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droit du travail

  • Quand le droit du travail menace les colonies de vacances

     

    On peut être un farouche adversaire de « l‘hydre néo libérale européenne » et savoir quand il le faut tirer avantage de ses règles. Ainsi le syndicat SUD qui n’est jamais à une exagération près quand il s’agit de dénoncer les dérives de l’intégration européenne a-t-il été fort satisfait de pouvoir invoquer les règles du droit communautaire du travail pour partir en guerre contre ces lieux d’exploitation éhontée des travailleurs que sont…les colonies de vacances. A priori cela peut prêter à sourire et on peut se dire qu’il existe sans doute d’autres urgences sociales que de se pencher sur le sort des moniteurs de colonies de vacances et autres centres aérés, moniteurs certes peu payés et certes « suroccupés » mais…pour la bonne cause, vous dira-t-on, celle de l’accueil d’enfants qui sans cela n’auraient peut-être ni vacances ni occupations encadrées en dehors de l’école. Et certains de se lamenter sur l’initiative d’un syndicat qui se dit de « gôche » et s’attaque à un bastion du secteur socio éducatif.

    Ce qui est en cause c’est la légalité du contrat d'engagement éducatif (CEE) grâce auquel les structures d’accueil collectif d’enfants, comme les colonies de vacances, peuvent recruter des bénévoles qui pendant leurs congés ou leur temps de loisirs, vont participer « occasionnellement » à l'animation ou à la direction des accueils, moyennant une rémunération forfaitaire. Le CEE a été créé par une loi du 23/05/2006, complétée par un décret d’application du 28 juillet 2006 qui a modifié le code du travail en introduisant des dispositions spécifiques relatives à la durée de travail applicable aux personnes recrutées par CEE. Estimant que ces dispositions sont contraires aux règles communautaires édictées par la directive 2003/88 du 04/11/2003 sur l’aménagement du temps de travail, l’Union syndicale Solidaires Isère a introduit en janvier 2007 un recours en annulation du décret devant le Conseil d’État. Entre autres arguments à l’appui de sa requête, le syndicat faisait valoir que le décret excluait les titulaires de contrats d’engagement éducatif du droit à une période minimale de repos journalier accordé aux travailleurs par le code du travail, et que cette exclusion était contraire aux dispositions de la directive 2003/88. Celle-ci pose en effet une règle générale selon laquelle un travailleur doit bénéficier d'une période de repos de onze heures par périodes de vingt-quatre heures.

    Saisie par un renvoi préjudiciel, la Cour de Justice de 'l'Union européenne donne raison au syndicat (CJUE,14/10/2010/aff.C-428/09, Union syndicale Solidaires Isère c .Premier ministre, Ministère du Travail, des Relations sociales, de la Famille, de la Solidarité et de la Ville, Ministère de la Santé et des Sports).

    Satisfaction de celui-ci et consternation du secteur socio éducatif qui monte au créneau pour dénoncer la remise en cause du statut des moniteurs. Car l’octroi d’un temps de repos journalier de onze heures suppose qu'il faille engager plus de moniteurs pour organiser des roulements, avec, pour conséquence un renchérissement du prix des séjours des enfants (de 15% à 30%,selon les responsables du secteur).

    On le voit cette affaire est une nouvelle illustration des aspirations contradictoires entre lesquelles nous sommes tiraillés, en l’occurrence l’impératif, social, de permettre au plus grand nombre d’enfants possible de partir en vacances à moindre coût et celui, également social, de préserver les règles du droit du travail protectrices des travailleurs. Or, en l'occurrence, l’un ne va pas avec l’autre.

    Plus de détails dans l'article: Droit du travail et colonies de vacances ne font pas bon ménage 

    Domaguil



  • Consultation sur le droit du travail dans l’Union européenne

    Attendu depuis longtemps et retardé en raison notamment de l’opposition des représentants des employeurs (UNICE: Union des Industries de la Communauté européenne, le livre vert sur le droit du travail vient d’être rendu public par la Commission le 22/11/2006. Il sert de base à une consultation publique ouverte jusqu’au 21/03/2007.

    Contrairement à l’UNICE (est-ce réellement  surprenant ?) la Confédération Européenne des Syndicats -CES- qui militait pour l’ouverture d’un débat européen, se réjouit de le voir enfin lancé dans un communiqué du 22/11. 

    La question centrale posée est de savoir comment le droit du travail au niveau de l’Union européenne et au niveau national peut contribuer à rendre le marché du travail plus flexible tout en assurant aux travailleurs une sécurité maximale. C’est la notion de flexicurité, néologisme composé des termes de flexibilité et de sécurité pour décrire un modèle social qui compense une protection minimale contre le licenciement par un haut niveau de prestations pour les travailleurs privés d’emploi. Cette notion dont la Commission reconnaît qu’elle est très controversée, est au centre de la consultation. Les questions posées sont, par exemple :

    • 2. L'adaptation du droit du travail et des conventions collectives peut-elle contribuer à améliorer la flexibilité et la sécurité dans l'emploi et à réduire la segmentation du marché du travail? Si oui, comment?
    • 4. Comment faciliter le recrutement au moyen de contrats permanents et temporaires, que ce soit par la voie législative ou le biais de conventions collectives, de manière à accroître la souplesse de ces contrats tout en garantissant un niveau suffisant de sécurité dans l'emploi et de protection sociale?
    • 5. Cela vaudrait-il la peine d'envisager de combiner un assouplissement de la législation de protection de l'emploi à un système bien conçu de soutien aux chômeurs, sous la forme de compensations pour perte de revenu (politiques passives du marché du travail) mais aussi de politiques actives du marché du travail?
    • 8. Est-il nécessaire de prévoir un «socle de droits» relatif aux conditions de travail de tous les travailleurs, indépendamment de la forme de leur contrat de travail? Quelle serait, selon vous, l'incidence de ces obligations minimales sur la création d'emplois et la protection des travailleurs?
    • 12. Comment les droits du travail des travailleurs effectuant des prestations dans un contexte transnational, notamment des travailleurs frontaliers, peuvent-ils être garantis dans l'ensemble de la Communauté? Pensez-vous qu'il est nécessaire d'améliorer la cohérence des définitions du «travailleur» contenues dans les directives européennes, de manière à garantir que ces travailleurs puissent exercer leurs droits du travail, quel que soit l'État membre dans lequel ils travaillent? Ou bien estimez-vous que les États membres devraient garder une marge de manoeuvre dans ce domaine.

    L’UNICE soutient un concept déjà bien connu celui de « flexibilité » : c’est dans ce sens qu’elle conçoit la modernisation du droit du travail… La Commission européenne, pour sa part,  on l’a vu, préfère parler de flexicurité. Mais la pierre d’achoppement majeure pour l’UNICE est la compétence en matière de droit du travail. Selon elle, cette compétence doit rester nationale, ce qui exclut toute harmonisation communautaire. Enfin, une autre critique au livre vert est qu’il n’insiste pas suffisamment sur l’importance du travail indépendant pour développer l’esprit d’entreprise qui fait défaut, selon l’organisation, en Europe. En fait, comme l’exprime son Président, M.Seillière,  le livre vert inquiète l’UNICE car il lui semble trop centré sur la préservation de l’emploi et non sur les moyens de créer des emplois nouveaux.  L’UNICE reprend ainsi l’antienne bien connue pour demander plus de dérégulation (communiqué du 22/11/2006 « Reform of the labour market needs flexibility and national implementation”).

    Du côté de la CES, l’analyse est différente, on s’en doute. L’insécurité croissante des travailleurs résultant de l’évolution récente des législations nationales qui multiplient les recours à des contrats de travail précaire se conjugue à de nouvelles méthodes de production privilégiant l’externalisation des coûts (sous traitance), et la mobilité des travailleurs et des capitaux. Dans ce contexte d’ouverture, une réponse nationale n’est plus suffisante. Et c’est pourquoi, contrairement à l’UNICE, la CES attend du débat qui s’ouvre la définition de « normes de travail équitables et décentes dans toute l’UE » en soulignant qu’elles  sont  essentielles pour la bonne gestion d’un marché unique européen du travail en  pleine émergence. En clair, il faut lutter contre le dumping social dans une Europe communautaire disparate.

     

    Le débat commence. Il sera difficile. D’une part, on l’a vu, les positions des partenaires sociaux sont éloignées. D’autre part, les états eux-mêmes sont divisés et réticents à développer l’intervention de l’Union européenne en matière de droit du travail.

     

    Le livre vert et le questionnaire figurant sur la page de la Commission qui leur est dédiée.  

     

    Domaguil