à une application conforme aux bonnes pratiques phytosanitaires, n’a pas d’effet nocif sur la santé humaine » (considérant 160). Il poursuit : « Cette disposition, interprétée en liaison avec le principe de précaution, implique que, s’agissant de la santé humaine, l’existence d’indices sérieux qui, sans écarter l’incertitude scientifique, permettent raisonnablement de douter de l’innocuité d’une substance, s’oppose, en principe, à l’inscription de cette substance à l’annexe I de la directive 91/414. En effet, le principe de précaution tend à prévenir les risques potentiels. En revanche, des risques purement hypothétiques, reposant sur des hypothèses scientifiques non étayées, ne sauraient être retenus (arrêt du Tribunal du 21 octobre 2003, Solvay Pharmaceuticals/Conseil, T‑392/02, Rec. p. II‑4555, point 129) » (considérant 161). Or les études invoquées par les requérants à l’appui de leur recours permettent « raisonnablement de douter de l’innocuité » du paraquat. En particulier, une étude effectuée en 1996 au Guatemala sur 20 personnes ayant utilisé le paraquat dans les conditions de sécurité requises (avec un équipement de protection) montrait que l’une d’elles avait pourtant subi un niveau d’exposition (niveau acceptable d’exposition de l’opérateur ou NAEO) équivalant à 118 % du niveau acceptable défini  pour cette substance. L’utilisation du paraquat, même avec toutes les précautions prescrites, est donc incompatible avec les exigences communautaires qui interdisent tout dépassement du NAEO et la directive 2003-112 qui l’autorise enfreint bien l’exigence de protection de la santé humaine.

    Pour la Déclaration de Berne, une association suisse qui mène depuis plusieurs années un combat pour l’interdiction totale du paraquat, cet arrêt « marque la fin programmée du paraquat de Syngenta dans le monde ».

    L’entreprise Syngenta qui produit l’herbicide ne s’est guère montrée très prolixe , indiquant simplement à l’agence de presse Reuters qu’elle étudiait les conséquences de cet arrêt et qu'elle n'avait pas l'intention de retirre le paraquat du marché mondial. On apprend cependant sur le site qu’elle consacre au paraquat qu’il n’y pas selon elle, « d’alternative efficace » à cette substance dont elle conteste la nocivité, le site se livrant au contraire à une vibrante défense des vertus du paraquat qui « a permis d’adopter certaines cultures de base viables dans les pays en voie de développement, générant ainsi des avantages sociaux et économiques tout en protégeant la terre pour les générations futures ».

     

    Dans l’Union européenne tout eu moins l’avenir du paraquat est compromis. Pour sa part le Ministre français de l’agriculture et de la pêche a tiré les conséquences de l’arrêt du TPI en annonçant dans un communiqué du 20-07-2007, le retrait de l’autorisation de mise sur le marché.  Le communiqué précise « Compte tenu de l'exposé des motifs de la décision de la cour de justice européenne qui évoque la procédure d'évaluation du risque pour les opérateurs, il ne sera pas accordé de délai d'écoulement des stocks ni des délais à l'utilisation de ce produit » et incite « l'ensemble des distributeurs et le fabricant à mettre tout en œuvre pour assurer un retrait des stocks et la récupération des produits non encore utilisés par les agriculteurs ».

    Domaguil

  • Quand l Eglise est confrontée au droit communautaire de la concurrence

    Dans le prolongement de la note qui précède, il semblerait que le droit communautaire s’embarrassant peu de considérations spirituelles, l’Eglise catholique doive s’attendre à quelques tracasseries.

     

     

    Si l’on en croit un article du correspondant  du Figaro à Bruxelles en date du 29/08/2007, la Commission européenne aurait été saisie de plaintes mettant en cause les privilèges fiscaux dont bénéficierait l’Eglise italienne alors que celle-ci s’adonnerait à des activités commerciales pour lesquelles elle devrait être soumise à l’ imposition  de droit commun (Pierre Avril : « Les privilèges de l'Église dans le collimateur de Bruxelles », le Figaro en ligne, 29 août 2007).

     

     

    Une enquête est donc  lancée afin de déterminer si ces avantages peuvent être considérés comme des aides d’état contraires au droit communautaire de la concurrence.

     

     

    Une « demande d’explications » a également  été adressée aux autorités espagnoles. A l’origine, l’insistance de quelques eurodéputés à questionner la Commission européenne sur la compatibilité avec le droit communautaire d’exonérations d’impôts dont bénéficie l’Eglise en Espagne sur les  constructions immobilières ou les travaux de rénovation liés à des activités étrangères au culte et « purement commerciales » : construction d'écoles privées ou d'universités privées, travaux concernant des stations de radio privées ou des hôpitaux privés (question écrite E-0829/07 posée par Marco Cappato, et Willy Meyer : « Exonération illégale de l'impôt sur les constructions, installations ou travaux accordée à l'Église catholique »).

     

     

    Après avoir été sollicitée une nouvelle fois par les pugnaces parlementaires, la Commission européenne a répondu le 27/08/2007 ( E-3709/07ES, Respuesta de la Comisaria Kroes

    en nombre de la Comisión) en assurant qu’elle avait commencé “une analyse détaillée” de la question afin de déterminer si l’exemption fiscale peut être qualifiée d’aide d’état et, dans cette hypothèse,  si elle est bien compatible avec le marché intérieur ou si, au contraire, elle fausse le jeu de la concurrence.

     

     

    Si cela se confirme, la Commission ferait preuve d’une grande impartialité dans le maniement de son bâton de gendarme de la concurrence " libre et non faussée". Après avoir subi les foudres des défenseurs des monopoles publics, des grandes entreprises privées, de Schneider à Microsoft, des antimondialistes et antilibéraux, la voilà qui s’apprêterait à s’exposer à celles du Vatican.

     

     

    Ma conclusion sera qu'une institution qui arrive à se mettre tant de monde à dos et de tant de "paroisses" différentes ( je n'ai pas pu résister) ne peut pas être entièrement mauvaise.

     

    Domaguil