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Quoi de neuf en Europe - Page 64

  • Arrêts Laval et Viking (1)

    La Cour de Justice des Communautés Européennes vient de rendre deux décisions très attendues par les syndicats dans les affaires Viking et Laval (voir pour le rappel des faits, les articles : Polémique sur les droits des travailleurs détachés et Application d’une convention collective à une entreprise d’un autre état de l’Union européenne ).

     

     

    Dans l’affaire Laval, il s’agissait de savoir si des syndicats suédois  pouvaient imposer à une entreprise lettone qui détachait des travailleurs en Suède le respect de conditions de salaire résultant d’une convention collective sectorielle. Laval, une entreprise de bâtiment avait obtenu un marché de construction en Suède. Mais un syndicat suédois du bâtiment avait bloqué le chantier au motif que Laval ne respectait pas la convention collective applicable au secteur . La société refusait en effet de la signer, ce qui lui permettait de payer ses ouvriers détachés à des salaires inférieurs à ceux prévus par la convention  (« dumping salarial ») . L’action du syndicat avait conduit à l’abandon du chantier par Laval en février 2005, ce dont cette dernière demandait réparation.

    Dans l’affaire Viking, la question posée était celle de la légalité de l’action collective syndicale  pour dissuader une société de délocaliser au sein de la Communauté européenne, afin de tirer profit de législations sociales plus avantageuses pour les employeurs car moins protectrices des salariés. En l’espèce, la société finlandaise de ferries Viking Line, avait décidé de faire immatriculer un de ses ferries en Estonie afin  de remplacer le personnel navigant par un équipage estonien, rémunéré à un niveau de salaire inférieur à celui pratiqué en Finlande, et de pouvoir concurrencer d’autres ferries sur la même liaison maritime. Elle avait demandé en justice une injonction afin d’empêcher le FSU, Syndicat des marins finnois, de mener une action syndicale visant  à protéger les emplois de ses membres et d’obliger la Fédération internationale des ouvriers du transport à retirer l’interdiction qu’elle avait faite à ses affiliés de négocier avec elle, en solidarité avec le FSU.

     

     

    Dans les deux cas, l’exercice des droits syndicaux dans l’Union européenne se trouvait confronté à une des libertés fondamentales sur lesquelles repose le marché intérieur, libre prestation de services ou liberté d'établissement. De façon lapidaire on pourrait résumer le dilemme posé en ces termes : Europe sociale ou Europe du libre échange ?  Le Secrétaire général de la Confédération Européenne des Syndicats (CES), John Monks remarquait en 2006 : « Les répercussions  potentielles de ces affaires aux plans juridique, politique et social vont  beaucoup plus loin que les modèles sociaux finnois et suédois et elles affecteront les relations de travail partout en Europe ».

     

     

    Mais les décisions rendues par la Cour de Justice ne sont pas à la hauteur des attentes des syndicats.

    Dans l’arrêt rendu le 11/12 sur l’affaire Viking (CJCE, 11/12/2007, aff. C-438/05 , The International Transport Workers' Federation & The Finnish Seamen"s Union / Viking Line ABP & OÜ Viking Line Eesti), la Cour juge que ni le fait que le droit de grève ou d’action syndicale échappent à la compétence communautaire, ni celui qu’il  s’agit de droits fondamentaux faisant partie intégrante des principes généraux du droit communautaire dont la Cour assure le respect, ne signifient que leur exercice soit affranchi du respect du droit communautaire (considérants 40 à 47). Or, l’action collective menée par un syndicat ou un groupement de syndicats à l’encontre d’une entreprise pour l’amener à conclure une convention collective dont le contenu est bien de nature à la dissuader de faire usage de sa liberté d’établissement restreint cette liberté et peut donc de ce fait être contraire au droit communautaire. De telles restrictions peuvent se justifier seulement « au titre de la protection d’une raison impérieuse d’intérêt général, telle que la protection des travailleurs, à condition qu’il soit établi qu’elles sont aptes à garantir la réalisation de l’objectif légitime poursuivi et ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif » (considérant 90). Autrement dit, il faut examiner si les emplois des marins finlandais étaient sérieusement menacés par la décision de Viking et si l’action des syndicats n’a pas été au delà de ce qui était nécessaire. Ce n’est pas à la Cour d’en juger, puisqu’elle est seulement compétente pour interpréter les dispositions du droit communautaire, mais au juge national  devant lequel doit être réglé  le litige, sur la base de cette interprétation. La CES , tout en se réjouissant de voir la Cour de Justice confirmer  que le droit de mener une  action collective est un droit fondamental, reconnu par la législation internationale et communautaire qui peut justifier des restrictions imposées à la liberté fondamentale d’établissement, s’inquiète que la Cour « semble même temps limiter le champ d’application d’une telle justification d’une manière qui pourrait faire  obstacle à l’exercice du droit d’action collective, en particulier dans des situations transfrontalières ». Car, observe son Secrétaire général : « Ce jugement protège clairement les syndicats aux plans local  et national en remettant en question la liberté d’établissement des entreprises.  Il est cependant moins clair concernant les droits syndicaux transnationaux…nous aurions aimé une reconnaissance plus  claire et non ambigüe des droits des syndicats à conserver et défendre les  droits des travailleurs et l’égalité de traitement et à coopérer au-delà des  frontières, afin de contrebalancer le pouvoir de l’entreprise organisée qui  devient de plus en plus mondiale ».

     

    Domaguil

     

     

  • Reprise

    Le blog reprend après une absence de plus d’un mois, pour cause de fin d’années très (trop !) occupée.

     

    Très bonne année 2008 à tous.

     

    Pour ma part, je la commencerai sur ce blog en consacrant une série de notes au traité de Lisbonne (tout le mois de janvier, à partir de la semaine prochaine).

     

    En attendant, demain et après demain, publication d’un article en deux parties sur les arrêts de la Cour de Justice de Communautés européennes dans les affaires Viking et Laval, ou comment faire coexister liberté d’action syndicale et libertés d’établissement et de prestations de services.

     

    Domaguil

  • Contrôle de l’application du droit communautaire de la consommation par les sites web de vente de billets d'avion

    15 pays membres (dont la France)  ont prêté main forte à la Commission européenne pour enquêter sur le respect de la législation par les sites en vente en ligne de billets d’avion.

     

    Du 24 au 28 septembre, plus de 400 sites web ont été analysés pour contrôler leur conformité avec le droit communautaire de la consommation, notamment en matière de publicité trompeuse (Directive 84/450, codifiée par la directive 2006/114) et de clauses abusives (directive 93/13).

     

     

    Les résultats de cette enquête communautaire qui ciblait les sites des principales compagnies aériennes européennes, des transporteurs à bas coûts et d'autres sites Internet de vente de billets d'avion ont été rendus publics par la commissaire européenne en charge de la protection des consommateurs, Meglena Kuneva, le 14/11/2007.

     

     

    Il en ressort que plus de 50% de tous les sites web présentent des irrégularités, en particulier dans l’indication des tarifs, dans les clauses contractuelles et l’information sur les conditions proposées. Parmi les problèmes fréquents rencontré par le consommateur, on note : indication du prix sans mention des taxes d’aéroport et des frais annexes (voir aussi la brève d’information sur la proposition de règlement communautaire sur la transparence des prix des voyages par avion : La Commission européenne veut la transparence des tarifs aériens), information absente ou incomplète sur les droits et les procédures d’annulation, de transfert ou de modification des dates, proposition de services d’assurance et supplémentaires par une case précochée et en petits caractères de telle sorte que l’on peut y souscrire sans s’en rendre compte…

     

     

    Les compagnies ont à présent quatre mois pour mettre en conformité leurs sites Internet, a annoncé la Commission. Faute de le faire ou de démontrer qu’elles respectent bien le droit, la Commission menace d’action en justice (les compagnies pourraient devoir s'acquitter d'amendes et/ou clôturer leurs sites Internet) , et de publier un blâme à l’encontre des compagnies fautives, ce qui pourrait effectivement nuire à leur image de marque auprès des consommateurs.

     

     

    Cette opération "coup de poing" est une première mais certainement pas une dernière.

     

    Domaguil

     

  • Plaidoyer européen de Nicolas Sarkozy devant les eurodéputés

    Le 13/11/2007, le Président de la République française, Nicolas Sarkozy  faisait un discours devant le Parlement européen. Ce fut l’occasion de  renouveler un engagement européen dont il faut bien dire qu’il s’était manifesté plutôt discrètement par le passé et d’esquisser les grandes lignes de ce que sera le programme de la Présidence française de l’Union européenne.

     

     

    Une entrée en matière a rappelé avec lyrisme le rêve de paix qui a présidé à la construction européenne qui  ne se réduit pas à une machine « à procédures et à règles » mais est « une exigence morale, politique et spirituelle » qui  « se fera avec les peuples ou …ne se fera pas ». Le non au traité constitutionnel, selon Nicolas Sarkozy, résultait précisément d'une déception « des millions d’hommes et  de femmes en Europe qui s’étaient mis à désespérer de l’Europe parce qu’ils avaient le sentiment qu’elle ne les protégeait plus, qu’elle était devenue indifférente aux difficultés de leur vie, qu’elle ne s’adressait plus à eux ».

     

     

    Puis est venue une véritable profession de foi dans l’Europe politique et, de façon plutôt inattendue, une critique claire de la règle de l’unanimité comme procédure de décision, « système qui permet à quelques uns d’imposer leur loi à tous les autres…certitude qu’on ne décidera jamais rien de grand, d’audacieux, qu’on ne prendra jamais aucun risque…impuissance ». Et de conclure par ce constat qui fera chaud au cœur des fédéralistes : « Avec l'unanimité, on s'aligne sur celui qui veut le moins d'Europe ».

     

     

    Victoire politique de l’Europe sur elle-même" , le traité modificatif que le Chef de l’Etat français s’obstine à appeler traité simplifié (il est vrai qu'il a fait beaucoup pour le succès de cette appellation)  est le signe d’un « ressaisissement » et d’une remise en marche de la construction européenne. Mais s’il permet à l’Union européenne  « d’agir et de décider », il ne résout pas la question de ce qu’elle veut être et de ce qu’elle peut apporter. D’où l’idée d’un  Comité des sages pour poser la question de l’avenir de l’Union.

     

     

    Car  l’Union européenne se trouve confrontée à de grands défis : crise identitaire et revendication de protection, lutte contre le réchauffement climatique, régulation du capitalisme financier, nécessité d'une politique d'immigration commune.

     

     

    Comment concilier  l’appartenance nationale et l’appartenance européenne ? Comment faire que l’Europe protège les identités nationales qui sont une de ses richesses ? Le grand marché européen ne peut répondre à ces questions, pas plus qu’il ne peut donner aux citoyens le sentiment de protection inhérent à la vie en démocratie.  La réponse passe par une promotion de la dimension politique et culturelle de l’Europe, trop longtemps oubliées au profit de l’Europe économique et financière. Mais pour que l'Europe retrouve la confiance des peuples, sans quoi elle ne pourra progresser sur la voie de l'intégration politique, elle doit leur assurer cette protection qu'attendent les citoyens, ce qui implique de restaurer la préférence communautaire dans les relations économiques avec le reste du monde. 

     

    Ainsi le libéral (au plan interne) Nicolas Sarkozy plaide-t-il pour la "protection" au plan communautaire, seule échelle à laquelle elle puisse être efficacement assurée dans un monde mondialisé. Protection et non protectionnisme, se défend le Chef de l'etat français : il s'agit tout simplement que l'Europe décide de  "réclamer la réciprocité" vis-à-vis de partenaires mondiaux qui, eux, n'hésitent pas à protéger leurs économies. Quant à la concurrence, "l’Europe ne peut pas être seule au monde à en faire une religion". C'est pourquoi, insiste Nicolas Sarkozy, le "traité simplifié" en fait un "moyen et non une fin". Enfin, si l'Europe a fait le choix de l'économie de marché et du capitalisme, "ce choix n’implique pas le laissez-faire absolu et la dérive d’un capitalisme financier qui fait la part belle aux spéculateurs et aux rentiers plutôt qu’aux entrepreneurs et aux travailleurs". L'Europe doit  "jouer un rôle dans la nécessaire moralisation du capitalisme financier".
     

    Refondation de la politique agricole commune après 2013, fiscalité écologique, énergies renouvelables, sont les autres thèmes que Nicolas Sarkozy veut voir abordés. Deux dossiers seront privilégiés: celui de la défense et celui de l'immigration.  Sur la défense, la question est  posée : « comment l’Europe pourrait-elle  être indépendante, comment pourrait-elle avoir une influence politique dans le monde, comment pourrait-elle être un facteur   de paix et d’équilibre si elle n’était pas capable d’assurer  elle-même sa défense ? ».   Et la réponse est tout aussi évidente : « cette solidarité (n.d.r : des peuples européens)  elle doit s’exprimer dans la défense ». Tout comme dans la politique de l’immigration, autre priorité de Nicolas Sarkozy qui veut renforcer cette politique commune.

     

     

    Le 13 novembre 2007, devant les eurodéputés,  Sarkozy l’Américain comme on l’a souvent appelé avait fait place à Sarkozy l’Européen.  "Affaire à suivre" …

     

      

    Domaguil