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Concurrence / Service Public/ Energie - Page 5

  • Quel avenir pour les tarifs réglementés de l électricité?

    On le sait, depuis la décision du Conseil constitutionnel (Décision n° 2006-543 DC du 30 novembre 2006, Loi relative au secteur de l’énergie), la libéralisation complète du marché de l’énergie au 1er juillet 2007 n’est pas sans incidence sur les tarifs réglementés du gaz et de l’électricité dont bénéficient les consommateurs français. Certes, le juge constitutionnel a estimé que  le fait de maintenir un tarif réglementé de l’électricité (c’est à dire non lié aux prix du marché et fixé par les pouvoirs publics) n’est pas expressément interdit par les directives européennes, mais à condition, a-t-il ajouté, que cette tarification soit limitée aux seuls contrats en cours au moment de la libéralisation, c’est-à-dire aux contrats avec des consommateurs n’ayant pas déménagé ou changé de situation personnelle (voir l’article : Quand le droit communautaire s'impose au juge constitutionnel français). Et les organisations de consommateurs de nous mettre en garde depuis quelque temps : avant de se laisser séduire par les sirènes de la concurrence leur faisant miroiter des prix plus bas, les consommateurs doivent y réfléchir à deux fois, car résilier leur abonnement auprès d’EDF ou de GDF  les fera perdre le droit au tarif réglementé et cela, de façon irréversible. Quand bien même, pris de remords, ils décideraient ultérieurement de revenir à leur fournisseur « historique », ils se verront appliquer les prix du marché. Prudence donc, nous est-il conseillé, car si des offres inférieures aux tarifs réglementés seront certainement proposées dans un premier temps pour attirer les clients sur de nouveaux contrats, elles risquent fort de faire très vite place à des augmentations importantes de prix, comme en ont fait l'expérience nombre d’entreprises pour lesquelles le marché de la fourniture d’énergie a été ouvert depuis plusieurs années déjà.

     

    Mais voilà que la Commission européenne s’intéresse également aux tarifs réglementés français  et annonce, le 13/06/2007, l’ouverture d’une enquête pour s’assurer que les tarifs réglementés de l’électricité ne constituent pas des aides publiques aux entreprises prohibées par le droit communautaire de la concurrence. La Commission s’est avisée que des entreprises qui avaient profité de la libéralisation pour quitter le marché réglementé ont la possibilité, depuis 2007, d’y revenir et payer l'électricité à des prix certes supérieurs aux prix réglementés initiaux, mais toujours inférieurs aux prix du marché. Il s’agit principalement d’industriels gros consommateurs d'énergie, qui ont eu la capacité de négocier (en mettant notamment en avant les risques de délocalisation), une protection contre la hausse des prix de l’électricité à laquelle est confronté le commun des mortels. Le système, explique la Commission, semble être essentiellement financé par l'entreprise publique Électricité de France (EDF) et par des taxes parafiscales perçues sur tous les consommateurs français d'électricité et gérées par l'État. Ces tarifs industriels d'électricité réglementés à un niveau artificiellement bas dont bénéficient de grandes et moyennes entreprises pourraient-ils être assimilés à des subventions publiques entraînant des distorsions disproportionnées de la concurrence ? Telle est la question à laquelle l’enquête devra répondre. Les tarifs réglementés applicables aux particuliers et aux petites entreprises ne sont pas concernés.

    Domaguil  

     

  • La libéralisation complète des activités postales en Europe peut encore attendre

    A la suite d’une consultation publique lancée en novembre 2005, la Commission européenne a présenté une proposition  d’ouverture totale à la concurrence des activités postales en 2009. Comme je l’expliquais dans un article du 24/10/2006, cette proposition  se heurte à une forte opposition, assez pour retarder son adoption qui requiert un vote favorable du Conseil et du Parlement européen selon la procédure de codécision. Or, l'examen du texte par le Conseil, hier, montre que les états sont divisés sur la question.

     

     

    Le compte rendu publié indique que les discussions entre les états ont permis des  « progrès significatifs » sur des points clés tels que le maintien d’un service universel de qualité,  les règles de désignation des fournisseurs de service universel, l’accès aux infrastructures postales, les principes de tarification…

     

     

    Mais sur la date de mise en oeuvre de la libéralisation, aucun rapprochement n’a été constaté entre les pays qui, à l’instar de la France, refusent de fixer une date et ceux qui veulent hâter la libéralisation complète des services postaux, menés par l’Allemagne qui souhaitait qu’un accord politique intervienne sous sa présidence, donc avant le 1er juillet. La pierre d’achoppement est le financement du service universel. La France, mais aussi des pays comme la Belgique, l'Espagne, le Luxembourg, la Grèce, l'Italie, la Pologne, la Hongrie et d'autres nouveaux membres demandent qu’avant de fixer une date pour la libéralisation, ce financement soit garanti par des mécanismes clairs et qui ne puissent pas être remis en cause par la Commission au nom du respect de la concurrence. La directive proposée est de leur avis trop vague sur ce point.

     

     

    La Commission est donc priée de remettre l’ouvrage sur le métier et de préciser sa proposition. Le texte sera ensuite examiné par le Parlement européen où un nombre croissant de députés s’oppose à présent également à la date butoir. Un répit salutaire pour trouver des solutions permettant de concilier exigences du service public et impératifs du droit communautaire de la concurrence.

     

     

    Et pour finir, puisqu’il est question de service public, retour sur une initiative que j’avais évoquée à l’automne dernier, celle de la Confédération Européenne des Syndicats qui a lancé en novembre une pétition pour défendre les services publics dans l’Union européenne. A ce jour, la pétition a recueilli plus de 340 000 signatures. Pas mal, non ? Vous voulez signer cette pétition ? C’est très facile. Il suffit de suivre ce lien.

     

    Domaguil

     

  • Le monopole de distribution du Livret A contesté par la Commision européenne

    A la suite d’une plainte de plusieurs banques françaises, la Commission européenne avait ouvert une enquête en juin 2006 pour savoir si le monopole de distribution des livret A et bleu accordé en France à la Poste, aux Caisses d’Epargne et au Crédit mutuel constituait un avantage concurrentiel contraire aux règles du droit communautaire de la concurrence (pour plus de détails, voir la note que j’avais rédigée à l ‘époque:

     La Commission européenne enquête sur le livret A et le livret bleu ).

     

     

    L’annonce de l’ouverture de la procédure avait été accueillie avec satisfaction par les banques et de façon concomitante, par un concert de protestations des organismes HLM et de divers syndicats qui se disaient inquiets pour l’avenir du Livret A.

     

     

    La Commission européenne avait pourtant précisé que l’existence du  livret A (et celle du livret bleu) n’était pas menacée mais seul le droit exclusif de le distribuer. En d’autres termes, il n’était pas question de mettre à mal  l’exception française que constitue l’épargne administrée et de contester ses finalités sociales, mais de mettre fin au « privilège injustifié » (selon les banques plaignantes) dont bénéficieraient les organismes qui le distribuent. Mais comme le petit berger qui avait trop crié au loup pour être cru,  la Commission avait beau expliquer, elle n‘était pas entendue. Car, on nous le répète assez, les technocrates qui la composent n’ont qu’une obsession : détruire notre beau modèle social et toutes leurs dénégations sont autant de manipulations pour couvrir leurs sombres desseins (bien entendu, je plaisante : je précise pour ceux qui seraient tentés de prendre ces lignes au premier degré).

     

     

    Donc, dans ce climat de méfiance exacerbée, et après une campagne présidentielle très cocardière dans laquelle l’Europe a endossé une fois de plus le rôle du croquemitaine, voilà que la Commission européenne, à peine le nouveau Président élu et juste revenu de croisière, en « rajoute une couche » en annonçant le 10 mai, qu’elle donne neuf mois à la France pour supprimer le monopole de distribution des livrets A et bleu. Car, après examen, la Commission s’est avisée qu’effectivement, « les droits spéciaux de distribution en cause constituent une restriction incompatible avec le droit communautaire et ne sont pas indispensables pour assurer de manière satisfaisante les deux services d’intérêt économique général invoqués par les autorités françaises, à savoir le financement du logement social et l’accessibilité aux services bancaires de base ». Mais elle ajoute : « La modification demandée du mode de distribution des livrets A et bleu ne remet pas en cause les missions d’intérêt général qui y sont attachés et n’implique aucun changement défavorable dans le fonctionnement de ces livrets pour les particuliers ».

     

     

    Mon petit doigt me dit que cette précision n’empêchera pas que s’élèvent des cris d’indignation contre cette odieuse libéralisation qui porte un nouveau coup au système social, contre cette marchandisation à outrance qui va tondre les petits épargnants, contre cette Europe sans âme qui avantage les seuls financiers …Dans un appel à signature de septembre 2006, l' Intersyndicale du secteur semi-public économique et financier dénonçait déjà la « banalisation » de la distribution du livret A.

     

     

    Les syndicats font valoir que les banques ayant pour vocation de faire des bénéfices, elles se serviront du livret comme produit d’appel pour ensuite orienter les épargnants vers des placements maison plus rémunérateurs, ce qui sera certes plus avantageux pour les clients mais qui diminuera d’autant les fonds affectés au logement social. Pas du tout rétorquent les banques qui jurent que la libéralisation va au contraire relancer la construction des logements sociaux en multipliant les canaux de distribution du livret A.

     

     

    Pour sa part, la Caisse des dépôts et des consignations n’est pas convaincue par ces protestations. Cet établissement public centralise l’épargne collectée par le biais du livret moyennant le versement d’une commission aux établissements qui le distribuent. Il utilise ensuite les fonds pour prêter de l'argent aux organismes HLM Dans une note du 27/09/2006, la Caisse exprime sa préoccupation devant un risque de tarissement du financement du logement social et demande au Gouvernement « de faire tout ce qui est en son pouvoir » pour l’éviter. La question posée est de savoir si les politiques de construction de logements sociaux, faute de pouvoir s’adosser à l’épargne populaire, devraient à l’avenir se tourner soit vers l’impôt, soit vers l’emprunt avec dans ce dernier cas la perspective d’un renchérissement des coûts. Et il serait paradoxal que la construction de logements sociaux soit compromise alors que le droit au logement opposable récemment voté par le Parlement la confirme au contraire comme un objectif prioritaire. La question mérite donc d’être étudiée. Mais dénoncer l’ « ultimatum » de la Commission européenne n’est pas la réponse.

     

     

    Le second argument, étroitement lié au premier, avancé par les adversaires de la libéralisation est le risque de voir disparaître le dispositif de centralisation de l’épargne par la Caisse de consignation. Pourtant, la Commission européenne ne le met nullement en cause et l’état français pourra  imposer aux banques assurant la distribution du livret A la même obligation de centralisation intégrale des fonds collectés à la Caisse des dépôts (comme le rappelle le communiqué de la Commission).

     

     

    Enfin, les syndicats  soulignent que le Livret A est le refuge d’une clientèle aux ressources limitées et contribue ainsi à la cohésion sociale en évitant l’exclusion bancaire. Attendre des banquiers qu’ils s’acquittent spontanément de cette mission serait pour le moins irréaliste, c’est un fait. Mais qu’est ce qui empêchera l’état d’imposer des obligations de service public aux banques qui voudront distribuer les livrets, en contrepartie de cette possibilité ? Et notamment de les obliger à accepter tous les clients, sans discrimination, comme c'est le cas aujourd'hui à la Banque postale ?

     

     

    La fin du monopole de distribution du livret A n’aura pas inéluctablement les conséquences néfastes prédites par les cassandre syndicales. Tout dépendra de la façon dont les autorités français la mettront en œuvre, donc de choix politiques nationaux et non communautaires. En revanche, le sort de la Banque postale semble évidemment plus incertain car son activité dépend en grande partie du livret A.

     

     

    Quelle sera la position de Nicolas Sarkozy dans ce dossier? C’est la dernière question posée avec gourmandise par les medias.

     

     

    Le Ministère des finances du futur ex Gouvernement a, quant à lui, annoncé qu’un recours devant la Cour de Justice des Communautés européennes pour obtenir l'annulation de la décision de la Commission était prévisible. Il reste à savoir si cette annonce sera confirmée par ses successeurs.

     

    Domaguil

     

     

  • La Commission européenne se penche sur la musique en ligne

    Comme l’a remarqué avec pertinence un visiteur de ce blog, le droit communautaire de la concurrence concerne aussi bien les entreprises privées que publiques, ce à quoi j’ajouterai : et non seulement les entreprises européennes mais aussi celles des pays tiers si elles ont des activités sur le territoire de l’Union européenne.

    Preuve en est : non contente de "faire des misères" au mastodonte nord américain Microsoft, la Commission européenne tourne à présent son regard justicier vers les majors du disque et Apple, soupçonnés d’entrave à la concurrence, en violation de l’article 81 du traité sur la Communauté européenne.

    Elle annonce ainsi, dans un communiqué du 03/04/2007 , le lancement d’une procédure. L’ouverture des hostilités commence par une communication de griefs. En clair, la Commission explique à Apple et aux grandes maisons de disques ce qu’elle leur reproche.

     

    Sont en cause les accords conclus entre les majors et Apple aux termes desquels les clients de son magasin iTunes ne peuvent acheter de la musique que dans le magasin en ligne de leur pays de résidence. Or, les catalogues mis à la disposition des consommateurs et les prix de vente sont différents d'un état membre à l'autre. Donc, ces accords constituent des restrictions territoriales à la libre circulation des biens et des services dans le marché intérieur et au choix des consommateurs. Telle est l’analyse de la Commission européenne.

    Ce coup de semonce fait suite à la plainte d’une association de consommateurs britanniques  mécontents de payer des prix plus élevés que leurs chanceux voisins pour télécharger de la musique.

    Les sociétés en cause ont deux mois pour présenter des arguments pour leur défense, étant précisé qu'Apple pour sa part s'est déclaré favorable à une seule boutique en ligne et que la segmentation résulte d’une exigence des maisons de disques.

    Celles-ci  vont avoir du pain sur la planche pour convaincre du bien fondé de cette pratique car la Commission européenne n’en est pas à son coup d’essai et a déjà entrepris des procédures contre les sociétés d’auteurs (comme la SACEM en France) accusées de cloisonner le marché de la musique. Pour la Commission celui-ci ne peut être que paneuropéen.

    Domaguil