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Quoi de neuf en Europe - Page 61

  • Trissotin et le traité de Lisbonne

    Dans "les femmes savantes" de Molière,  il est un personnage brocardé pour sa prétention et son piètre mérite. Il s’appelle Trissotin.

     

    Ledit Trissotin a une abondante descendance comme le prouve encore ces temps ci le "débat" sur le traité de Lisbonne et sur la nécessité d’un  referendum pour le ratifier, faute de quoi, c’est entendu, foi de trissotin, nous serons face à un viol de la démocratie, à une haute trahison (j’en passe et des moins bêtes …). Il suffit de surfer sur le web pour se régaler de leur inlassable mauvaise foi et/ou ignorance érigées en vertu par eux-mêmes . Car bien entendu, ces trissotins sont férocément opposés à l' "élite" , concept vague qui en fait regroupe... tous ceux qui ne sont pas d'accord avec eux et qui leur permet de vouer aux gémonies tout téméraire qui s'avise de leur démontrer, preuves à l'appui, qu'ils débitent des aneries (ou des mensonges selon les cas). En bons démocrates qu'ils sont, certains d'entre eux vont jusqu'à censurer systématiquement sur leurs blogs ou forums tout commentaire un tant soit peu argumenté qui s'avère embarrassant pour leurs thèses fantaisistes.

     

    Ces trissotins s’époumonent à hurler leur démocratique indignation devant le déni que constitue la ratification parlementaire d’un texte qu’ils prétendent identique à celui que le peuple français a rejeté en 2005. Et comme ils ne craignent pas le ridicule ils invoquent la caution de Valery Giscard d’Estaing, devenu le « sage » dont on écoute les avis, après avoir été copieusement vilipendé par les mêmes en 2005 en sa qualité de « père » de l’odieux traité constitutionnel.

     

    Car le traité de Lisbonne est  le copier coller du traité constitutionnel, coco, c’est VGE lui-même qui le dit !

     

    Merveilleuse aptitude à faire feu de tout bois et à conclure des alliances de circonstance avec ses ennemis de la veille.

     

    Après nous avoir répété à satiété que  le traité de Lisbonne n’est que le retour du traité constitutionnel sous un autre emballage, les trissotins  caquettent à n’en plus finir  sur l’insupportable forfaiture que constitue le passage en force auquel s’apprêtent à procéder des élus que certains, dans leur grande modération, n’hésitent pas à comparer aux parlementaires qui donnèrent les pleins pouvoirs à Pétain en 1940.  Ces trissotins-là, aussi odieux que ridicules, sont, oh surprise,  incapables d’expliquer en quoi le traité de Lisbonne est la copie du traité constitutionnel. Et pour cause : une telle analyse à la truelle est pour le moins discutable.

     

    Mais les trissotins n’en ont cure. Bien que de piètre mérite, ils sont convaincus de détenir la vérité et s’imaginent qu’en hurlant bien fort et en excommuniant tous ceux qui ne partagent pas leur avis non éclairé, ils peuvent étouffer les voix dissidentes. Cela leur évite d’avoir à argumenter, c'est pratique.

     

    A la fin de la pièce de Molière, Trissotin est démasqué. La morale est claire : les trissotins ne triomphent que lorsque  nous abdiquons notre esprit critique.

  • Le poids des parlements nationaux est renforcé par le traité de Lisbonne

    Le rôle des parlements nationaux est renforcé dans le Traité de Lisbonne (ce qui est un des éléments de ce que j’ai appelé dans mon commentaire « la redéfinition des relations entre l’Union et les Etats membres »). Ces dispositions ont été débattues lors de la rencontre qui a eu lieu les 3 et 4 décembre entre des représentants des parlements nationaux des 27 membres de l’Union européenne et les eurodéputés à Bruxelles. Ainsi par exemple, Jaime Gama,  Président de l'Assembleia da Republica portugaise a estimé que "les premiers gagnants du nouveau traité sont les parlements nationaux".

     

     

    A vrai dire le rôle des ces derniers s’est amplifié au fil des révisions successives des traités européens. Mais le traité de Lisbonne va plus loin.

     

     

    Tout d’abord, la participation des  parlements nationaux au « bon fonctionnement » de l’Union est mentionnée pour la première fois dans le corps des traités (ce n’était pas le cas dans le traité constitutionnel). C’est la modification apportée par l’article 1§12  du Traité de Lisbonne (8C du TUE dans sa numérotation, qui devient l’article 12 dans la version consolidée) : « Les parlements nationaux contribuent activement au bon fonctionnement de l'Union:

    a) en étant informés par les institutions de l'Union et en recevant notification des projets d'actes législatifs de l'Union conformément au protocole sur le rôle des parlements nationaux dans l'Union européenne;

    b) en veillant au respect du principe de subsidiarité conformément aux procédures prévues par le protocole sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité;

    c) en participant, dans le cadre de l'espace de liberté, de sécurité et de justice, aux mécanismes d'évaluation de la mise en oeuvre des politiques de l'Union dans cet espace, conformément à l'article 61 C du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et en étant associés au contrôle politique d'Europol et à l'évaluation des activités d'Eurojust, conformément aux articles 69 G et 69 D dudit traité; d) en prenant part aux procédures de révision des traités, conformément à l'article 48 du présent traité; e) en étant informés des demandes d'adhésion à l'Union, conformément à l'article 49 du présent traité;

    f) en participant à la coopération interparlementaire entre parlements nationaux et avec le Parlement européen, conformément au protocole sur le rôle des parlements nationaux dans l'Union européenne».

     

     

    Le contrôle de subsidiarité par les parlements nationaux est également développé

     

    La subsidiarité signifie que la décision doit se prendre au niveau le plus pertinent pour son efficacité, le plus proche possible du citoyen. Elle implique donc que, sauf  bien sûr dans les domaines où elle a une compétence exclusive,  l’Union européenne n’intervient  que si cela se justifie par rapport aux autres niveaux de décision (national, régional ou local) car son action sera plus efficace.

     

     

    Le contrôle de subsidiarité par les parlements nationaux est complété et rendu plus efficace par l’introduction d’une nouvelle modalité. Le protocole sur l’application des principes de subsidiarité et de proportionnalité détaille la procédure de contrôle qui concerne tout "projet d'acte législatif " (propositions de la Commission, initiatives d'un groupe d'États membres, initiatives du Parlement européen,  demandes de la Cour de justice, recommandations de la Banque centrale européenne et  demandes de la Banque européenne d'investissement, visant à l'adoption d'un acte législatif).

     

     

    Dans un délai de huit semaines à compter de la transmission d’un projet d’acte législatif, toute chambre d’un parlement national peut adresser aux institutions de l’Union un « avis motivé » exposant les raisons pour lesquelles elle estime que ce texte ne respecte pas le principe de subsidiarité (ce délai a été allongé ; il est de six semaines dans les traités en vigueur actuellement). Les institutions de l’Union « tiennent compte » des avis motivés qui leur sont adressés.

     

     

    Lorsqu’un tiers des parlements nationaux ont adressé un avis motivé, le projet doit être réexaminé (pour les textes relatifs à la coopération policière et à la coopération judiciaire en matière pénale, le seuil est abaissé à un quart). Pour l’application de cette règle, chaque parlement national dispose de deux voix ; lorsqu’il existe un système bicaméral (comme en France : Sénat et AN), chaque chambre dispose d’une voix.

     

     

    Si un projet d’acte législatif est contesté, sur le fondement de la subsidiarité, par une majorité simple des parlements nationaux , et si la Commission décide de le maintenir, le Conseil et le Parlement européen doivent se prononcer sur la compatibilité de ce projet avec le principe de subsidiarité. Si le Conseil (à la majorité de 55 % de ses membres) ou le Parlement européen (à la majorité simple) donne une réponse négative, le projet est écarté. C’est une innovation par rapport aux traités actuels et au traité constitutionnel.

     

     

    La Cour de justice de l'Union européenne est compétente pour se prononcer sur les recours pour violation, par un acte législatif, du principe de subsidiarité formés, par un État membre ou transmis par celui-ci conformément à son ordre juridique au nom de son parlement national ou d'une chambre de celui-ci.

     

     

    Les parlements nationaux jouent également un rôle dans la procédure de révision ordinaire et simplifiée (article 1 § 56 du traité de Lisbonne qui est numéroté article 48 du TUE et garde le même numéro dans la version consolidée).

     

     

    Tout comme le traité constitutionnel, le traité de Lisbonne permet une procédure de révision simplifiée pour modifier les politiques internes de l'Union (celles qui ne concernent pas l’action extérieure). Cette procédure ne nécessite pas de convoquer une Conférence Intergouvernementale. Le Conseil doit statuer à l’unanimité. Si la révision est votée, elle doit être ensuite approuvée  par les États membres, « conformément à leurs règles constitutionnelles respectives », ce qui signifie que les parlements nationaux peuvent avoir à se prononcer.

     

     

    De plus, comme c’était déjà le cas dans le traité constitutionnel (article IV-444 de ce traité), chaque parlement national peut s’opposer au recours à une clause passerelle (une clause passerelle permet au Conseil de décider à l’unanimité de passer au vote à la majorité qualifiée pour prendre une décision relevant des politiques communes et qui aurait nécessité l’unanimité). Le recours à une clause passerelle est notifié aux parlements nationaux et la décision de l’utiliser ne peut entrer en vigueur que si aucun parlement national n’a fait savoir qu’il s’y opposait dans un délai de six mois. Le principe est posé dans l’article 48 TFUE§7. Mais certains articles qui prévoient le recours à une clause passerelle n’évoquent pas la transmission aux parlements. Il en est ainsi, par exemple, de l’article 1, par. 34, devenu le 31§3 du TUE dans la version consolidée, en matière de politique étrangère et de sécurité commune. On peut en conclure que dans cette matière, la transmission aux parlements n’est pas nécessaire, ce qui relativise leur pouvoir d’opposition. A l’inverse, contrairement à ce qui était prévu dans le traité constitutionnel, le traité de Lisbonne dispose que  tout parlement national  peut s'opposer à la mise en œuvre de la clause passerelle permettant de passer de l'unanimité à la majorité qualifiée pour les aspects du droit de la famille ayant une incidence transfrontière (article 2 du traité de Lisbonne paragraphe 66 , numéroté 65 et devenu l’article 81 du TFUE dans la version consolidée). NB :  l’opposition se fait par le biais d’une motion du parlement donc, votée par les deux chambres (AN et Sénat en France) ce qui donne au Sénat un droit de veto, quand les majorités ne sont pas de la même famille politique.

    Domaguil

     

     

  • Le traité de Lisbonne redessine les relations Etats Union européenne

    La répartition des compétences entre l’Union et les états traduit une conception plus restrictive du rôle de la première. L’Union dispose des compétences que les États lui attribuent dans le Traité de Lisbonne (principe d’attribution).  Toutes les autres compétences continuent d’appartenir aux États.

    Les compétences de l’Union sont ainsi interprétées restrictivement : « l’Union n’agit que dans les limites des compétences que les États membres lui ont attribuées dans les traités pour atteindre les objectifs que ces traités établissent »  (article 1§6 du traité de Lisbonne numéroté 3ter et devenu l’article 5 du TUE dans la version consolidée) ce qui est une formulation à la fois plus limitative que celle de l’actuel article 5 du traité sur la Communauté européenne («La Communauté agit dans les limites des compétences qui lui sont conférées et des objectifs qui lui sont assignés par le présent traité » ) et de celle du traité constitutionnel. D’autant que le  traité modificatif est moins explicite que ne l’était le traité constitutionnel européen qui donnait une liste des compétences exclusives de l’Union et de celles qu’elle partageait avec les états. Il semble beaucoup plus inspiré par le souci d’empêcher un empiètement de l’Union sur les compétences des états, voire de permettre à ces derniers de « reprendre la main ».

     

    Ceci est confirmé par d’autres dispositions :

    - L’article 1§56 du traité de Lisbonne  (article 48 TUE dans la numérotation du traité de Lisbonne et également 48 du TUE  dans la version consolidée) ouvre la possibilité de rendre des compétences aux États membres : « Le gouvernement de tout État membre, le Parlement européen ou la Commission peut soumettre au Conseil des projets tendant à la révision des traités. Ces projets peuvent, entre autres, tendre à accroître ou à réduire les compétences attribuées à l'Union dans les traités . Ces projets sont transmis par le Conseil au Conseil européen et notifiés aux parlements nationaux » . 

    - La Déclaration n° 28 dispose que les États membres exerceront à nouveau leur compétence lorsque l’Union aura cessé de l’exercer notamment en application des principes de subsidiarité et de proportionnalité. Le Conseil, sur l'initiative d'un ou de plusieurs de ses membres, peut demander à la Commission de soumettre des propositions visant à abroger un acte législatif pour garantir le respect de ces principes.  « La conférence souligne que, conformément au système de répartition des compétences entre l’Union et les États membres tel que prévu par le traité sur l’Union européenne et le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, toute compétence non attribuée à l’Union dans les traités appartient aux États membres.

    Lorsque les traités attribuent à l’Union une compétence partagée avec les États membres dans un domaine déterminé, les États membres exercent leur compétence dans la mesure où l’Union n’a pas exercé la sienne ou a décidé de cesser de l’exercer.

    Ce dernier cas de figure peut se produire lorsque les institutions compétentes de l’Union décident d’abroger un acte législatif, en particulier en vue de mieux garantir le respect constant des principes de subsidiarité et de proportionnalité. Sur l’initiative d’un ou de plusieurs de ses membres (représentants des États membres) et conformément à l’article 208 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, le Conseil peut demander à la Commission de soumette des propositions visant à abroger un acte législatif.

    La Conférence se félicite que la Commission déclare qu’elle accordera une attention particulière à ce type de demande ».

    - Le traité de Lisbonne  introduit un « système de freinage » renforcé dans le domaine social (totalisation des périodes d'assurance et exportation des prestations de sécurité sociale): si un état déclare qu'une proposition d'acte législatif porterait atteinte à des aspects importants de son système de sécurité sociale (par exemple en affectant l'équilibre financier) et demande au Conseil européen de se saisir de la question, la procédure législative sera suspendue. Le traité constitutionnel ( article III-316) prévoyait que  le Conseil européen pouvait ou renvoyer le projet au Conseil pour qu’il décide à la majorité qualifiée, ou demander à la Commission de présenter une nouvelle proposition. Le traité de Lisbonne ouvre une troisième possibilité qui donne une marge de manœuvre supplémentaire au Conseil (donc aux Etats) en disposant que son inaction entraîne l’abandon du texte proposé: Si dans un délai de quatre mois, le Conseil européen n ‘a pas agi, en revoyant le projet au Conseil pour qu’il reprenne son examen, la proposition sera abandonnée (article 2§51 numéroté 42  et 48 du TFUE dans la version consolidée). Le même système était à l’origine prévu en matière de droit pénal, mais le traité de Lisbonne  permet simplement l’évocation par la Conseil européen de la question (article 2§67 du traité de Lisbonne numéroté 69A - reconnaissance mutuelle des jugements et décisions judiciaires et  rapprochement des dispositions législatives et réglementaires des États -  et 69B – règles minimales relatives à la définition des infractions pénales et des sanctions dans des domaines de criminalité particulièrement grave revêtant une dimension transfrontière - et 82 et 83 du TFUE dans la version consolidée : Extrait : « Lorsqu'un membre du Conseil estime qu'un projet de directive visée au paragraphe 2 porterait atteinte aux aspects fondamentaux de son système de justice pénale, il peut demander que le Conseil européen soit saisi. Dans ce cas, la procédure législative ordinaire est suspendue. Après discussion, et en cas de consensus, le Conseil européen, dans un délai de quatre mois à compter de cette suspension, renvoie le projet au Conseil, ce qui met fin à la suspension de la procédure législative ordinaire »).

    - En vertu du  protocole sur l’exercice des compétences partagées entre l’Union et les États, « lorsque l’Union mène une action dans un certain domaine, le champ d’application de cet exercice de compétence ne couvre que les éléments régis par l’acte de l’Union en question et ne couvre donc pas tout le domaine ». Cela a pour but de réduire strictement la portée de l’action de l’Union dans les domaines de compétence partagée. Concrètement, les États peuvent légiférer tant que l’Union n’a pas légiféré.

    - La déclaration (n° 42)sur l’article 308 (cause de flexibilité) précise : « La Conférence souligne que, conformément à la jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne, l'article 308 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne qui fait partie intégrante d'un ordre institutionnel basé sur le principe des compétences d'attribution, ne saurait constituer un fondement pour élargir le domaine des compétences de l'Union au-delà du cadre général résultant de l'ensemble des dispositions des traités, et en particulier de celles qui définissent les missions et les actions de l'Union. Cet article ne saurait en tout cas servir de fondement à l'adoption de dispositions qui aboutiraient en substance, dans leurs conséquences, à une modification des traités échappant à la procédure que ceux-ci prévoient à cet effet ».

    - Une déclaration (n°24) sur la personnalité juridique de l’Union précise que « le fait que l'Union européenne a une personnalité juridique n'autorisera en aucun cas l'Union à légiférer ou à agir au-delà des compétences que les États membres lui ont attribuées dans les traités ».

     

    - Une déclaration (n° 14) sur la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), affirme que la nomination d’un haut représentant de l’Union et la mise en place d’un service d’action extérieure « n'affecteront pas la base juridique existante, les responsabilités ni les compétences de chaque État membre en ce qui concerne l'élaboration et la conduite de sa politique étrangère, son service diplomatique national, ses relations avec les pays tiers et sa participation à des organisations internationales, y compris l'appartenance d'un État membre au Conseil de sécurité des Nations unies ». de plus, ajoute cette déclaration : « les dispositions concernant la politique étrangère et de sécurité commune ne confèrent pas de nouveaux pouvoirs à la Commission de prendre l'initiative de décisions ni n'accroissent le rôle du Parlement européen ».

     

    Il existe d’autres dispositions dictées par le même souci d’empêcher l’Union d’empiéter sur les compétences des Etats.

    Citons par exemple :

    La protection diplomatique et consulaire : l’article III-127 du traité constitutionnel précisait que les « mesures nécessaires » pour assurer cette protection étaient prises par la loi européenne (l’équivalent du règlement directement applicable dans les ordres juridiques nationaux sans que les états procèdent à une transposition) .Le traité de Lisbonne est plus restrictif puisqu’il dispose que le Conseil pourra seulement adopter des « directives établissant les mesures de coordination et de coopération nécessaires » (article 1§36 du traité de Lisbonne numéroté 20 et article 23 du TFUE dans la version consolidée) . On pourrait faire des observations comparables dans d’autres matières (un autre exemple est la santé publique : l’Union n’adopte pas des mesures législatives concernant « la surveillance de menaces transfrontalières graves pour la santé, l’alerte en cas de telles mesures et la lutte contre celles-ci » comme c’était prévu dans le traité constitutionnel, mais  des « mesures d’encouragement ».

     

    En résumé, on peut déduire de cet exemple de dispositions un retour du « national » au détriment du communautaire par le biais des procédures décisionnelles, par la définition des compétences, mais également, on le verra dans un autre article, par le renforcement du rôle des parlements nationaux.
  • Cacophonie européenne sur les aliments issus de clonage

    Le 15/01/2008, la Food and Drug administration des États Unis a autorisé la commercialisation de produits issus d’animaux clonés. Sans doute soucieuse de ne pas être en retard dans la course au progrès ( !), l'Autorité européenne chargée de la sécurité des aliments (EFSA) qui avait été chargée d'un rapport sur les dangers éventuels du clonage, avait dans un point presse du 11/01 présenté les premières conclusions de son projet d’avis « sur les conséquences du clonage animal sur la sécurité des aliments, la santé et le bien-être des animaux et l'environnement ». Elle s’ y montrait très rassurante en expliquant notamment : « il est très improbable qu’il y ait une quelconque différence en termes de sécurité des aliments entre les produits alimentaires issus de clones et de leur progéniture, par rapport à ceux dérivés d’animaux reproduits de manière classique ».

     

     

    Toutefois, il ne s’agit à ce stade que d’un projet d’avis et une consultation publique a été lancée le 11 afin de recueillir commentaires et opinions sur cette question (les commentaires peuvent être soumis jusqu’au 25 février 2008,  via le site internet de l’EFSA).

     

     

    Pourtant, peu de jours après, le 14/01, la Commission européenne a présenté une proposition de modification du règlement communautaire sur les « nouveaux aliments », c’est-à-dire les denrées alimentaires très peu ou pas consommées avant 1997 ( COM(2007) 872 final ).

     

     

    La définition inclut notamment « les aliments issus de végétaux et d'animaux produits au moyen de techniques de reproduction non traditionnelles et les aliments modifiés au moyen de nouveaux procédés de production tels que les nanotechnologies et les nanosciences, qui peuvent avoir un effet sur les aliments ». Bien que le mot « clone » soit évité (certainement pour ne pas faire de remous et inquiéter les consommateurs), il est difficile de penser que les nouveaux aliments dans cette définition n’incluent pas les produits issus de clonage. La proposition consiste à remplacer la procédure d’autorisation actuelle (évaluation initiale par un État membre et transmission pour avis aux autres États) par une procédure d’autorisation européenne : la demande d'autorisation sera adressée à la Commission et l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) effectuera l'évaluation scientifique du produit.

     

     

    Cette annonce a de quoi étonner alors que le débat sur les OGM continue, que la consultation lancée par l’EFSA vient à peine de débuter et que, de manière générale, l’opinion publique est très méfiante à l’égard des « nouveaux aliments ». Pourquoi tant de précipitation ?

     

     

    Du coup, le Groupe européen d’éthique des sciences et des nouvelles technologies (GEE), une instance composée de 15 experts pluridisciplinaires nommés par la Commission européenne, fait irruption dans le débat de façon éclatante par un avis du 16/01 . Le communiqué qui présente cet avis à la presse exprime les doutes du Groupe sur la conformité à l’éthique du clonage animal à des fins alimentaires « compte tenu de l'ampleur actuelle des souffrances et des problèmes de santé des animaux porteurs et des animaux  clonés » et  affirme ne « pas voir d'arguments convaincants justifiant la production de nourriture à partir de clones et de leur progéniture ».

     

     

    De quoi faire réfléchir la Commission européenne et opter pour l’attentisme sans doute. Mais il reste la menace d’une riposte des Etats-Unis qui pourraient déposer une plainte devant l’Organisation Mondiale du Commerce, grossissant ainsi le contentieux déjà fourni entre l’Union  et les Etats-Unis (notamment sur les restrictions européennes aux OGM).

     

    Domaguil