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taxe sur les transactions financières

  • Onze états de la zone euro vont taxer les transactions financières

     

    Dans un communiqué du 09/10/2012, le Conseil des ministres de l'économie et des finances de l'Union européenne (ECOFIN) annonce que la taxe sur les transactions financières va pouvoir s'appliquer sous forme de coopération renforcée.

    C'est en septembre 2011 que la Commission européenne avait présenté une proposition de directive de taxation des transactions financières.

    Soutenue par le Parlement européen qui réclame depuis longtempos cette taxe, la Commission avait joué sur la corde sensible (l'argument financier) pour tenter de convaincre les états en publiant, le 23/03/2012, des estimations sur les économies qu'elle leur permettrait de réaliser. Si les états suivaient sa proposition d'affecter deux tiers des recettes de la TTF au budget de l'Union en tant que ressources propres, leurs contributions RNB seraient réduites et ils conserveraient le tiers restant. Selon les estimations de la Commission, la réduction des contributions atteindrait 54 milliards d'euros en 2020 et les états pourraient récupérer 50% de leur contribution RNB au budget communautaire grâce à cette taxe. Pour la France, par exemple, l'économie serait de 8768 millions d'euros. Donc, argumentait la Commission, chaque euro perçu grâce à la TTF bénéficierait en fin de compte aux états membres, que ce soit au travers de la perception directe de recettes ou de la réduction des contributions versées au budget de l'Union.

    Mais, malgré ce plaidoyer, le dossier n'avançait pas et le Conseil ECOFIN de juin dernier avait du constater qu'il n'y avait pas de consensus sur la proposition de la Commission (or, il faudrait l'unanimité pour la voter s'agissant d'une matière fiscale).

    Pour contourner la difficulté, d'autres solutions étaient sur la table du Conseil. En particulier, celle de recourir à une coopération renforcée. Celle-ci est donc rendue possible par l'accord du 09/10/2012, comme le confirme le ministre français de l'économie et des finances, Pierre Moscovici lors de la séance des questions à l'Assemblée nationale du même jour.

    Onze pays (donc, deux de plus que le nombre requis), tous membres de la zone euro, ont déclaré se rallier à la coopération renforcée. L’Allemagne, la France, l’Autriche, le Portugal, la Belgique, la Slovénie et la Grèce ont été les premiers. Ils viennent d'être rejoints par l’Espagne, l’Estonie, l’Italie et la Slovaquie.

    C'est à présent à la Commission européenne de présenter la proposition de coopération renforcée qui devra être votée par le Conseil à la majorité qualifiée et être approuvée par le Parlement européen. La position de la Commission ne fait pas de doute (elle a le pouvoir de refuser de présenter une proposition ce qui bloquerait le processus,  mais elle ne le fera pas et devrait présenter cette proposition dès novembre). L'accord du Parlement européen semble également acquis.

    Les pays anti taxe (Grande-Bretagne, Pays-Bas, Luxembourg, Suède) pourraient faire obstacle, mais d'une part il n'est pas sûr qu'ils réunissent les voix nécessaires pour le faire, et, d'autre part, ils ne semblent pas tous décidés à faire barrage.

    Il reste encore des questions importantes à régler, comme, par exemple, celle de l'affectation du produit de la taxe: en bonne logique, elle devrait financer le budget européen, mais les pays ne sont d'accord sur ce point. Une autre question est l'assiette de la taxe: pour minimiser les risques de fuite des transactions vers des pays ne pratiquant pas la taxe, la Commission a proposé d'appliquer un "principe de résidence" selon lequel toute transaction impliquant au moins un opérateur établi dans l'UE sera soumise à la TTF. Dans une résolution du 23/05/2012, le Parlement européen a quant à lui demandé l'application d'un "principe du lieu d'émission", qui permettrait d'appliquer la taxe aux institutions financières situées en dehors de l'UE si elles ont négocié des titres émis à l'origine dans l'Union.

    Domaguil

     

  • Remue méninges à la Commission européenne



    Je l'ai déja évoqué sur ce blog: un des effets collatéraux  de la crise que traversent les pays de la zone euro est d'amener la Commission européenne à se livrer à de douloureuses (?) remises en cause. On la sait majoritairement acquise aux idées libérales (voire ultralibérales) et voila qu'elle défend depuis quelques temps déja, des positions étonnantes et prend des initiatives inhabituelles.

    La crise lui ferait-elle manger son chapeau?

    Quelques exemples de cette évolution:

    Service aux clients des banques: l'autorégulation ne marche pas, constate-t-elle. Tiens tiens...

    Une étude publiée le 24/02/2012 par la Commission européenne révèle que changer de compte bancaire est toujours difficile pour un client car il se heurte à des obstacles multiples. De sorte que les clients découragés restent "captifs" de leur banque. Et ceci malgré les engagements pris par les banques qui avaient juré "croix de bois de fer" qu'elles allaient s'autoréguler afin d'informer les clients sur leurs droits et de leur faciliter les démarches. Mais d'autorégulation, point (ce qui était assez prévisible). La Commission, du coup, n'exclut plus de prendre des mesures plus contraignantes, et remet en cause le dogme qui veut que l'autorégulation soit, de toute façons, préférable à la réglementation. 

    Commerce international: il faut que les pays tiers respectent l’équité et la réciprocité des échanges mondiaux. Tiens tiens...

    Dans un communiqué du 21-03-12, la Commission européenne propose d'en finir avec les obstacles que rencontrent les entreprises de l'UE  pour obtenir des marchés publics internationaux.  Alors que  l'UE ouvre largement l'accès à ses marchés publics aux entreprises des pays tiers, la réciproque n'est pas vraie et des restrictions sont appliquée par les pays tiers dans des secteurs dans lesquels précisément l’UE est très compétitive (construction, les transports publics, les appareils médicaux, la production d’électricité et les produits pharmaceutiques). Bref, l'heure n'est plus à la faiblesse (à la "naïveté", dit le commissaire au marché intérieur dans le communiqué) et la Commission propose de rétablir l'égalité avec les sociétés étrangères au sein du marché intérieur. Les mesures proposées par la Commission doivent permettre à l'Union européenne d'exercer, dans les négociations internationales et avec les autres pays, une plus grande pression afin que ceux-ci ouvrent leurs marchés publics aux entreprises européennes, y compris, si besoin, en restreignant l'accès des entreprises de pays tiers à la commande publique européenne. 

    Taxe sur les transactions financières: la Commission européenne s'est ralliée à l'idée de créer une taxe européenne sur les transactions financières dans une proposition de directive présentée le 28/09/2011. Tiens tiens...

    Elle explique qu'il faut «garantir que le secteur financier, qui a joué un rôle à l'origine de la crise financière, apporte une contribution équitable alors même que les États membres procèdent à l'assainissement des finances publiques. Ce sont les gouvernements et les Européens dans leur ensemble qui ont pris en charge les coûts élevés des renflouements du secteur financier sur fonds publics. Ce secteur est par ailleurs actuellement moins lourdement taxé que d'autres. La taxe proposée génèrerait de nouvelles recettes fiscales considérables prélevées sur le secteur financier pour contribuer aux finances publiques». On croirait lire un communiqué d'attac.

    Communication sur la reprise génératrice d'emplois: il faut un salaire minimum  européen. Tiens tiens... 

    La communication présentée le 18/04/2012 par la Commission affirme que la reprise économique passe, par exemple, par une réforme des marchés du travail et, dans ce cadre, il faut "garantir des rémunérations décentes et viables et éviter les pièges des bas salaires" (p.10). Et la Commission poursuit: " La fixation de salaires minimaux adaptés peut aider à prévenir une augmentation du nombre de travailleurs pauvres  et est importante pour garantir la qualité d’emplois décents". C'est clairement une pierre dans le jardin de l'Allemagne dont les salaires minima sont jugés trop bas.
    La Commission ne va pas cependant jusqu'à défendre un SMIC transectoriel  comme celui qui est appliqué en France mais estime que "les minimums salariaux doivent pouvoir être ajustés suffisamment, en concertation avec les partenaires sociaux, pour refléter l’évolution de la conjoncture économique générale". Des "salaires différenciés" (en fonction des secteurs, peut-on penser, quoique la Commission ne le précise pas) "peuvent" être un moyen. 

    La communication de la Commission n'a aucune valeur contraignante. Elle y expose seulement un point de vue et annonce d'éventuelles propositions législatives ou autres. Mais en ce qui concerne le salaire minimum, elle s'abstient d'annoncer de telles mesures, car l'Union européenne n'a pas de compétence en la matière.

    A supposer que les états, seuls compétents, se mettent d'accord (il faudrait un vote à l'unanimité) pour décider la création d'un salaire minimum européen, cela ne se ferait que par la voie du rapprochement des législations et non de l'harmonisation. En d'autres termes, les pays se mettraient d'accord sur des règles communes minimales que tous devraient appliquer. Ce qui n'empêcherait pas chaque état ensuite, d'appliquer des règles plus protectrices des salariés s'il le souhaitait. En aucun cas, donc, la France ne peut être contrainte de renoncer au SMIC tel qu'il s'applique chez nous. La Commission ne peut pas l'y obliger, pas plus que les autres états. Seuls le gouvernement et le parlement français sont compétents pour décider de revenir sur cet acquis social et ce n'est pas à l'ordre du jour. L'idée d'un salaire minimum européen exposée par la Commission ne menace donc pas le SMIC français. En revanche, et c'est pourquoi c'est un progrès, elle alimente un débat nécessaire pour combattre le dumping social intra communautaire.

    Mais...comme en France la campagne électorale bat son plein et que certains n'hésitent pas à instrumentaliser l'Union européenne pour gagner des voix en mentant au besoin, l'idée de créer un salaire minimum dans tous les pays membres est devenue, grâce à un étrange tour de passe-passe, une ruse machiavélique de la diabolique Commission acharnée à notre perte.   
    Donc, M Le Pen est montée sur ses grands chevaux en accusant la Commission de vouloir l'explosion du salaire minimum unique français, et a dénoncé des mesures ultralibérales, selon la rengaine à présent bien rodée. Et JL Mélenchon, contrarié de voir que son bouc émissaire de prédilection rend ineptes ses invectives, a accusé la Commission de "prendre un masque d’agneau pour faire le loup"  et surenchéri dans le commentaire lapidaire en dénonçant sa proposition: "Sous prétexte de suggérer des Smic 'pas trop bas', elle imagine de créer des Smic à géométrie variable suivant les branches d'activité. Autant dire +plus de Smic du tout+ et une législation sociale éclatée organisant la concurrence entre eux de tous les travailleurs" (Un SMIC européen par branche d’activité = plus de SMIC du tout ! Communiqué du 16/04/2012). 
    Ben voyons! Dans la course des démagogues, JL Mélenchon et M Le Pen sont décidément partis avec une longueur d'avance.

    Pour sa part, la Confédération européenne des syndicats ne s'y est pas trompée (il est vrai qu'elle n'a pas de raisons de raconter n'importe quoi, contrairement à nos peu scrupuleux prétendants au trône). Si elle dénonce justement d'autres points plus criticables de la communication de la Commission (la flexicurité combinée à des politiques d'austérité), elle juge, par contre, que l'augmentation des salaires minima est une des propositions positives qu'elle contient.  

    Domaguil