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  • Quelles ressources budgétaires pour l'Union européenne?

     Lors de la création des trois communautés européennes (Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA) dès 1951, Communauté économique européenne et Communauté européenne de l’énergie atomique en 1957), les fondateurs de celles-ci avaient décidé de d’alimenter leur budget par des ressources propres.

    En 1970, A l’origine, le budget communautaire était financé par les droits de douane perçus aux frontières extérieures sur les importations en provenance de pays tiers. A ces ressources que l’on appelle les ressources propres traditionnelles, s’ajoutaient les montants non dépensés de l'année précédente et les recettes directes de l'UE qui proviennent des impôts acquittés par son personnel, des amendes imposées aux entreprises pour infraction aux règles de concurrence, etc. Les recettes étaient complétées par un prélèvement sur la TVA (appliqué depuis 1979) qui consiste à transférer à la Communauté une proportion de la TVA perçue par les États membres (de l’ordre de 1%).

    Au fil des années, le montant des ressources propres traditionnelles a diminué à mesure de la libéralisation des échanges commerciaux mondiaux négociée dans le cadre de l’Organisation Mondiale du Commerce (ex : GATT). La baisse des droits de douane a ainsi a privé la Communauté européenne de sa principale ressource.

    Pour y pallier, le Conseil européen de Bruxelles a décidé en février 1988 de créer une « quatrième ressource » calculé au prorata de la richesse des états. Il s’agit donc d’un prélèvement sur le Produit National Brut (PNB) des Etats membres qui sera remplacé par la suite par un prélèvement sur le Revenu National Brut (RNB). La décision de 1988 précise également que l’ensemble des ressources propres ne peut excéder un plafond exprimé en pourcentage du total des PNB , des Etats membres: d'abord fixé à 1,15%, ce plafond a été porté à 1,24%.

    Dès lors, la progression du budget communautaire se trouve entravée, alors que paradoxalement on demande à l’Union européenne d’intervenir dans des domaines croissants, et dépendante des contributions nationales par le biais de la « ressource RNB » . La conséquence est connue : on brocarde l’impuissance de l’Union, et les états cyniquement peuvent lui reprocher des insuffisances dont ils sont la cause tout en dénonçant (vieille recette démagogique) le « coût » excessif de cette Union et en réclamant un « juste retour » qui est l’antithèse de l’esprit communautaire. On connaît en effet cette pratique qui consiste pour les dirigeants d’un pays à comparer ce qu’il reçoit de l’UE à sa contribution au budget communautaire et à s’indigner bruyamment devant son opinion publique que les deux ne coïncident pas (au moins).  Et, alors que le budget pour 2011 est en négociation et que les futures  perspectives financières pour la période 2014-2020 vont l’être également, certains Etats membres demandent une réduction de leur contribution aux prochains budgets communautaires.

    La solution semble donc évidente : il faut revenir à un système de ressources propres. Mais comme il n’est plus possible de compter sur le produit des droits de douane, la question est de savoir par quoi les remplacer.

    L’accord interinstitutionnel du 17/05/2006 a fixé le cadre financier pluriannuel en cours 2007-2013 après des négociations ardues qui n’ont abouti à un accord que grâce à l’insertion d’une clause prévoyant une réforme d’ensemble du système budgétaire communautaire couvrant tous les aspects des dépenses de l’UE, y compris la PAC, et des ressources, y compris la compensation en faveur du Royaume-Uni (le rabais obtenu par Madame Thatcher). Cette réforme doit avoir lieu à l’occasion de la discussion et de l’adoption des prochaines perspectives financières.

    Le commissaire européen au budget, Janusz Lewandowski, a troublé la tranquillité estivale en proposant un impôt européen. Ce n‘est qu’une des pistes possibles, la Commission européenne étudiant actuellement différentes options comme une taxe sur les transactions financières, un prélèvement sur le transport aérien, une taxe sur les émissions de CO2, une TVA européenne séparée... Du côté des eurodéputés on réfléchit aussi .

    Parmi eux, le Président de la commission des budgets du Parlement européen, le député Alain Lamassoure. Dans un article du 29/03/2010, celui-ci propose trois pistes : la TVA paraît « la solution la plus simple sur le plan technique et, sans doute, également sur le plan politique » estime-t-il, en expliquant : «  Il suffirait de dire, par exemple, que le taux de base français passe de 19,6% à 17,6%, en donnant à l’Union (Conseil et Parlement) le droit de lever jusqu’à 2 points de TVA ». En contrepartie, la contribution du budget national au budget communautaire serait supprimée

    Une autre solution (celle qui serait certainement « la plus populaire chez les citoyens ») serait d’affecter au budget communautaire une part des ressources tirées de l’imposition des bénéfices. Alain Lamassoure souligne qu’elle « présuppose une condition politique qui ajoute à la fois un intérêt et une difficulté : car elle ne serait possible qu’une fois réalisé le préalable de l’harmonisation des bases de l’impôt, de la définition du bénéfice imposable. Le travail technique préalable a été fait par la Commission européenne après dix ans d’efforts. La parole est désormais aux politiques. Les pays favorables à la « concurrence fiscale » ne peuvent pas sérieusement s’opposer à une réforme qui rendrait cette concurrence loyale et transparente, ce qu’elle n’est guère aujourd’hui ».

    Enfin la troisième piste qui pourrait être explorée est celle d’une fiscalité « verte ».

    L’idée d’un impôt européen pourrait s’imposer malgré les réticences et les chamailleries des états si elle permettait les citoyens y voyaient l’occasion d’avoir un contrôle dans la mesure où leur contribution au budget communautaire serait visible, ce qui n’est pas le cas dans le système, opaque, de la contribution RNB.

    Pour l’instant l’idée d’impôt européen est combattue par plusieurs états qui craignent de perdre de leur compétence fiscale. Mais l’alternative, la nécessité de faire des économies, n’est guère moins conflictuelle, car au détriment de quelle politique vont-elles devoir être faites ? Chaque état a son idée sur ce point et elles ne sont guère conciliables. Le contexte n’est donc pas forcément si défavorable pour parvenir à un accord entre les institutions européennes. Faute de quoi, le Parlement peut très bien refuser de voter le budget ou, plus probabement, subordonner son accord à l'ouverture de négociations avec le Conseil sur la création de nouvelles ressources propres.

    Domaguil

  • Un budget européen bien modeste

    La discussion du budget communautaire cette année sera un moment important de la vie politique de l’Union européenne.

     Avec la stratégie « Europe 2020 », l’Union européenne a repris la plupart des objectifs de la précédente stratégie (stratégie dite de Lisbonne qui a échoué) : stimuler la croissance par des actions résolues en faveur de politiques et d’investissements porteurs d’avenir : recherche, éducation, « économie verte ». La réussite de cette stratégie dépendra en premier lieu des moyens affectés, qu’il s’agisse du budget communautaire ou des moyens nationaux en complémentarité avec les crédits européens. Mais la crise et les restrictions budgétaires décidées par les pays pour venir à bout de déficits excessifs, n’est pas favorable à l’augmentation des crédits dont disposeront les institutions européennes, alors même que leurs tâches se sont alourdies (par exemple ; nouvelles compétences de l’Union en matière d’énergie ou d’action extérieure, avec le Service européen pour l’action extérieure (SEAE), ou encore Fonds européen de stabilisation financière).

    Le traité de Lisbonne met le Parlement européen et le Conseil sur un pied d’égalité dans la procédure budgétaire en ce qui concerne le vote des dépenses, dans la mesure où il supprime la distinction entre les dépenses obligatoires (sur lesquelles le Conseil avait le dernier mot) et les dépenses non obligatoires (dernier mot pour le Parlement). A l’issue de la procédure le Parlement européen peut bloquer l’adoption du budget. Il peut aussi surmonter l’opposition du Conseil à la majorité de ses membres et aux trois cinquièmes des suffrages exprimés.

    Le Conseil garde cependant tout pouvoir sur les recettes, c’est à dire les ressources de l’Union européenne qu’il vote à l’unanimité après consultation du Parlement européen. Comme le budget européen doit être voté à l’équilibre, cela signifie que le Parlement n’a pas intérêt à voter des dépenses excessives qui de toute façon ne seront pas financées si les recettes ne sont pas suffisantes. Il peut, en revanche, affecter différemment les crédits. Les états doivent donc tenir compte de cette nouvelle arme qui est donnée à l’assemblée.

    Or, les dissensions existent entre le Conseil et le Parlement

    Pour les états, l’heure n’est pas à l’augmentation des crédits du budget de l’Union mais au « redéploiement » de ceux-ci, ce qui ne laisse pas d’inquiéter sur le sort de certaines politiques communes. Le 12/08/2010, le Conseil a arrêté sa position sur le budget européen pour 2011. La crise et la nécessité de rigueur budgétaire qu’elle impose aux gouvernants sert de prétexte à une volonté de stagnation voire de réduction des crédits affectés aux politiques et actions communes. Le budget 2011 approuvé par le Conseil s'élève à 141 777 milliards d'euros en crédits d'engagement et il représente… 1,02 % du produit national brut (PNB) de l'UE.

    Des chiffres à comparer, par exemple, avec ceux du projet de budget français pour 2011: 356,9 milliards d’euros (deux fois et demi plus important que le budget de l’Union, donc), et un déficit de 92 milliards d’euros. Le seul déficit représente donc l’équivalent de plus de la moitié du budget européen en 2011, sachant que, en 2010, le déficit français (152 milliards) était à lui seul supérieur au budget européen ! Et certains voudraient nous faire croire que l’UE est un gouffre financier. Fort heureusement pour eux, le ridicule ne tue pas.

    Par rapport au budget antérieur, le budget 2011 présente une augmentation limitée des crédits d'engagement de 0,22 % . Par rapport au projet de la Commission européenne, les crédits d’engagements sont réduits de 787,83 millions d'euros et les crédits de paiement sont diminués de 3,609 milliards d'euros. La plupart des postes passent à la moulinette du Conseil sauf la rubrique « Cohésion pour la croissance et l'emploi » pour laquelle les crédits d’engagements prévus par le projet de budget sont maintenus. Les crédits de paiement sont en revanche réduits de 1075 millions d'euros, cette réduction touchant le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen, et l'achèvement des programmes précédents. En ce qui concerne la compétitivité pour la croissance et l'emploi, les crédits d’engagement prévus par la Commission sont réduits de 46,55 millions d'euros par le Conseil et les crédits de paiement subissent une réduction de 891,14 millions d'euros dont 545,97 millions d'euros dans le domaine de la recherche. Autres crédits réduits par le Conseil, ceux de l’administration, avec, en particulier, le refus de certaines augmentations de salaires, le refus de création de nouveaux postes, à l'exception de ceux prévus pour le Conseil européen, et la réduction des crédits proposés pour les agences décentralisées. Là encore "une remise à l’heure des pendules" de certains s’impose : les dépenses d’administration représentent 6,4 % du budget, une proportion minime par rapport aux seules dépenses de personnel du budget de l’état français.

    Car le budget européen est essentiellement un budget d’intervention que ce soit par le biais de la PAC ou de la politique de cohésion et d’emploi. Toucher aux crédits n’affectera donc pas ou peu le fonctionnement de l’Union mais beaucoup ses actions sur le terrain pour soutenir le développement  économique et social des  pays membres. Est-ce bien raisonnable en période de crise ? Pas selon le Parlement européen qui dans une résolution du 25 mars 2010 présentant les priorités budgétaires met l’accent sur les programmes européens de recherche-développement et des réseaux de transport, et sur la nécessité de financer de façon suffisante l’action extérieure de l’Union européenne. Une attention particulière doit être portée, selon les eurodéputés, aux investissements et programmes en faveur des jeunes et à la lutte contre le changement climatique. Pour les eurodéputés, il faut financer les besoins budgétaires nouveaux liés notamment aux compétences nouvelles de l’Union. Ce qui laisse augurer de passes d’armes avec le Conseil, les états étant sur une position défensive d’économies, le Parlement au contraire privilégiant le financement de politiques qu’il considère d’avenir et défendant, avec logique, la nécessité de mettre en rapport tâches nouvelles et financements pour les exercer.

    Domaguil

     

  • Nuages sur le monopole des notaires français

    L’étau se resserre autour des notaires français dont on a vu  qu’ils sont menacés de devoir renoncer à leur monopole au nom de la libre prestation de services. Les différents états dont les législations sont attaquées devant la Cour de Justice de l’Union européenne, justifient les restrictions d’accès à la profession de notaire par le fait que ceux-ci participent à l’exercice de l’autorité publique. C’est le cas de la France qui refuse l’accès à la profession à des ressortissants d’autres états membres pour ce motif. Un argument qui n’a pas convaincu la Commission européenne qui a introduit un recours en manquement contre la France et six autres pays membres.

    L’argument ne semble pas  non plus convaincre l’Avocat Général qui dans ses conclusions du 14/09/2010 estime qu’il serait nécessaire « non seulement de déterminer si une activité participe à l’exercice de l’autorité publique, mais également de rechercher ci-après si la mesure étatique contestée peut être justifiée, à la lumière du principe de proportionnalité, par les objectifs poursuivis… » (l’exercice d’activités participant même à titre occasionnel, à l’exercice de l’autorité publique). La première question à se poser est donc de savoir si les notaires dans leur activité participent effectivement à l’exercice de l’autorité publique (en authentifiant les actes juridiques). La seconde est de savoir si une discrimination fondée sur la nationalité peut être justifiée compte tenu du particularisme de cette activité. L’Avocat Général ne nie pas que les notaires participent, du moins dans certains de leurs actes, à l’exercice de l’autorité publique, mais il estime qu’aucune des garanties exigées de la profession de notaire ni aucune des spécificité de cette profession « ne justifie que le statut de ses membres intègre une mesure aussi rigoureuse et sévère que la discrimination directe en raison de la nationalité en cause dans les présentes affaires » (point 140). La notion de loyauté invoquée par les états « en tant qu’expression d’engagement envers la communauté politique et de solidarité avec celle-ci ne saurait, pour autant, être considérée comme signe distinctif et exclusif, propre aux États membres en tant que tels, de sorte qu’elle exigerait nécessairement un lien de nationalité »  (point 142) remarque l’Avocat Général .

    La conclusion suit : «…une mesure qui introduit une condition de nationalité telle celle contestée par la Commission dans les présentes affaires apparaît disproportionnée dans la mesure où elle n’est pas nécessaire à la réalisation des fins poursuivies par chaque État lorsqu’il entend soustraire l’activité notariale à la liberté d’établissement » (point 146). Par conséquent,  il y a bien manquement d’Etat et la réglementation française doit être revue.

    Avocat Général, 14/09/2010, conclusions, aff. C-47/08, C-50/08, C-51/08, C-53/08, C-54/08, C-61/08 et C-52/08, Commission / Belgique, Commission / France, Commission / Luxembourg, Commission / Autriche, Commission / Allemagne, Commission / Grèce, et Commission / Portugal

    Domaguil

     

    La Cour de Justice a suivi les conclusions de son avocat général dans son arrêt du 24 mai 2011, voir la note du même jour :

    Plus besoin d'être français pour être notaire en France


  • Pas de primes d'assurances différenciées en fonction du sexe

    Le sexe de l’assuré ne doit pas être pris en compte comme de facteur de risque dans les contrats d’assurance et donc de tarification différenciée. Telle est la solution préconisée par l’Avocate générale Mme Juliane Kokott dans une affaire dont la Cour de Justice de l’Union européenne aura à connaître prochainement.

    La directive communautaire 2004/113 du 13 décembre 2004 interdit toute discrimination fondée sur le sexe aussi bien dans l’accès à des biens et services que dans la fourniture de biens et services. Il résulte donc de ce texte que les primes des contrats d’assurance conclus après son entrée en application (le 21/12/2007) ne peuvent pas être calculées en fonction du sexe de l’assuré, sauf si le sexe est un facteur déterminant dans l’évaluation des risques et si la différenciation tarifaire peut être étayée par des données statistiques et actuarielles précises et pertinentes.

    Or, cette exception prévue par la directive a été contestée en justice par une association belge de consommateurs et par deux particuliers qui font valoir que cette dérogation est incompatible avec des normes de droit supérieur, en l’occurrence le principe d’égalité de traitement des hommes et des femmes consacré par les traités et la jurisprudence de la Cour qui en fait un principe général du droit communautaire. Dans ses conclusions, l’Avocate Générale confirme cette interprétation et propose à la Cour d’annuler la disposition dérogatoire. Pour en atténuer les effets sur les contrats en cours, elle préconise que l’annulation ne produise d’effets que pour l’avenir et qu’elle ne prenne effet qu’au terme d’une période transitoire de trois ans après le prononcé de l’arrêt.

    Si la Cour suit les conclusions de son Avocat Général (ce qu’elle n’est pas obligée de faire), c’est donc la tarification plus avantageuse de certains contrats d’assurance (auto, santé, prévoyance) en faveur des femmes qui sera remise en cause. Les représentants des assureurs ont déjà réagi en annonçant le risque de répercussions importantes sur les tarifs et les couvertures si le principe de différenciation (qu’ils distinguent de la discrimination) est remis en cause. Les assurées ne seront pas ravies non plus.

    Avocat Général, conclusions du 30/09/2010, aff.C-236/09, Association belge des Consommateurs Test-Achats e.a.

    Domaguil