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Humeur - Page 2

  • Le Mécanisme européen de stabilité (MES) pour les nuls ou par des nuls?



    Une rubrique que j'avais un peu laissée en plan (elle est pourtant inépuisable) : celle des Pinocchio qui nous racontent l'Europe à leur façon. Aujourd'hui au menu des bobards et galéjades: une video quelquefois appelée sur le web "le M.E.S pour les nuls" (le MES étant le mécanisme européen de stabilité dont le traité institutif a été récemment ratifié par le parlement français). Sur youtube, elle s'intitule très sobrement et sans exagération aucune (!) : M.E.S le nouveau dictateur européen.


    Comment? me dis-je, nous sommes  dans une dictature européenne et je ne m'en suis pas aperçue? Ce que je peux être distraite tout de même. D'autant que le fait que le MES soit qualifié de "nouveau'" fait supposer qu'il y en a d'autres. C'est effrayant.

    On doit, à ce qu'il parait, cette video à un groupe de journalistes allemands "Abgeordneten-check" qui prouvent ainsi qu'en terme de professionnalisme le journalisme aujourd'hui a des progrès à faire. Par contre, en terme de propagande, ça va bien, merci pour eux (vu le nombre de personnes qui se laissent prendre).


    La video ne dure que 3 mns 50 environ, ce qui est cependant déja trop.
    Une voix masculine nous énonce quelques dispositions du traité du MES et une voix féminine joue la candide en posant des questions qui se veulent simples et de bon sens, un chouïa orientées, du genre : mais alors, le M.E.S c'est un gros vilain? (je caricature à peine). C'est cela l'avenir de l'Europe? Une UE sans souverainetés démocratiques? et patati et patata. Allez répondre oui à des questions posées en ces termes! Je peux comprendre que les internautes qui voient la video soient consternés. Mais ce que je ne comprends pas c'est qu'ils ne cherchent pas à savoir si c'est vrai ou franchement "à coté de la plaque".

    Plongeons dans le grand n'importe quoi:

    - Notre candide se désole que les états s'engagent irrévocablement et sans conditions à contribuer au capital du M.E.S. Et se lamente: tout nouveau parlement élu sera lié par ce traité.

    Mais, chère candide: cela s'appelle le respect des traités internationaux signés et ratifiés. La Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités l'exprime clairement
    : "Tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi". Et à ce principe s'en ajoute un autre, celui qu'un traité régulièrmeent conclu et ratifé par une majorité au pouvoir dans un pays se poursuit si une autre majorité la remplace, en application d'un principe de continuité de l'état. Le traité instaurant le MES prévoit donc tout simplement que les états doivent tenir leurs engagements. Il est étonnant que l'on s'en étonne (ils sont journalistes où, les Abgeordneten-check: à la gazette de Rüdesheim?).

    Certes, un état peut revenir sur un engagement international en vertu de l'idée de souveraineté mais en pratique la dénonciation d'un traité est rarement utilisée parce que c'est difficile (certains traités ne la prévoient pas il faut donc négocier) et parce qu'on peut s'imaginer l'insécurité qui serait créée si à chaque fois qu'une majorité changeait dans un pays elle revenait sur les traités conclus par ses prédecesseurs et si tous les pays pratiquaient la girouette juridique. A l'exrême cette hypothèse conduirait à la fin de tous les traités :  finies l'ONU et ses agences, finis les accords commerciaux, finis les traités de coopération internationale, les traités de désarmement.

    Dans le cas particulier du MES, l'appartenance d'un pays à cette organisation est liée au fait d'être membre de la zone euro. Vouloir sortir du MES, implique la sortie de l'euro. Ce n'est pas impossible, mais les conséquences sont lourdes car, comme rien n'est prévu dans les traités européens pour sortir de l'euro cela ne peut se faire, d'un point de vue juridique, qu'en utilisant la possibilité de retrait plus large donnée par le traité de Lisbonne, donc en sortant de l'Union européenne.


    - Le capital du MES est fixé à 700 milliers d'euros souscrit par les états membres de la zone euro selon une clé de contribution qui tient compte du poids économique.

    Candide s'interroge: 700 milliards ce n'est que le début? Le MES peut exiger plus quand il veut? Sans limite? Elle laisse ainsi entendre que le MES pourrait demander des contributions sans cesse croissantes aux états de son propre chef et que ceux-ci devraient payer toujours plus pour satisfaire l'ogre MES qui  dévorerait tous nos avoirs.

    C'est une présentation très biaisée et malhonnête. Les appels de fonds sont décidés par les états eux-mêmes puisqu'ils ont un chacun un siège au conseil des gouverneurs qui prend ces décisions, d'un "commun accord" (unanimité). Ces appels sont limités à la part de chaque état dans le capital du MES, et les 700 milliards ne  ne sont pas débloqués en intégralité. Seule une part est versée par les états:  au total, ce capital libéré représente 80 milliards d'euros.
    Tout nouvel appel de fonds (dans la limite de la contribution qui a été fixée pour chaque pays) nécessitera donc un vote unanime du conseil des gouverneurs (des états), sauf cas d'urgence qui justifie que les états libérent les fonds dans les sept jours si possible (risque de défaut de paiement du M.E.S)
    Quant à l'éventualité d'une augmentation du capital du MES, au dela des 700 miliards, il s'agit d'une modification du traité qui nécessiterait un vote unanime du conseil des gouverneurs (états) et ensuite une ratification au niveau national (parlement, en France, ou referendum éventuellement).
    On est donc plutôt loin d'un MES qui pourrait exiger plus de 700 milliards quand il veut, sans limites, etc...comme le laisse entendre la video.

    - Et les procès d'intention continuent : candide s'offusque ensuite que le MES puisse "intenter des procédures juridiques", que ses propriétés jouissent d'immunités (protégées contre des expropriations, des réquisitions) que ses membres soient "protégés contre des procédures juridiques quant à leur action" (traduisons: immunité). Et elle s'indigne: comment? Le MES peut accuser autrui mais ne peut être accusé lui-même? Il est protégé contre nos gouvernants, nos administrations, et nos lois démocratiques par ces immunités?

    Voyons quelles sont les règles dénoncées par notre candide:

    " ARTICLE PREMIER PERSONNALITE JURIDIQUE
    SECTION 1. L'Organisation...possède la personnalité juridique. Elle a la capacité :
    a) de contracter ;
    b) d'acquérir et de vendre des biens immobiliers et mobiliers ;
    c) d'ester en justice

    ARTICLE II BIENS, FONDS ET AVOIRS
    SECTION 2. ...ses biens et avoirs, quels que soient leur siège et leur détenteur, jouissent de l'immunité de juridiction,
    SECTION 3. Les locaux...sont inviolables. Ses biens et avoirs, où qu'ils se trouvent et quel que soit leur détenteur, sont exempts de perquisition, requisition, confiscation, expropriation ou de toute autre forme de contrainte executive, administrative, judiciaire ou législative.
    SECTION 4. Les archives .. et, d'une manière générale, tous les documents lui appartenant ou détenus..., sont inviolables, où qu'ils se trouvent.

    ARTICLE IV REPRESENTANTS DES MEMBRES
    SECTION 11. Los représentants des Membres auprès des organes principaux et subsidiaires  jouissent, durant l'exercice de leurs fonctions ...des privilèges et immunités suivants :
    a) immunité d'arrestation personnelle ou de détention et de saisie de leurs bagages personnels et, en ce qui concerne les actes accomplis par eux en leur qualité de représentants (y compris leurs paroles et écrits),- immunité de
    toute juridiction;
    b) inviolabilité de tous papiers et documents;
    ...
    f) les mêmes immunités et facilités en ce qui concerne leurs bagages personnels que celles accordées aux agents diplomatiques, et également
    g) tels autres privilèges, immunités et facilités non incompatibles avec ce qui précède dont jouissent les agents diplomatiques..."
    Etc, etc, etc...

    Ah oui, c'est bien ce que reproche candide au MES.

    Sauf que...ces règles sont extraites de la Convention sur les privilèges et immunités des...Nations Unies (Convention on the Privileges and Immunities of the United Nations, New York, 13 February 1946)

    Ca alors : ce sont les mêmes dispositions (en plus détaillées encore) que dans le traité qui crée le MES!

    Et on peut faire la même remarque pour les privilèges des institutions spécialisées de l'ONU (Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, du 21 novembre 1947, articles  II,III, V notamment)

    Donc, si on croit les auteurs de la video :
    La Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED): dic-ta-tu-re; l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture  (UNESCO): dic-ta-tu-re, le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés: dic-ta-tu-re, l'Organisation mondiale de la santé: dic-ta-tu-re, dic-ta-tu-re, dic-ta-tu-re on vous dit! Et la liste est longue! Sans rire, on y trouve aussi cette très dangereuse dic-ta-tu-re qu'est l'Organisation météorologique mondiale (OMM). Celle-là, il faut vraiment s'en méfier: à la lanterne, les météorologues!.

    Les "journalistes" qui ont commis la video, décidément peu informés, ont tout simplement découvert, ou fait semblant de découvrir, un statut qui s'est développé...depuis l'Antiquité, d'abord au profit des agents diplomatiques, puis des organisations internationales lorsque celles-ci ont été créées, afin de leur permettre de remplir leur mission sans être sous la pression ou soumis à l'arbitraire de l'administration du pays hôte et de garantir leur indépendance en leur évitant des représailles, des procès politiques, par exemple. Or, le MES est une organisation internationale (ça a échappé aux auteurs de la video?).

    Précision: l'activité du MES, est sous le contrôle de la Cour de justice de l’Union européenne qui est compétente pour trancher les litiges qui peuvent l'opposer à un Etat membre.

    Pour ceux que cela intéresse: le commentaire du M.E.S (avec les références aux articles et le texte du traité) est sur le site eurogersinfo.

    Domaguil

  • Diafoirus européens

     


    Personnage de la pièce de Molière, « le malade imaginaire », Diafoirus est le prototype de ces médecins que brocarde l’auteur : des incompétents qui cachent sous un jargon incompréhensible une abyssale ignorance.

    Leur façon très particulière de « soigner » - d’achever le malade – me fait penser aux Diafoirus européens qui sont au chevet de la Grèce, cette Grèce qui est le berceau, ne l’oublions pas, de notre Europe. On devrait se sentir touché par ce qui arrive à nos compatriotes européens grecs (j’emploie à dessein ces termes qui paraîtront à certains incompatibles) et mettre en application le principe, oh combien impératif, aujourd’hui plus que jamais, de solidarité entre peuples de cette union « unie dans la diversité « . C’est d’ailleurs le cas : l’aide apportée à la Grèce par l’UE et le FMI  s’élève à 110 milliards au titre du premier plan de sauvetage décidé au printemps 2010 et à 109 milliards au titre du deuxième plan décidé en 2011 qui n’est pas encore finalisé, l’Union européenne attendant de la Grèce des garanties sur sa volonté d’appliquer les réformes (l’accord est escompté pour lundi). La Grèce devrait aussi bénéficier de la possibilité de faire défaut partiellement puisque les créanciers privés ont accepté (sous la pression de lUnion européenne) de renoncer à 50% de leur créance (soit environ 100 milliards d’euros). 

    Mais pourquoi ces plans de sauvetage non seulement ne fonctionnent-t-ils  pas mais encore provoquent la détestation de ceux qu’il sont sensés aider ?

    Peut-être parce que nos Diafoirus ont oublié que le but des gouvernants doit être l’intérêt général, celui de la population et son bien-être. Quels enseignements ont-ils tiré de ces deux dernières années de tourmente ? On peut se poser la question, à l'écoute de leur discours qui consiste à montrer du doigt les vilains petits canards de l’Europe, et à soumettre leur soutien à des conditions tellement draconiennes que de plus en plus nombreux sont les économistes qui annoncent que l’austérité prônée par nos dirigeants tue dans l’œuf toute perspective de croissance. Et pas seulement les économistes : dans une intervention devant le Parlement européen, le 15 février dernier,  le Premier ministre italien a souligné la « dureté » avec laquelle  la Grèce est traitée. Il n’est pas très ordinaire ni anodin de voir un chef de gouvernement d’un grand pays de l’UE prendre ses distances avec la politique du bâton que supporte la Grèce.

    Certes, la Grèce est responsable de sa situation. Certes, les gouvernements grecs ont triché et maquillé leurs comptes (et la Commission européenne en 2004 avait tiré la sonnette d’alarme en proposant une procédure pour déficit excessif que les états s’étaient empressés de bloquer). Certes, les grecs ne s’en sont pas inquiété tant qu’ils ont pu tirer bénéfice de ce système dépensier et corrompu (on n’a pas beaucoup vu de manifestations contre les gouvernants dans ces années où la prospérité, relative, reposait non sur la production de richesses, mais sur un endettement croissant). Certes, les armateurs et l’église orthodoxe bénéficient d’un statut privilégié qui les exempte des obligations qui pèsent sur le commun des mortels. Certes, ce même commun des mortels  s’est bien accommodé d’un système d’évasion fiscale qui au final profitait, même si à des degrés très différents, à une majorité. Certes, il est normal de demander à la Grèce à qui l’on prête des sommes colossales de faire en contrepartie des efforts pour mettre de l’ordre dans ses finances. Certes, certes, certes…

    Mais une fois cela dit, quelle conclusion en tirer ? 

    Celle qu’il faut punir ce pays en lui imposant une purge, quelles qu’en soient les conséquences humaines ?.
    Laissons là cette vilaine idée à laquelle pourraient nous faire croire les discours de certains,  et considérons que le but est, évidemment, d’aider les grecs à sortir de cette crise (ce faisant, nous nous aidons nous-mêmes, car la déstabilisation de la zone euro que provoque cette chute sans fin a des conséquences négatives pour tous les pays qui en sont membres). Mais alors, on ne peut que constater : Que les plans de sauvetage de la Grèce ne peuvent pas produire de résultats immédiats. Que les investisseurs et/ou spéculateurs qu’ils sont sensés rassurer ne sont pas « rassurés ». Que la population s’enfonce dans la misère, accablée par des plans d’austérité successifs qui consistent à vouloir pomper de l’eau dans le désert. Que la violence gagne du terrain en réponse à la violence sociale qui laisse les grecs démunis, sans perspectives, sans espoir.

    Et face à cette situation extrême que font nos éminents gouvernants ? S’interrogent-ils sur la pertinence de leur stratégie ? Envisagent-ils au moins de l’infléchir, d’y apporter des corrections ? Droits dans leurs bottes, ils persistent et signent :pas question de changer de remède, peu importe s’il tue le malade.

    Et des dégâts il y en a déja.
    Sur les populations d’abord. Pas besoin d épiloguer : on le voit tous les jours.
    Sur l’Union européenne ensuite: ce ne sont pas les eurosceptiques, ni les souverainistes, ni la gauche internationaliste qui la font courir à sa perte, mais bien les défenseurs de ce que l’on appelle l’ultra libéralisme, pour lesquels la loi du marché est l’alpha et l’omega de l’organisation sociale. On les voit à l’œuvre dans les états et au Conseil où ils siègent, à la Commission européenne, au Parlement européen. Incapables de se remettre en cause, ils vendent leur kit prêt à penser avec une bonne conscience qui semble inaltérable.
    Malheureusement, l’Union européenne leur a donné un champ d’action où s’ébrouer à loisir. Une mesure de salubrité publique serait de les en déloger, et de retrouver l’ambition du projet européen rappelé dans les traités qu’ils ont appliqué de façon – très – sélective. .
    Article 2 du traité sur l'Union européenne
    L'Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d'égalité, de l'État de droit, ainsi que de respect des droits de l'homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l'égalité entre les femmes et les hommes.
    Article 3
    (ex-article 2 TUE)
    L'Union a pour but de promouvoir la paix, ses valeurs et le bien-être de ses peuples…Elle oeuvre pour le développement durable de l'Europe fondé sur une croissance économique équilibrée et sur la stabilité des prix, une économie sociale de marché hautement compétitive, qui tend au plein emploi et au progrès social, et un niveau élevé de protection et d'amélioration de la qualité de l'environnement. Elle promeut le progrès scientifique et technique.  Elle combat l'exclusion sociale et les discriminations, et promeut la justice et la protection sociales, l'égalité entre les femmes et les hommes, la solidarité entre les générations et la protection des droits de l'enfant. Elle promeut la cohésion économique, sociale et territoriale, et la solidarité entre les États membres. Elle respecte la richesse de sa diversité culturelle et linguistique, et veille à la sauvegarde et au développement du patrimoine culturel européen.

    L’Union européenne est ce que l’on en fait. Des politiques à courte vue l’instrumentalisent, hier pour en faire le vaisseau amiral d’une politique du tout marché, aujourd’hui pour lui faire endosser la responsabilité de la potion administrée par les docteurs Diafoirus modernes.

    Ce n’est pas une fatalité. Elle peut être un merveilleux instrument de prospérité et de solidarité, forte de ses 500 millions d’habitants, de ses 27 membres parmi lesquels se trouvent – encore – certaines des plus grandes économies mondiales et des pays en plein développement .

    Encore faut-il que les citoyens le veuillent et qu’ils mettent fin à la carrière de ceux qui ont galvaudé et continuent de galvauder le projet européen. Parce que ce que les électeurs ont fait, les électeurs peuvent le défaire.

    Domaguil

  • Martin Schulz, nouveau Président du Parlement européen

     

    Le social démocrate allemand Martin Schulz a été élu Président du Parlement européen le 17/01/2012. Il exercera son mandat durant les deux ans et demi à venir, avant les nouvelles élections, conformément à l'accord qui était intervenu entre le groupe socialiste et le groupe conservateur à la suite des dernières élections. Les deux groupes majoritaires du PE avaient convenu de se partager la présidence de l'Assemblée en partageant le temps de mandat (5 ans) en deux. C'est ainsi que Martin Schulz succède au polonais conservateur Jerzy Buzek.

    Dans son discours, Martin Shulz a rappelé la période agitée que traverse l'Union européenne : "pour la première fois depuis la création de l'Union européenne, l'échec de celle-ci apparaît comme un scénario réaliste". La crise de la dette souveraine dans la zone euro n'est pas seule en cause. Le fossé se creuse entre les européens et les institutions communautaires: "Nous devons être conscients que les Européens sont moins intéressés par les débats institutionnels que par l'avenir de leurs enfants, leurs emplois, leur retraite, la justice sociale....Nous allons les écouter davantage! Cette Assemblée est bien le lieu où sont représentés les intérêts des gens, où siègent les délégués du peuple européen". Ce n'est pas aux états qu'il faut confier la responsabilité des décisions communes sur la base de procédures intergouvernementales qui reflètent une "politique européenne qui semblait dépassée depuis longtemps, à savoir l'époque du Congrès de Vienne, au XIXe siècle". A cette dérive qui consiste "à imposer ses intérêts nationaux, et ce sans contrôle démocratique",  Martin Schulz oppose l'intégration européenne : "la règle fondamentale est la méthode communautaire. Ce n'est pas un terme technique, mais l'âme même de l'Union européenne!". Car c'est par l'union que la crise sera surmontée: "nos intérêts ne peuvent plus être dissociés de ceux de nos voisins, sur l'idée que l'Union européenne n'est pas un jeu à somme nulle dans lequel l'un doit perdre pour que l'autre gagne. C'est exactement l'inverse: soit nous perdons tous, soit nous gagnons tous".

    Le discours fut bref mais énergique, un discours de combat en quelque sorte pour que la parole du Parlement européen soit entendue et prise en compte. La controverse sur le projet de traité intergouvernemental d'union économique renforcée montre que le bras de fer avec les états est engagé. 
    Le Parlement européen se veut la voix et l'avocat des citoyens.
    Il devra être aussi l'avocat d'une intégration européenne mise à mal par des gouvernants bornés et/ou démagogues. En aura-t-il les moyens et la volonté?

    Domaguil

  • De l'audace

     

    "il nous faut de l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace" : c'est ainsi qu'en septembre 1792, Georges Danton exhorte les députés à ne pas fuir l'armée de la coalition qui marche sur Paris et à contrattaquer.


    En nos temps modernes si obscurs, alors que les fascistes et les xénophobes aboient leur haine de l'étranger et de la liberté, alors que les démagogues caressent l'opinion dans le sens du poil pour grapiller les miettes de pouvoir que leur concèdent les marchés, alors que les nationalistes cultivent la peur et la nostalgie de temps révolus, l'exhortation de Danton me parait plus que jamais d'actualité.

    Car de l'audace il en faudra pour défendre l'une des plus belles réalisations de ces dernières décennies, la construction européenne. Il est à la mode aujourd'hui de montrer un scepticisime qui se veut lucide et qui n'est souvent que conformiste face à l'Union européenne, quand ce n'est pas de la charger de tous les maux qui nous accablent. C'est pourtant grâce à elle que des pays qui ont passé le plus clair de leur histoire à se faire la guerre cohabitent, coopèrent et vivent ensemble en paix. C'est pourtant grâce à elle que les territoires se sont désenclavés et développés plus vite qu'ils ne l'auraient fait avec la seule solidarité nationale (la Bretagne, l'Auvergne et le Limousin pour ne citer que ces régions en France doivent savoir ce qu'elles lui doivent). C''est toujours grâce à elle que des créateurs d'entreprise ont trouvé des aides, que des chercheurs ont financé leurs travaux, que des étudiants ont poursuivi et enrichi leur formation dans d'autres pays. C'est parce qu'elle existe que nous pouvons voyager, résider, travailler dans un territoire continent et nous sentir un peu chez nous partout dans ses pays membres, ce qui est encore plus vrai dans ceux avec qui nous partageons la monnaie commune. L'Union européenne n'est pas un ou le problème, elle est la solution.

    Mais encore faut-il se souvenir de qui nous sommes et d'où nous venons Dans les traités européens, le progrès social, la solidarité, le vouloir vivre ensemble "unis dans la diversité" sont autant de valeurs que nos gouvernants ont rejetées, imposant une vision étriquée de l'Union, zone de libre échange et de coopération intergouvernementale sous l'influence du libéralisme anglo saxon. On voit où cela nous a menés. Il est temps, pour ceux qui nous gouvernent aussi de faire preuve d'audace et de cesser de se prosterner devant des marchés supposés tout puissants et devant des opinions publiques que l'on vénère parce que la démocratie des citoyens a fait place à la dictature de l'opinion. Il est temps de montrer que ce n'est pas en appliquant les solutions du passé à des temps nouveaux que l'on sortira de l'ornière mais en faisant preuve de liberté d'esprit, en s'affranchissant des a priori idéologiques qui conduisent les uns à proner une rigueur budgétaire sans autre perspective ni pendant, d'autres à prêcher le repli sur soi, d'autres encore à oublier que les cigales aussi doivent affronter tôt ou tard l'hiver. L'Union européenne ne se résume pas au grand marché elle ne se résume pas à l'union budgétaire. Elle doit être le cadre dans lequel se prépare l'avenir grâce à des investissements dans les forces vives qui la composent (éducation, formation, recherche, cohésion sociale) et dans des projets de dimension européenne qui la structurent. Ce qui implique qu'ele doit avoir un budget et des ressources propres à la mesure de ses missions. Elle doit être le cadre d'un nouveau pacte social pour que la diversité des pays qui la composent ne soit pas un ferment de dissensions et une source de dumping et de concurrence déloyale mais un aiguillon pour que la solidarité et l'entraide des pays permette le progrès de tous. Ce qui implique qu'elle doit développer sa politique sociale et harmoniser les règles de travail et la fiscalité. Elle doit être capable de parler d'une seule voix ce qui implique qu'elle réforme ses institutions de manière à promouvoir celles qui sont garantes de l'intérêt communautaire, la Commission et le Parlement européen, sous le controle des électeurs. En d'autres termes, elle doit franchir le pas fédéral. Elle mérite mieux, nous méritons mieux, que des gouvernants nationaux gestionnaires à la petite semaine d'une crise qui demande de faire preuve de, quoi donc déja, ah oui: "de l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace". Dans sa harangue, Danton conclut: " et la France est sauvée". Aujourd'hui, la France ne pourra être sauvée que si l'Union est sauvée.


    Bonne et heureuse année à vous

    Domaguil