Les chefs d’état et de gouvernement réunis à Bruxelles les 14 et 15 décembre se sont ralliés aux analyses de la Commission européenne sur la stratégie future d’élargissement de l’Union européenne (pour plus d’information sur les discussions du Conseil voir : Conclusions du Conseil européen de Bruxelles).
C’est l’occasion de faire le point sur cette question controversée et propice aux rumeurs. Verra-t-on bientôt une Union européenne à 30, 35 voire plus de membres ? Va-t-on élargir en direction de pays non européens ? (j’ai lu récemment dans un forum qu’Israël avait vocation à devenir membre de l’Union européenne ; mais si mais si, il y a des gens qui le croient ).
Tentons de démêler le vrai du faux.
Après une résolution très critique du Parlement européen dans laquelle celui-ci appelait l’Union européenne à renforcer sa « capacité d’absorption » préalablement à tout nouvel élargissement, la Commission européenne avait appelé à son tour à plus de prudence dans un rapport rendu public le 8 novembre 2006.
Dans ce document consacré à la future stratégie d’élargissement de l’Union européenne, la Commission indique que la priorité doit être donnée à la solution du problème institutionnel ouvert par le rejet du traité constitutionnel européen. L’Union doit aussi dorénavant s’assurer qu’elle a bien la capacité politique, économique et budgétaire d'intégrer un nouveau pays et que tout nouvel élargissement sera bien accepté par les peuples européens. Enfin, la réforme de la méthode même des négociations doit être poursuivie en utilisant de façon plus systématique des critères de référence, afin d’apprécier concrètement l ‘état de réalisation des différents chapitres de négociation. De même, les questions de la réforme des systèmes judiciaires des pays candidats, des capacités administratives, et de la lutte contre la corruption et la criminalité organisée seront abordées au début d u processus des négociations et non à la fin comme c’était le cas.
Sur la question des frontières « ultimes » de l’Europe communautaire la Commission européenne rappelle que L’Union européenne se définit d’abord et avant tout par ses valeurs. Selon l’article 49 du traité sur l’Union européenne «tout État européen qui respecte les principes énoncés à l'article 6, paragraphe 1, peut demander à devenir membre de l'Union». Cet article, qui est la base juridique de l’élargissement pose donc deux critères à remplir pour devenir membres de l’Union européenne : être un état européen et faire siennes les valeurs de l’Union.
Mais où en est-on exactement du processus d’élargissement?
Aujourd’hui, deux nouveaux états s’apprêtent à devenir officiellement membres de l’Union européenne : la Bulgarie et la Roumanie, à partir du 1er janvier 2007. Trois autres pays, la Croatie, la Turquie et la Macédoine, sont candidats à l’adhésion. Pour les deux premiers, les négociations d’adhésion ont officiellement débuté le 3 octobre 2005. Pour la Macédoine, les négociations conduisant à l’adhésion n’ont pas encore été ouvertes
Les autres pays des Balkans occidentaux (l’Albanie, la Bosnie-et-Herzégovine, le Monténégro et la Serbie et le Kosovo) sont moins avancés dans la voie d’une adhésion à l’Union, puisqu’ils sont des « candidats potentiels » selon la terminologie européenne.
Et combien cela coute-t-il?
Concrètement, pays candidats et candidats potentiels bénéficient d’une aide européenne pour se préparer à une éventuelle adhésion : c’est l’instrument de préadhésion (IPA) qui remplace les anciens programmes d’aide (Phare, Cards, Ispa et Sapard). Au total, l’aide communautaire allouée à la Turquie et aux pays des Balkans pour les sept prochaines années doit représenter près de 11,5 milliards euros, ce qui, rapporté à la population totale de l’Union (Bulgarie et Roumanie comprises) qui est d’un peu plus de 490 millions d’habitants en 2006 selon les prévisions de l’office statistique communautaire Eurostat, donne un coût par habitant de 23,5 euros pour la période soit 3,3 euros par an.
Tous les ans, la Commission publie des rapports de suivi sur les différents pays pour faire le point sur la façon dont ils s’alignent sur la législation communautaire et se rapprochent des critères européens. Dans son rapport sur la stratégie d’élargissement, la Commission avertit : « Il est prématuré de spéculer sur la date à laquelle la prochaine adhésion aura lieu. Il est actuellement peu probable qu’un grand groupe de pays puisse à l’avenir adhérer à l’Union simultanément ». Autant dire que pour l’Union européenne, l’heure semble être à l’attentisme, afin d’ « éviter tout débordement dans son programme d’élargissement ».
Domaguil