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Droit communautaire - Page 6

  • Désinformation sur l’Europe : cas pratique !

    Grande émotion ce matin dans les émissions de rmcinfos : la Commission européenne a jugé, nous apprend-on, que le fait de refuser un emploi à un fumeur n’est pas une discrimination. Et de s’interroger gravement : un employeur pourra donc désormais refuser un emploi à quelqu’un uniquement parce qu’il fume ? Mais n’est-ce pas une atteinte insupportable à la liberté ? Et de quoi se mêle la Commission européenne? Etc, etc, etc…

     

     

    C’est un peu fatigant cette habitude des medias (ou de certains d’entre eux) de déformer les informations pour polémiquer sur ce qui n’a pas lieu d’être. Et ce n’est pas très conforme à ce que l’on attend du prétendu 4ème pouvoir dans une démocratie.

     

     

    Qu’en est-il exactement de cette supposée légalité d’une discrimination à l’embauche qui s’exercerait à l’encontre des fumeurs ?

     

     

    Le 18/05/2006, une question écrite est posée à la Commission européenne par une députée européenne britannique, Mme Catherine Stihler. Elle y demande si une annonce publiée récemment en Irlande (pays qui applique une interdiction de fumer sur le lieu de travail), portant les termes «Fumeurs s’abstenir», constitue une infraction à la législation européenne de lutte contre les discriminations.

     

     

    La réponse de la Commission (en anglais), le 18/7/2006, est qu’une entreprise peut effectivement refuser d’employer une personne parce qu’elle fume sans être coupable de discrimination au regard du droit communautaire.

     

     

    Selon elle, une offre d’emploi précisant que les candidatures de fumeurs sont refusées « ne paraît pas constituer l’un des cas de discrimination prohibés » par le droit communautaire : discrimination sur la base de la race ou de l’origine ethnique, handicap, âge, orientation sexuelle, religion et croyances (voir notamment la directive 2000/43

    et la directive 2000/78 ).

     

     

    Deux remarques peuvent être faites.

     

     

    La première est qu’il s’agit ici d’une prise de position de la Commission européenne qui n’engage qu’elle et qui ne crée pas de nouveaux droits ou obligations. Seule la Cour de justice des Communautés européennes a compétence pour « dire le droit », c’est-à-dire interpréter les textes communautaires et en l’occurrence juger des cas où il y a (ou non) discrimination violant le droit communautaire. Et la Cour de justice ne s’est pas prononcée sur le cas évoqué ni sur un cas similaire.

     

     

    La seconde est que la Commission européenne ne dit pas que le refus d’embaucher un fumeur n’est pas une discrimination. Elle dit que ce n’est pas contraire au principe de non discrimination tel qu’il est défini par les textes communautaires. C’est très différent. Car la législation d’un état peut très bien compléter le droit communautaire et aller au delà du socle réglementaire qu'il a posé. Rien n’empêche un pays de prévoir dans sa législation que le refus d’embauche d’un fumeur est interdit lorsqu’il est fondé sur le simple fait qu’il fume.

     

     

    Bref, fumeurs français, inutile de vous inquiéter (sauf si vous envoyez votre cv en Irlande !).

     

     

    A noter, pour compléter le thème, que l’égalité entre les hommes et les femmes est également un principe fondamental du droit communautaire, faisant l’objet de dispositions spécifiques, et qui exclue donc les discriminations fondées sur le sexe.

     

     

    Et en conclusion, il n’est pas étonnant que l’on ait un sentiment anti européen dans l’opinion quand on voit comment des medias présentent l’information.

       

               

  • Conséquences des divorces, quelle loi appliquer ?

    La Commission européenne a annoncé le 17/07/2006 le lancement d’une consultation publique  afin de faciliter  le règlement des problèmes nés de divorces ou de séparations dans un contexte transfrontalier et plus précisément, celui de la liquidation du patrimoine commun.

     

    Quelles sont les règles juridiques applicables  à  des couples dont les conjoints de nationalité différente se séparent et laissent des biens dans un Etat membre ? Quelles sont les règles lorsque les conjoints qui divorcent ont la même nationalité mais  possèdent un ou plusieurs biens dans un autre Etat membre que celui dont ils sont nationaux? Ces questions peuvent devenir un véritable casse-tête juridique du fait de conflits de lois des différents états et c’est pour l’éviter que la Commission envisage de proposer une réglementation européenne qui permettrait de déterminer la loi applicable dans différents types de situation en harmonisant les règles de conflit de lois. Mais au préalable, elle consulte le public sur cette initiative.

     

    L’augmentation de la mobilité et des unions entre personnes de nationalité différentes explique qu’un nombre croissant de questions peuvent relever de différents droits nationaux. D’après les chiffres de la Commission, près de 7 millions de ressortissants étrangers, nationaux d’Etats membres, vivent dans un autre Etat membre de l’Union. Près de 2,5 millions d’immeubles appartiennent à des propriétaires ayant leur résidence dans un autre état membre. Et les divorces internationaux représentent, quant à eux, 16% de tous les divorces dans l’Union européenne. Lorsqu’il y a séparation, les couples concernés se débattent alors dans des difficultés inextricables en raison de la disparité de règles applicables aux régimes matrimoniaux, parfois alors même qu’ils ont conclu un contrat de mariage valide et précisant le droit applicable, a fortiori s’ils n’ont pas pris cette précaution.

     

    Or le droit communautaire ne traite pas ce problème. Ni le règlement 44/2001 sur la compétence judiciaire des tribunaux et la reconnaissance mutuelle des décisions civiles dans l'Union , ni le règlement 2201/2003 sur la compétence et la reconnaissance en matière de divorce ne concernent les régimes matrimoniaux. 

     

    La consultation publique est ouverte sur le site de la Commission (en anglais).

     

  • La Commission européenne veut la transparence des tarifs aériens

    Le 18/07/2006, la Commission européenne a annoncé qu’elle transmettait au Conseil une proposition de règlement afin d’améliorer la transparence des prix des voyages par avions et de faciliter la comparaison des tarifs proposés par les différentes compagnies aériennes.

     

    Depuis la libéralisation totale du transport aérien en 1997, le nombre de liaisons a augmenté de plus de 60 % dans l’Union européenne  permettant la desserte de nouvelles villes et de régions isolées. L’apparition de nouveaux concurrents a entraîné une baisse importante des prix des billets sur de nombreuses liaisons.

     

    Actuellement, il existe une pratique fréquente qui consiste à indiquer des tarifs excluant les taxes d’aéroport, les assurances, les surtaxes pétrolières et autres coûts qui enchérissent le prix du billet. Ce qui permet aux compagnies de faire des campagnes publicitaires proches de la publicité mensongère…quand elles n’y sombrent pas.

     

    Pour que les voyageurs puissent connaître le prix final réel et le comparer à ceux des autres compagnies, la proposition de règlement impose donc d’indiquer un prix comprenant toutes les taxes, redevances et droits applicables.

     

    Elle interdit aussi de proposer des tarifs différents aux voyageurs sur la seule base de leur lieu de résidence dans l’Union européenne : un même billet acheté au même moment ne pourra pas être vendu à un prix différent sous prétexte qu’il l’est à un italien ou à un français.

     

    D’autres dispositions du futur règlement ont pour objet de simplifier et moderniser le droit communautaire en vigueur, par exemple, sur les conditions financières que toutes les compagnies aériennes communautaires doivent remplir et leur surveillance par les états membres ou encore sur les  critères d’octroi et de validité de la licence permettant d’effectuer des transports aériens dans l’Union européenne afin d’unifier les exigences nationales. La location d’avions immatriculés dans l’Union sera plus facile, mais en revanche, des exigences plus strictes seront posées pour la location d’avions de pays tiers, pour plus de sécurité.

     

    Enfin, les états lorsqu’ils fixent les obligations de service public seront surveillés de plus près par la Commission pour éviter, selon cette dernière,  que ces obligations ne servent de « prétexte » pour « fermer certains marchés à la concurrence ».

     

     

     

     
  • Edith Cresson coupable…mais pas sanctionnée

    Les commissaires européens ne sont pas à l'abri d'être rattrapés par le droit communautaire.

    Saisie par la Commission d’un recours contre l’ancienne commissaire européenne française  Edith Cresson pour violation de ses obligations de commissaire (en l'occurrence, favoritisme), la Cour de Justice des Communautés européennes a tranché le litige dans un arrêt  du 11/07/2006 (CJCE, 11/07/2006, C-432/04, Commission des Communautés européennes / Édith Cresson).

     

     

    On peut y lire qu’ « en faisant procéder au recrutement d’une connaissance proche, M. Berthelot, en qualité de visiteur scientifique, alors qu’il n’allait pas exercer les activités correspondantes, cela afin de permettre à l’intéressé d’occuper des fonctions de conseiller personnel à son cabinet, quand bien même celui-ci était déjà complet et que, de surcroît, M. Berthelot avait dépassé l’âge limite autorisé pour assurer de telles fonctions, Mme Cresson s’est rendue responsable d’un manquement d’un certain degré de gravité ». Les termes peuvent paraître modérés mais ils interviennent au terme d’un raisonnement dans lequel la Cour a rappelé que les membres de la Commission doivent respecter des « obligations d’honnêteté et de délicatesse » et « l’ensemble des devoirs qui découlent de la charge de membre de la Commission, parmi lesquels figure l’obligation d’agir en pleine indépendance et dans l’intérêt général de la Communauté, ainsi que d’observer les normes les plus rigoureuses en matière de comportement ». Pour être condamnable, un manquement à ces obligations doit revêtir un certain caractère de gravité. Ce qui est donc le cas des faits reprochés à madame Cresson.

     

     

    En revanche, alors que des sanctions telles que la déchéance des droits à pension ou d'autres avantages peuvent être décidées, la Cour refuse de les prononcer, jugeant que, « vu les circonstances de l’espèce, il y a lieu de considérer que le constat du manquement constitue en soi une sanction appropriée et de dispenser par conséquent Mme Cresson de sanction sous la forme d’une déchéance de son droit à pension ou d’autres avantages en tenant lieu ».

     

     

    Ce faisant elle ne suit pas les conclusions de l’avocat général qui s’était prononcé en faveur de sanctions en admettant cependant qu’elles puissent être réduites pour tenir compte  de certaines circonstances « atténuantes » : le temps écoulé entre les faits et le recours, l’atteinte importante à sa réputation déjà subie par madame Cresson du fait de la couverture médiatique de l’affaire,  et enfin, dernier élément et non le moindre : le fait que le comportement de madame Cresson avait « apparemment trouvé un certain appui dans la culture administrative qui prévalait à l ‘époque  au sein de la Commission » ! Une façon élégante de dire que madame Cresson n’avait sans doute pas été la seule commissaire à vouloir « caser »  un proche  dans un emploi rémunérateur ?