La grippe aviaire frappant à présent au coeur de l’Union européenne, les autorités communautaires ont pris de nouvelles mesures conformément aux règles en vigueur (directive 2005/94 établissant des mesures de lutte communautaire contre l’influenza aviaire) dont celle, controversée, de la vaccination.
Elle est autorisée aux termes de la directive 2005/94 qui a étendu la possibilité de recourir à la vaccination à titre de prévention (jusqu’alors, la vaccination n’était autorisée qu’en cas d’urgence).
Le 21/02/2006, la France et les Pays-Bas ont présenté à leurs partenaires européens des plans de vaccination ciblée de certaines volailles afin de prévenir la contamination par le virus H5N1. La vaccination est facultative et peut être choisie comme alternative aux mesures de confinement. Le plan néerlandais prévoit la vaccination des volailles détenues par des particuliers ou élevées en plein air et porte sur l’ensemble du pays. Le plan français consiste en une vaccination des canards et oies dans les départements des Landes, Loire-Atlantique et Vendée, considérés comme zones à haut risque de contamination par la grippe aviaire. La campagne de vaccination devrait commencer immédiatement et se poursuivre jusqu’à début avril. Des animaux sentinelles (une volaille non vaccinée par groupe) permettront de s’assurer que le virus n’est pas présent dans l’élevage ayant été vacciné et qui fera l’objet de tests réguliers. Si l’animal sentinelle tombe malade, c'est que le virus est présent en provenance de l'extérieur.
Une des principales critiques à la vaccination est en effet qu’elle ne protège pas à 100% contre la grippe aviaire, et ne permet pas de suivre les progrès éventuels du virus et d’en éviter la propagation car on craint que des oiseaux vaccinés contractent le virus sans développer la maladie et puissent le transmettre à ceux qui n’ont pas été vaccinés (il y a débat sur la réalité de ce risque).
C’est pourquoi l’opportunité de vacciner a été l’objet de discussions, certains états mettant en cause la pertinence de ces mesures qui sont prises pour la première fois et sur lesquelles manque donc le recul pour en apprécier les conséquences, avantages et inconvénients.
Malgré ces réticences, le 22/02, la France et les Pays-Bas ont obtenu l’autorisation de procéder à la campagne de vaccination sous les conditions préalablement proposées par les autorités des ces deux pays et celles ajoutées par la Commission européenne. Cette dernière a indiqué que les volailles vivantes vaccinées, leurs œufs et poussins d’un jour ne pourront être exportées vers un autre pays de l’Union européenne ou vers un pays tiers, ni circuler hors de France. En France même, les volailles vaccinées ne pourront être transportées que vers des élevages eux-mêmes vaccinés, vers des lieux où est garantie une complète séparation entre volailles vaccinées et volailles non vaccinées ou vers des abattoirs pour abattage immédiat. La viande et autres produits dérivés des volailles vaccinées pourront être commercialisées dans l’Union européenne et vers les pays tiers à condition qu’elles soit garanties en provenance de structures ayant respecté les contrôles énoncés plus haut que l’élevage d’origine ait été inspecté par un vétérinaire 48 heures avant l’abattage, certifiant sa conformité aux règles de santé animale. La Commission a également exigé que le conditionnement aussi bien que les moyens de transport soient désinfectés.
Le financement de ces mesures sera national, l’Union européenne ne donnant des aides (jusqu’à 100% des coûts) que dans les cas de campagnes de vaccination motivées par l’urgence et non par un souci de prévention.
Le plan de vaccination a été accueilli avec circonspection par les éleveurs des départements français concernés qui craignent que la vaccination ne détourne encore plus les consommateurs de la viande de volailles alors que les ventes sont déjà en baisse. Dans les départements de la Loire atlantique et de la Vendée ces craintes ont finalement conduit de nombreux éleveurs à privilégier des solutions de confinement (voir Nouvel Observateur en ligne :
« Des élevages contre la vaccination », 24/02/2006)
Le recours à la vaccination a été également critiqué par les représentants de l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE) qui estiment que ce n'était pas une priorité en France et dans l'Union européenne en général, dans la mesure où la réglementation vétérinaire et les services vétérinaires y sont « bien développés » et où la vaccination devrait être utilisée lorsque la maladie est devenue endémique et que les mesures classiques de contrôle (abattages sanitaires, contrôles des mouvements de volailles...) sont restés vaines. Une opinion rappelée par le directeur général de l'Organisation mondiale de la santé animale (OIE), M.Vallat qui dans un entretien avec le journal le Monde, affirmait que désormais l’épizootie s’est généralisée : "Nous assistons à une évolution rapide de la situation caractérisée par la transformation progressive d'une épizootie en panzootie…A l'exception de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande, qui ne semblent pas concernées par les migrations d'oiseaux aquatiques en provenance
de zones infectées, le reste du monde est directement exposé. L'épizootie de grippe aviaire peut diffuser désormais à l'échelon mondial." (interview au journal Le Monde, en ligne le 24/2/2006).
Pendant ce temps, les ministres de l’Union européenne réunis à Vienne le 24/02/2006 afin de faire le point de la situation et de coordonner leur action, s’efforçaient de rassurer l’opinion en dégustant du poulet en guise de déjeuner...La communication c'est aussi important!